Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

 Cliquez ici pour générer le PDF de cet article :

›› Chronique

Les tribulations nucléaires franco-chinoises à l’export

En octobre 2013, EDF et ses partenaires chinois ont signé avec AREVA et le gouvernement britannique un accord pour un projet de construction de 2 réacteurs EPR de 1650 MW sur le site de la centrale nucléaire de Hinckley Point (60 km au Sud-ouest de Bristol), qui doit être mise à l’arrêt en 2016, après 50 années de service.

EDF, qui avait racheté British Energy en 2008, détiendrait la majorité des parts, ses deux partenaires chinois, la China Guangdong Nuclear Power Group (CGN) et la China National Nuclear Corporation 30 à 40 % et Areva, fabricant des réacteurs 10%.

L’accord été signé au milieu des protestations des anti-nucléaires qui affirment que la centrale qui aurait du être arrêtée en 2000, continue à fonctionner malgré des « fissures dans le cœur du réacteur » (Voir le site Stop Hinkley). Le financement initial d’abord chiffré à 16,7 Mds d’€ en septembre a été réévalué à 19 Mds d’€ et le démarrage du projet reporté à 2023.

Un projet de 2 autres EPR est prévu à Sizewell, 150 km au Nord-est de Londres dans le Conté de Suffolk. Si un accord était conclu pour ce deuxième projet, l’arrangement entre le gouvernement britannique et EDF prévoit que le prix du MW/h, garanti pour 35 ans passerait de 92,50 £ (110,7 €) à 89,50 £ (107 €) soit 2 fois le prix actuel du marché.

La prochaine étape sera la validation du montage financier par la Commission européenne qui, s’il était refusé, remettrait en cause l’ensemble des investissements. L’autorisation de Bruxelles n’est pas acquise puisque l’accord pour un prix du MW/h très au-dessus du marché pourrait être considéré comme une subvention illégale et un traitement préférentiel accordé à un seul opérateur. Par ailleurs, EDF a également fait signer une clause de garantie qui, en cas de fermeture du réacteur pour des raisons autres que la sécurité, obligerait le gouvernement britannique à rembourser les investissements du consortium.

Selon Stephen Thomas expert des politiques énergétiques à l’Université de Greenwich, il n’est pas impossible que l’UE impose des conditions qui mettraient EDF dans une position difficile vis-à-vis des partenaires chinois.

L’accord du gouvernement britannique est intervenu après un voyage en Chine du chancelier de l’échiquier George Osborne qui, à l’université de Pékin, répéta l’ouverture du gouvernement britannique aux investissements chinois. « Les Anglais ne sont pas jaloux de vos succès économiques, ils veulent les partager ». Le 17 octobre, de retour à Londres, il a annoncé qu’à terme Royaume Uni accepterait que les groupes chinois pourraient détenir la majorité des parts dans un consortium nucléaire civil.

D’autres accords ont été signés lors de la visite d’Osborne en Chine, comme l’extension de l’aéroport de Manchester par un groupe de Pékin pour 1,3 Mds de $, ou l’autorisation accordée aux Britanniques d’investir jusqu’à 13 Mds de $ en Chine en même temps que l’autorisation de libeller les échanges directement en Livres Sterling ou en Yuan à hauteur de 200 Mds de Yuan (20 Mds de £, 24 Mds d’€ ou 32 Mds de $).

A quoi s’ajoute un accord sur les visas autorisant les Chinois venant en GB à bénéficier par certaines agences de voyage de délais plus rapides. Une procédure d’urgence a même été établie qui attribuera les visas en 24 heures.

A ce jour la GB est la destination favorite des investissements chinois en Europe avec un total de 17,8 Mds de $ contre 9,2 Mds de $ en France. Si l’accord sur l’investissement nucléaire allait à son terme, il constituerait avec les 5 à 7 Mds d’€ d’investissement envisagés par les 2 géants du nucléaire civil chinois, le plus gros investissement direct chinois en Europe. Le premier ministre Camerone qui se rendra en Chine début décembre a bien l’intention de pousser ces avantages, y compris en se faisant l’avocat d’un traité de libre échange entre l’UE et Pékin. Une proposition que Bruxelles trouve très prématurée.

++++

Investissements chinois en Europe et en France.

