Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Editorial

BO Xilai. Coup de grâce, batailles politiques et chausses trappes

Passes d’armes impitoyables.

Immédiatement après l’annonce de la mort politique de Bo, désormais livré à la justice et à ses anciens pairs, sans protection spéciale, le parti rendait publique la date du 18e Congrès, fixée au 8 novembre, plusieurs semaines après celle initialement prévue. L’annonce n’a cependant pas mis fin aux intenses spéculations des observateurs sur les probables rivalités internes à l’origine du retard. La séquence des événements survenus depuis quelques mois livre peut-être quelques clés.

Le 9 août dernier se tenait à Hefei le procès express et pré-arrangé de Gu Kailai, qui, suite à ses aveux assortis d’un acte de contrition, concluait à la culpabilité de madame Bo dans le meurtre de Neil Heywood. L’audience n’a cependant jamais évoqué le rôle joué dans le drame par son époux, ni même envisagé sa comparution comme témoin, forcément privilégié, compte tenu de sa fonction et de l’implication directe de l’appareil de sécurité de Chongqing dans l’assassinat du consultant.

Cette séparation artificielle dans les responsabilités du couple, opérée par le procès, laissa d’abord supposer la volonté du Parti de tenir Bo Xilai, déjà mis en examen pour corruption et abus de pouvoir, à l’écart du crime sordide perpétré par son épouse dans un hôtel de Chongqing un soir de novembre 2011. On évoquait alors la volonté de protéger le clan des fils de princes, dont Bo Xilai et le futur secrétaire général Xi Jinping, lui-même, sont issus.

Mais à peine un mois plus tard, éclatait le scandale Ling Jihua, proche fidèle de Hu Jintao, abruptement relevé de ses fonctions de chef du secrétariat du Comité Central et débarqué de la liste des prétendants possibles au Bureau Politique. Simultanément des indiscrétions du South China Morning Post, pilotées de Pékin, révélèrent que l’accident mortel de la « Ferrari noire » du 18 mars 2012, sur le 4e périphérique nord de Pékin, qui fit trois victimes, avait été provoqué par le fils Ling Jihua, tué dans la circonstance.

Pour faire bonne mesure, les fuites organisées précisaient aussi que l’identité du conducteur avait d’abord été maquillée sur ordre de Pékin et que Jiang Zemin lui-même serait intervenu pour précipiter la sanction du Parti contre Ling Jihua.

Alors que l’absence de Hu Jintao de l’assemblée générale des Nations Unies indique des tensions internes à la veille du Congrès, la riposte, qui vient de loin frappe sous la forme d’une mise en accusation dévastatrice de BoXilai, dont les attendus couvrent non seulement son dernier poste à Chongqing, mais également les périodes où il était ministre du commerce à Pékin, maire de Dalian et gouverneur du Liaoning.

Ces deux affectations étant celles où il s’était distingué dans la lutte sans merci contre les adeptes du Falun Gong, dont la cruauté lui valut des accusations de crimes contre l’humanité dans une dizaine de pays, précisément sous l’égide de Jiang Zemin, alors secrétaire général.

Ce dernier fut un temps le mentor de Bo Xilai. En échange, le très influent Bo Yibo, père de Bo Xilai, et adepte convaincu des réformes économiques, fut le principal artisan de la survie politique de Jiang Zemin, quand le père de ce dernier fut accusé de collaboration pro-japonaise pendant la guerre par ses ennemis, parmi lesquels on comptait le secrétaire général de la mairie de Pékin, Chen Xitong, purgé en 1995.

La colère déterminée et sans merci des ennemis de Bo Xilai et de sa mouvance populiste, s’exprime avec une violence rarement égalée dans la dépêche de Xinhua publiée le 28 septembre. Il est en effet accusé de graves violations de la discipline du Parti, d’abus de pouvoir, de trafic d’influence, de nombreuses relations sexuelles inappropriées et de corruption, non seulement dans sa dernière affectation, mais tout au long de sa carrière, dans ses fonctions de maire de Dalian, de gouverneur du Liaoning, de ministre du commerce et de secrétaire général de la municipalité de Chongqing.

Accusé d’avoir gravement endommagé la réputation du Parti, de la Nation et du peuple chinois, sa responsabilité directe est aussi engagée dans l’incident du chef de la police de Chongqing, Wang Lijun, brièvement réfugié au consulat américain de Chengdu en février 2012 et dans le meurtre crapuleux de Neil Heywood ainsi que « dans d’autres crimes », ajoute la dépêche, sans préciser lesquels.

Mais beaucoup comprennent que l’allusion renvoie aux accusations de crime contre l’humanité, suite aux tortures et prélèvements d’organes sur des prisonniers encore vivants du Falun Gong, perpétrés sous la responsabilité de Bo Xilai quand il était en poste dans le Nord-est de la Chine.

Suit une longue mise en garde, assortie des appels traditionnels à tirer les leçons de la crise, qui réaffirme la détermination de l’appareil, fermement résolu à lutter contre le fléau de la corruption et à mettre à bas sans faiblir ceux qui s’exonèrent de la discipline et des règles de « bonne gouvernance, selon les préceptes du droit », pour construire une administration « propre, purifiée, capable d’innovation et d’une vision correcte du monde et du pouvoir ».


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

Le révisionnisme sino-russe sur les traces de la révolution mondiale maoïste. Au Moyen-Orient, les risques avérés d’une escalade mortelle

A Hong-Kong, l’inflexible priorité à la sécurité nationale a remplacé la souplesse des « Deux systèmes. »

14e ANP : Une page se tourne

La stratégie chinoise de « sécurité globale » face aux réalités de la guerre

Que sera le « Dragon » ?