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›› Technologies - Energie

L’innovation avec caractéristiques chinoises

Acquérir de la propriété industrielle.

En 2007, la Chine, consciente des critiques visant ses contrefaçons, justifiait en interne la nécessité de protéger de la propriété intellectuelle par le besoin de se donner une bonne image internationale, destinée à encourager les investissements étrangers [7]. En juin 2008, le besoin demeure, mais la motivation change radicalement.

Dans un document intitulé « Stratégie Nationale pour la Propriété Intellectuelle », le Conseil des Affaires d’État énonce : « La propriété intellectuelle est une ressource stratégique et un élément clé de la compétitivité internationale... Les pays développés s’appuient sur l’innovation comme principal moteur de leur développement économique et exploitent pleinement le système de la propriété intellectuelle pour maintenir leurs avantages concurrentiels, (alors que) les pays en voie de développement adoptent des politiques et mesures adaptées à leurs conditions locales afin de promouvoir leur propre développement ».

La Stratégie ne porte donc plus tant sur la protection, que sur la nécessité de créer des droits de propriété industrielle, de déposer des brevets et des marques, et de s’en servir (comme l’on fait les puissances industriellement développées à l’égard des pays en voie de développement, et donc de la Chine).

Tout est mis en œuvre, au plan national, pour stimuler, subventionner, aider, les entreprises chinoises à acquérir de tels droits. Les statistiques sont là : une augmentation exponentielle de dépôts de brevets [8], que viennent récompenser primes, subventions et autres avantages. Parmi ces droits nouvellement créés, figurent les « modèles d’utilité », une forme de « sous-brevet d’invention », qui s’obtient rapidement, sans examen préalable de validité.

Certes, ce type de droit de propriété industrielle, qui figure dans la loi sur les brevets depuis la première version de 1983, existe également dans de très nombreux pays. Certains pays, même, délivrent des brevets d’invention sans examen préliminaire de validité [9]. L’existence de ces droits ne correspond donc pas, en soi, à une stratégie particulière. En revanche, l’utilisation qui en est faite par les entreprises chinoise devient rapidement une source de préoccupation majeure.

En effet, le mot d’ordre de « re-innovation », c’est-à-dire absorption et « amélioration » de la technologie importée, se traduit rapidement par une véritable inflation de dépôts de modèles d’utilité, dont une grande partie s’appuie sur lesdites technologies, parfois sans la moindre modification, et viennent générer une multitude de droits privatifs. Les récompenses accordées aux entreprises chinoises qui justifient d’un portefeuille de droits de PI ne font pas de distinctions dans la qualité intrinsèque des droits.

C’est le nombre plutôt que la qualité qui semble constituer le principal critère. Cette inflation, qui ne contribue sans doute pas à élever le niveau de l’innovation en Chine, constitue un danger considérable. L’affaire Schneider c/Chint en est l’exemple le plus spectaculaire (le leader mondial français s’était vu condamner à payer plus de 30 millions d’euros à Chint, son propre contrefacteur, qui avait déposé un modèle d’utilité correspondant à un détail technique antérieurement mis au point par Schneider).

L’exception des caractéristiques chinoise

 

La Chine est-elle vraiment différente du reste du monde, dans sa manière d’appréhender l’innovation ? la question mérite d’être posée.D’autres pays asiatiques ont puissamment stimulé la recherche et la création de droits de propriété industrielle (Japon, Taiwan, Corée). A vrai dire, le principe de l’aide financière à la recherche et au dépôt de brevets, est banal.

En revanche, nulle part ailleurs ne se trouve une législation conçue pour encadrer et soutenir une œuvre de « siphonnage » des technologies étrangères.

L’action de « tenaille », qui consiste d’une part, à placer sous haute surveillance l’activité inventive étrangère en Chine et, d’autre part, à conditionner l’accès aux marchés public à des critères d’innovation « indigènes », voire à l’obligation de transférer les technologies les plus sensibles, vers des joint-venture où le partenaire chinois est obligatoirement majoritaire, est une conception originale. La Chine fait miroiter son marché pour attirer les technologies étrangères. C’est « l’innovation avec caractéristiques chinoises ».

Note(s) :

[7Opinion de la Cour Suprême - 11 juin 2007 - sur la protection de la propriété industrielle

[8976.686 dépôts de brevets chinois en 2009 (+ 22,4 %) - 99.075 dépôts étrangers (- 0,9 %).

[9Belgique, Chypre, Grèce, France


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