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›› Chronique

L’Ombre de Brejnev plane à Pékin

Avec une croissance annuelle à 8% dans une conjoncture mondiale morose et le succès du premier vol spatial habité, la Chine marche à grand pas sur le chemin de la puissance aux yeux de nombre d’observateurs occidentaux. Eblouis par ses réussites incontestées dans les domaines de l’économie, des sciences et techniques, ces derniers ont tendance à oublier d’autres réalités aussi incontestables : disparités régionales, inégalités sociales, chômage en hausse, corruption généralisée, droits de l’homme bafoués. La liste n’est pas exhaustive. Face à ce paysage très contrasté qui serait qualifié ailleurs de fracture sociale, les dirigeants de Pékin, Hu Jintao en tête, semblent être empêtrés dans un dilemme quasi-insoluble : approfondir les réformes au risque d’ébranler le fondement des institutions, ou préférer l’immobilisme politique afin de préserver la stabilité du régime. Apparemment la deuxième solution est moins dangereuse à court terme et l’on assiste ainsi à l’entrée de la Chine dans une ère brejnévienne.

Comme l’ex-Union soviétique des années 1960-1980, la course à la puissance est devenue l’unique raison d’être d’un pouvoir sans légitimité démocratique. Les ressources sont consacrées en priorité à toute une série de grands projets, y compris militaires et spatiaux (augmentation de budget militaire à 17% en 2002, le lancement d’un projet d’alunissage pour 2010). Or ces programmes ambitieux sont autant de dévoreurs de capitaux aux retombées aléatoires. A l’échelle d’une décennie, leur coût pourrait se ressentir douloureusement dans l’économie du pays.

Cette course à la puissance économiquement coûteuse génère également des conséquences dans le mode de vie. Si les Etats-Unis sont présentés comme un rival à dépasser, ils deviennent de fait un modèle de société : les Chinois prennent désormais comme référence les conditions de vie des Américains. Au lieu de rejeter ce rêve américain, les dirigeants chinois renforcent malgré eux son pouvoir de séduction sur la population de leur pays. Après les vaisseaux spatiaux et les missiles intercontinentaux, les Chinois demanderont un jour le droit de critiquer leur gouvernement.

On voit aussi apparaître en Chine une classe privilégié formée d’apparatchiks communistes et confondue avec le milieu des affaires. Bien que l’on condamne ici et là quelques hauts fonctionnaires corrompus, la racine du mal, à savoir les liens naturellement incestueux entre le pouvoir politique (surtout au niveau des provinces) et les entreprises publiques ou semi-publiques), ne sont pas vraiment attaqués car ils sont à la base même du régime politique en place.

On peut objecter que cette comparaison, qui met sur le même plan la Chine d’aujourd’hui et l’Union soviétique d’hier, oublie l’ouverture du pays et l’absence de la gérontocratie. Mais l’ouverture d’un pays ne le met pas à l’abri des crises économiques et financières (le Japon et le Sud-est asiatique en font preuves). Le deuxième point est vrai pour le moment. Mais le Camarade Leonid Illitch était presque un jeunot (58 ans) lors de son accession au pouvoir en 1964. Souhaitons quant même longue vie au Camarade Hu Jintao mais qu’il prenne sa retraite en temps utile.


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