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Drames de la piraterie sur le Mékong

Le 8 novembre dernier, Yang Xi, officier de presse de la police des frontières du Yunnan expliquait que la Chine allait participer à une force internationale de contrôle de la navigation sur le Mékong, armée par la Thaïlande, le Laos, le Myanmar et la Chine. Pour leur part, les unités de surveillance des frontières du Yunnan fourniraient dès le mois de décembre 1000 hommes et 5 patrouilleurs.

Cette décision fait suite à l’assassinat, le 5 octobre dernier, de 13 marins chinois, dont deux femmes cuisinières, membres d’équipage des cargos Hua Ping et du Yu Xing 8, dont les corps ont été retrouvés menottés et les yeux bandés. Ils flottaient dans les eaux du Mékong dans la région de Chiang Rai, au nord de la Thaïlande, non loin du « Triangle d’Or », zone traversée par les trafics de bois et d’opium, où se recoupent les frontières de la Birmanie, du Laos et de la Thaïlande, à 100 km au sud de la frontière chinoise.

Les quatre pays ont également convenu d’échanger des informations « pour éradiquer les organisations criminelles qui menacent la sécurité de la région ». Facile à dire, dans une région où les ramifications occultes des trafics débordent vers les sociétés secrètes chinoises et où, au temps de la lutte contre le communisme, les revenus du commerce de l’héroïne alimentaient à la fois les fonds secrets de la CIA destinés aux régimes amis des Etats-Unis et les dissidences procommunistes soutenues par Mao.

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Complexité des imbrications mafieuses.

Le fait que les 9 suspects arrêtés soient des militaires Thaï en rupture de ban en dit long sur les imbrications sous-jacentes encore à l’œuvre et laisse augurer que la tâche sera bien plus complexe que ne le laisse entendre le discours officiel. En réalité, le meurtre des marins chinois, qui fait d’ailleurs suite à un autre incident en avril dernier où 34 marins de 3 bateaux chinois avaient été pris en otages puis relâchés, renvoie à la situation de non droit de la région où des gangs incontrôlés, parfois soutenus par des armées privées, opèrent impunément depuis des décennies, kidnappant les équipages et exécutant ceux qui refusent de payer une rançon.

Après les militaires thaïlandais, les enquêteurs pointent du doigt des seigneurs de la guerre birmans et laotiens impliqués dans un vaste commerce qui mêle activités légales et illégales, avec le soutien des autorités locales, civiles et militaires de toutes ces régions frontalières. Au-delà des difficultés liées aux imbrications des trafics avec les autorités, l’affaire, qui exigera aussi des accords règlementant la présence de forces militaires étrangères sur les territoires nationaux, suggère une coopération multinationale sans arrières pensées.

Un test des capacités de bon voisinage de Pékin.

Or Pékin – qui préfère les relations bilatérales - s’est toujours tenu en marge de la Commission du Mékong – héritière du Comité du Mékong créé en 1957, et établie en 1995 par le Laos, le Cambodge, la Thaïlande et le Vietnam – le Myanmar a rejoint en 1996 -. La Commission est destinée à réguler le cours du fleuve, à gérer l’exploitation de ses ressources, et à contrôler l’impact sur la pêche artisanale et le mode de vie des riverains des barrages hydroélectriques et de régulation des eaux, destinés à améliorer la navigabilité du fleuve.

A l’heure où les relations de la Chine avec les pays de l’ASEAN restent tendues par la crainte d’une hégémonie chinoise, non seulement en Mer de Chine du Sud, mais aussi dans le bassin du Mékong où les barrages construits sans grande concertation par la Chine (4 terminés depuis 1993 et plus d’une dizaine d’autres planifiés au sud de la Chine) ont soulevé de nombreuses critiques, la mise en place d’une coopération de sécurité qui dépasse les questions commerciales pourrait à la fois constituer une étape historique et un test de l’aptitude de Pékin à rassurer ses voisins toujours inquiets de la disproportion des forces.

 

 

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