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Chine-Taiwan. Le poids de l’histoire, des non-dits et des ingérences extérieures

Nouveaux contentieux

Ces poisons sont encore aujourd’hui à l’oeuvre quand les élites japonaises se réclament de l’histoire pour glorifier leur héritage dans l’Ile, que les Taiwanais ne contestent pas. Dans cette même ligne, qui fait de Taiwan une pièce maîtresse des intérêts nippons, elles évoquent aujourd’hui les réalités stratégiques plaçant Taiwan dans l’exact prolongement de l’archipel, à proximité de ses lignes de communication maritimes les plus sensibles, pour aller toujours plus dans le sens des préoccupations de sécurité de Washington. En incluant implicitement Taiwan dans la « zone d’intérêt stratégique direct du Japon » en 1997, puis en acceptant en 2005 de reconnaître formellement que les forces de défense japonaises appuieraient les Etats-Unis en cas de conflit dans le Détroit, Tokyo a installé dans l’esprit des dirigeants chinois un ferment de doute qui n’est pas près de s’effacer. Et ce ne sont pas les multiples mouvements de l’US Navy vers le Japon aux limites des eaux chinoises et ses exercices répétés avec la marine japonaise au large de Taiwan ou à proximité des Diao Yu Tai qui contribueront à apaiser les craintes chinoises.

Les plaies sont donc encore bien ouvertes. Elles sont aussi entrenues par cette nouvelle tendance des élites taiwanaises et japonaises à faire état d’une solidarité de fait entre « pays démocratiques ». Les visites de dirigeants taiwanais au Japon ne peuvent que les raviver. Surtout quand elles donnent lieu à des prises de position qui versent de l’huile sur le feu. Lors de son passage à Tokyo, Frank Hsieh, s’exprimant indifféremment en japonais et en chinois, rappelait à la presse étrangère que « la situation de l’Ile, où les questions politiques prennent le pas sur l’économie, était bien différente de celle de Hong-Kong ». Ajoutant que « la souveraineté de Taiwan, garant des libertés du peuple taiwanais, occultait toutes les autres questions ».

Passions nationalistes et fantômes de l’histoire

Décidément la route vers la solution de la question taiwanaise, qui renvoie à de plus vastes implications stratégiques, est longue. L’apaisement ne pourra surgir qu’au prix de concessions de toutes les parties concernées. Celles-ci seront d’autant plus difficiles qu’à bien des égards le sujet touche à l’image très passionnelle que les uns et les autres se font d’eux-mêmes et du rôle que l’histoire leur a attribué. Le PCC y voit le garant suprême de sa légimitité politique et de l’unité du pays ; les Etats-Unis sont conscients que la question renvoie à la crédibilité de la « Pax Americana » en Asie du Nord-Est, mais redoutent un conflit. Entretenant une « ambiguïté » stratégique que les Chinois considèrent comme l’une des causes majeures du problème, ils vendent des armes à l’Ile, mais se retrouvent aux côtés de Pékin pour vilipender Chen Shui-Bian et ses intiatives de référendum ; les Japonais se replongent avec nostalgie dans leur histoire, en songeant à leur gloire passée et, forts de leur alliance stratégique avec Washington, utilisent la question comme un levier de pression à l’égard de Pékin. Quant aux Taiwanais, dont la majorité considèrent qu’ils font partie de la sphère culturelle chinoise, ils sont aussi de plus en plus nombreux à croire qu’ils devraient rester maîtres de leur destin.

Dans ce contexte, les prochaines élections présidentielles à Taiwan, dont les prémices baignent déjà dans une effervescence nationaliste, résultat des surenchères de politique intérieure en Chine et à Taiwan, constitueront au moins un test des capacités de compromis de chacun des acteurs de ce jeu à hauts risques. Si l’on examine les efforts actuels de Tokyo et de Pékin pour apaiser leurs relations, on peut considérer qu’au moins ces deux là sont sur la bonne voie. Chacun espère que le nouveau président taiwanais suivra ces exemples et que la Chine assouplira son jeu. Il ne restera plus aux Etats-Unis qu’à se mettre au diapason et à encourager ces bonnes volontés pour qu’enfin il soit possible d’entamer des négociations dans le Détroit, débarrassées des passions nationalistes et des fantômes de l’histoire.


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Par Anonyme Le 17/01/2008 à 21h54

> Chine-Taiwan. Le poids de l’histoire, des non-dits et des ingérences extérieures.

Excellent décryptage.

L’île de Taiwan est comme tirée par cinq ficelles, tenues par cinq protagonistes différents.

Trop d’ingérences extérieures nuisent à l’appaisement du conflit sino-taiwanais, qui n’a plus lieu d’être.

DM

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