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›› Chronique

Hong-Kong. Ambiguïté et contradictions des « deux systèmes. »

Note de contexte.

La démocratie n’a jamais été le souci n°1 de la règle britannique à Hong Kong. Ce n’est que dans les dernières années avant la rétrocession que le gouverneur Chris Patten, qui n’était pas un diplomatique et dont tout le monde loue le caractère extraverti et le double souci des hommes et de la connaissance exacte des situations, a, au grand dam de Pékin, modifié le système électoral pour donner au vote populaire plus d’impact dans la gestion du territoire.

Une machine économique et commerciale.

Au temps de la Couronne, le gouvernement de la colonie était assuré par une structure triple. Le législatif n’était pas élu, mais nommé par le Gouverneur, qui, en liaison avec Londres, désignait un appareil judiciaire, dont il faut souligner qu’il était plutôt indépendant, ce qui, après les années 70, fit l’efficacité du territoire et constitua la base de la confiance des affaires. Quant au Conseil Exécutif, il était, c’est le cas encore aujourd’hui, l’expression de la mouvance des patrons et actionnaires des sociétés industrielles et commerciales.

Il en résulte que le Territoire était administré et piloté comme un grand groupe où, de surcroît, à l’intérieur, ainsi que dans les relations avec l’extérieur, prévalait la culture chinoise de l’influence et des relations (guanxi) pouvant très facilement devenir des groupes de pression. Le pouvoir britannique était propriétaire du foncier, contrôlait le marché financier par les taxes et l’immobilier dont il fixait les prix. Cette situation perdure aujourd’hui. Elle n’est pas sans lien avec les déboires de la classe politique accusée de corruption.

Effet de l’irruption de l’opinion publique et de la nouvelle conscience politique du peuple, véhiculée par les moyens de communication et d’information modernes échappant à la censure et aux institutions, le nouvel environnement sociopolitique qui scrute la fortune et le comportement de l’oligarchie, est à l’origine des scandales qui frappèrent le rival de Leung, intronisé par Hu Jintao, le 1er juillet et éclaboussèrent récemment Leung lui-même, également accusé de corruption immobilière.

Sur le plan social, il est juste de dire que la fortune de Hong Kong, qui doit beaucoup à un droit des affaires rigoureux, s’est aussi construite grâce au travail intensif faiblement rémunéré des Hongkongais, descendant des immigrés chinois, d’abord accueillis à bras ouverts, puis repoussés dès que se fit sentir, dans les années 60, le besoin de monter en gamme qualitative. Pendant toute la période de la guerre froide, l’instrumentalisation de la peur du communisme contribua à justifier l’interdiction par Londres des syndicats et le contrôle de l’information.

Pékin et le défi de la démocratie.

Cet ordre efficace au profit des affaires et de l’oligarchie qui convenait assez bien à Pékin et avait été amendé à la marge après 1984, fut bousculé par Chris Patten, le dernier gouverneur de la colonie, qui s’appliqua à augmenter le poids du vote populaire dans la désignation du Conseil Législatif et du Gouverneur, en modifiant la carte électorale et en élargissant la définition des circonscriptions électorales.

L’initiative fut vertement critiquée par certains journaux chinois sur un ton qui rappelait les pires heures de la révolution culturelle et par la mouvance des affaires à Hong Kong qui y voyait une menace contre son influence.

A Hong Kong la popularité de Chris Patten grandit en même temps que les critiques de Pékin et de l’oligarchie se faisaient plus acerbes contre lui. Il n’est pas exagéré de dire que son initiative joua un rôle important dans le développement de la conscience démocratique à HongKong.

La prochaine élection du Conseil Législatif aura lieu en septembre 2012. Désormais 70 sièges seront à pourvoir (10 de plus que précédemment, depuis la réforme de 2010, acceptée par l’ANP), dont 35 seront élus dans les circonscriptions à découpage géographique au suffrage direct, et 35 autres dans des circonscriptions dites socioprofessionnelles, dont les tenants seront en majorité sélectionnés par des groupes d’intérêt proches de l’oligarchie.

Dans un contexte où le système électoral très complexe est fortement critiqué - certains juristes considérant même qu’il ne respecte pas la Convention des NU sur les droits civiques et politiques – tandis que d’autres mettent en garde contre l’érosion constante des libertés, y compris par une tendance grandissante à l’autocensure, l’alliance démocratique est fortement divisée entre les tenants du dialogue avec Pékin et ceux partisans d’une action plus radicale.

Face à cette paralysie de l’opposition, une nouvelle donne se fait jour : la rue a compris que, par ses protestations, elle est de plus en plus en mesure d’exercer une pression sur le pouvoir à Pékin, qui, pour des raisons d’image et d’efficacité politique, hésite à alourdir la répression. Celle-ci aurait comme premier effet psychologique et économique catastrophique de provoquer l’exode des résidents déjà titulaires de passeports étrangers, en majorité canadiens, dont le nombre dépasse le million.

Elle ruinerait pour longtemps les espoirs de Pékin d’une réunification avec Taïwan selon le schéma « un pays deux systèmes », même amendé. Enfin, à l’intérieur, elle enverrait un signal très négatif à la classe moyenne, aux intellectuels, avocats et journalistes, dont les attentes pour une « gouvernance » plus sophistiquée ne cessent de croître.


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