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Tueries aux Etats-Unis. La Chine conteste le magistère moral de Washington

Le porte parole du Waijiaobu chinois utilise fréquemment les fusillades américaines pour réfuter les critiques de Washington sur l’état des droits en Chine.

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Quel que soit l’angle de vue, l’administration américaine doit se rendre à l’évidence : la répétition des massacres par armes à feu aux États-Unis contribue à très gravement affaiblir la position de prévalence morale et éthique dont les Américains se créditent eux-mêmes quand ils dénoncent les abus contre le droit en Chine ou sur le théâtre de la mer de Chine du sud où ils accusent Pékin de ne pas respecter les dispositions du droit de la mer.

Les derniers dérapages catastrophiques ayant un arrière plan de fracture raciste dans le Minnesota et en Louisiane suivis du règlement de comptes de Dallas où 5 policiers furent assassinés par un tueur noir qui clamait vengeance, à quelques centaines de mètres seulement de l’endroit où John Kennedy avait été abattu en 1963, tracent une trajectoire funeste de violence irréductible qui prend à nouveau les aspects d’une guerre civile.

L’émotion aidant, les accusations portent, au-delà même de l’opinion chinoise, à l’étranger et dans l’opinion publique américaine. Les critiques font mouche. Alors que les États-Unis se parent d’une vertu éthique exemplaire pour critiquer les violations des droits chez d’autres et se donner en Mer de Chine du sud le rôle du gendarme du droit, ils sont incapables de faire respecter la loi chez eux où éclatent régulièrement des fusillades aveugles à quoi s’ajoute la violence rémanente d’une société fracturée par le racisme endémique.

Pékin récuse les critiques américaines.

Après les émeutes de Ferguson en 2014 [1] les internautes chinois avaient créé un site spécial dédié au suivi des fusillades aux États-Unis tandis que l’agence Xinhua soulignait que « les émeutes démontraient une fois de plus les progrès à faire pour le respects des droits dans le pays qui croit pouvoir se donner le rôle de défendre les droits universels sur toute la planète ».

A l’été 2015, le journal « l’Economist » peu suspect de véhiculer une idéologie anti-américaine, était même allé jusqu’à placer les fusillades aux États-Unis au même niveau endémique des grands handicaps nationaux tels que la pollution en Chine. « La régularité des assassinats de masse devient un arrière plan familier au point qu’ils constituent un “bruit de fond“ routinier que l’administration est incapable d’éradiquer, tout comme le régime chinois est incapable d’éradiquer la pollution ».

Selon le journal, les deux auraient des racines culturelles sociales, économiques et politiques. Il ajoutait cependant avec ironie « Encore l’appréciation est-elle injuste, puisque les Chinois semblent faire quelques progrès pour améliorer l’environnement, alors qu’aux États-Unis les fusillades augmentent, tandis que la loi sur les armes ne change pas ».

L’image d’une Amérique violente.

Il est un fait que, les statistiques aidant, en Chine l’image s’est répandue d’une Amérique dangereuse et violente. Si les parents chinois considèrent toujours avec envie les grandes universités américaines où ils rêvent d’envoyer leurs enfants, depuis quelques années se propage la crainte d’un risque de sécurité dans un pays où l’usage des armes est mal contrôlé.

Au palmarès des morts par arme à feu, l’Amérique se situe au 4e rang mondial derrière le Mexique, la Turquie et l’Estonie avec 38 morts pour 1 million d’habitant, contre une moyenne de 12 pour les pays de l’OCDE. A titre indicatif le record mondial est détenu par le Mexique (189 morts) suivi de la Turquie (43) et de l’Estonie (40). La France est dans la moyenne avec 12 morts.

Mais les États-Unis détiennent le record mondial des tueries de masse. Après les 10 victimes dans un collège de l’Oregon en octobre 2015, le Wall Street Journal avait établi qu’avec 5% de la population mondiale, les États-Unis avaient compté 31% des tueries de masses entre 1966 et 2012, 5 fois plus que les Philippines, n°2 au palmarès.

C’est cette réalité marquée par la violence et le racisme que le régime chinois utilise pour récuser les critiques récurrentes adressées par les États-Unis à Pékin sur la situation du droit en Chine.

La violence interne, matrice d’une diplomatie brutale.

Enfin, voilà plusieurs années que le politburo et les médias officiels chinois relayés par les réseaux sociaux font un amalgame entre la violence intrinsèque et récurrente de la société américaine et la situation mondiale dominée par les tentations militaristes de la Maison Blanche au Moyen Orient et en Asie où Pékin accuse Washington de fomenter le « chaos ».

Récemment, dans l’arrière cour de la Chine, il n’a pas échappé au politburo que la levée de l’embargo sur les armes au Vietnam avait assez peu à voir avec les progrès du droit des personnes (100 dissidents politiques y sont actuellement en prison selon Human Rights Watch), mais tout avec la volonté de Washington d’installer un rapport de forces avec Pékin.

Si on hausse l’analyse d’un étage, on constate que Pékin utilise cette faiblesse pour nier aux États-Unis et aux Occidentaux le droit de se poser en défenseur du droit international.

Le 10 juillet un article du Quotidien du Peuple signé par l’habituelle voix anonyme de la Chine 中 声 zhongsheng, commentait les récentes mise en cause de Tony Blair en Grande Bretagne à propos de la guerre en Irak déclenchée illégalement et reprenait les accusations de l’usage biaisé du droit international en Irak, en Crimée et en mer de Chine du sud, dans le but de promouvoir les seuls intérêts occidentaux.

Note(s) :

[1A la suite du décès d’un jeune noir désarmé de 18 ans, tué de 6 coups de feu par la police, le 9 août 2014, des émeutes de la communauté noire et des affrontements raciaux avaient conduit à l’instauration de la loi martiale et à la réquisition de la garde nationale 8 jours plus tard.

 

 

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