Les dernières statistiques montrent que le flux annuel des investissements chinois en Europe est passé de moins d’un milliard avant 2008 à une moyenne de 3 milliards entre 2009 et 2010, pour ensuite augmenter rapidement au-dessus de 10 Mds au cours des dernières années. Les secteurs les plus visés sont l’énergie, les équipements automobiles, l’industrie chimique, l’agro-alimentaire et les machines outils.

Selon le Trésor Public français, les investissements chinois en France qui représentent 55 % des investissements français en Chine (le stock des investissements français en Chine s’élevant à 16,7 Mds EUR fin 2012), restent peu élevés. Mais ils pourraient augmenter assez vite du fait de la volonté affirmée des autorités chinoises d’internationaliser leurs entreprises et d’acquérir des technologies étrangères et des marques.

En France les plus gros investissements chinois concernent (source Challenges.fr)

1) GDF-SUEZ. En 2011, le fonds souverain chinois China Investment Corporation (CIC) acquiert 30% des activités d’exploration-production de gaz et de pétrole du groupe d’énergie français pour un montant de 3,187 Mds de $ (2,3 milliards d’euros).

2) GDF SUEZ. Toujours en 2011, le groupe d’énergie français cède au même fonds CIC, sa participation de 10% dans l’usine de liquéfaction Atlantic LNG de Trinité-et-Tobago pour un montant de 831 millions de dollars (600 millions d’euros).

3) EUTELSAT COMMUNICATIONS. En 2012, l’actionnariat espagnol d’Eutelsat Communications cède 8% du capital de l’opérateur de satellites à CIC pour un montant de 484 millions de dollars (385,2 millions d’euros).

4) AIGLE AZUR. En 2012, le groupe chinois HNA, holding spécialisé dans le secteur touristique, entre au capital de la compagnie aérienne Aigle Azur à hauteur de 48% pour un montant de 40 millions de dollars (environ 30 millions d’euros).

5) DIVA BORDEAUX. Négociant en grands vins de Bordeaux. En 2012, le leader chinois de l’agroalimentaire SSCW, filiale de Bright Food entre au capital de Diva Bordeaux, négociant en grands vins de Bordeaux à hauteur de 70% pour un montant de 39 millions de dollars (environ 30 millions d’euros).

6) CLUB MED. En 2010, le groupe chinois Fosun acquiert 7,1% du capital du Club Méditerranée pour un montant de 35 millions de dollars (26 millions d’euros)

7) ECHOSENS. En 2011, le groupe pharmaceutique chinois Inner Mongolia Free Han et Mongolia pharmaceuticals Co., LTD rachète la société Echosens pour un montant de 29 millions de dollars (20 millions d’euros).

8) LISA AIRPLANES. En 2013, les deux dirigeants de la société chinoise Lisa Aircraft, Tiri Maha et Yao Zhang, reprennent Lisa Airplaines, entreprise d’aviation située en Savoie (73) à hauteur de 28 millions de dollars (20 millions d’euros)

9) CHÂTEAU DE VIAUD. En 2011, le groupe chinois COFCO, spécialisé dans le commerce de céréales, d’huiles et de nourriture rachète le château de Viaud, un vignoble bordelais au prix de 14 millions de dollars (10 millions d’euros).

10) MCCORMICK SAS. En 2011, le groupe chinois YTO Group Corporation reprend l’entreprise McCormick France Sas, après sa liquidation judiciaire en 2010, pour un montant de 11 millions de dollars (8 millions d’euros).

A noter que la moitié des investissements ont été réalisés par le Fond souverain chinois CIC, dont 42% dans le secteur de l’énergie.

 

 

Commission mixte scientifique 2024 : et après ?

[7 avril 2024] • Henri Clairin

Chine - France : Commission mixte scientifique 2024, vers une partie de poker menteur ?

[29 février 2024] • Henri Clairin

A Hong-Kong, « Un pays deux systèmes » aux « caractéristiques chinoises. »

[12 novembre 2023] • Jean-Paul Yacine

Chine-Allemagne : une coopération scientifique revue et encadrée

[9 octobre 2023] • Henri Clairin

Pasteur Shanghai. Comment notre gloire nationale a été poussée vers la sortie

[23 septembre 2023] • Henri Clairin