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La face cachée d’une inflation apparemment bénigne

L’hydre de l’inflation pointe-t-il de nouveau son nez en Chine ? A priori un taux de 5,3% sur l’indice de prix de consommation n’est pas un mauvais signe dans un contexte de croissance à 8%, voire au-delà. Ce chiffre stable en juillet et août pour 12 mois glissant, publié par le Bureau national de statistiques de Chine, pourrait même donner la preuve d’une croissance saine de l’économie du pays. Mais si l’esprit de confiance règne chez la plupart des économistes, les grondements de la rue ne sont pas sans fondement. Quand on examine la situation plus en détail, deux particularités sautent immédiatement aux yeux des observateurs : Premièrement, si le taux d’inflation reste modéré pour sa valeur absolue, l’allure d’accélération est rapide, parce qu’en janvier il n’était que de 2,4%. Deuxièmement, la hausse des prix se concentre dans trois secteurs essentiellement, à savoir les produits énergétiques, l’immobilier et les produits agroalimentaires.

Il est vrai que le prix élevé du brut sur le marché mondial joue un rôle non négligeable dans cette inflation importée. Le parc automobile continue à augmenter en nombre, ce qui entraîne l’accroissement de la demande. En 2004, l’importation de brut est estimé à 120 millions de tonnes, soit 35% de la consommation totale. Elle peut atteindre rapidement 40% car la production intérieure de l’or noir pourrait connaître de nouveaux fléchissements en raison de l’âge des gisements chinois. Il est à noter qu’en Chine, pour produire 1000 dollars US de PIB, la consommation d’énergie s’élève à 0,75 tonnes d’équivalent en pétrole, soit deux fois plus que dans d’autres pays asiatiques. Cette faible productivité accentue l’influence des prix pétroliers sur l’indice d’inflation. Si le prix mondial reste au-dessus de 40 dollars le baril, sa contribution à l’indice d’inflation sera entre 0,5 et 0,7%.

L’immobilier constitue un deuxième pôle d’inflation. Par rapport à la même période de l’an dernier, le prix moyen de l’immobilier d’habitation a augmenté de 11% pour les 8 premiers mois de 2004. La fièvre du bâtiment est essentiellement due à la faiblesse des taux bancaires. Elle est aussi à l’origine de la hausse de prix de l’acier, du ciment et d’autres matières premières de construction. Vraisemblablement, la régulation macroéconomique initiée par Wen Jiabao n’a pas encore produit pleinement les effets escomptés et la banque centrale doit faire face à un dilemme apparemment sans solution : de faibles augmentations de taux ne semblent pas freiner l’ardeur des investisseurs et une politique trop restrictive expose l’économie du pays aux risques d’un atterrissage brutal.

C’est dans le secteur de l’agroalimentaire que la hausse de prix paraît la plus spectaculaire. Entre janvier et août, le prix de gros du riz a fait un bond de plus de 40% et le blé de 35%. La hausse des huiles alimentaires est de 26% pour la même période tandis que la viande de porc a crû de 35%. Indubitablement, c’est dans ce domaine que la hausse des prix crée les pires effets dans l’opinion publique. Si l’on peut toujours différer un projet d’acquisition de logement et reprendre le vélo, au lieu de la mobylette ou de la voiture, comme moyen de transport, les achats alimentaires restent un poste de consommation incompressible. L’inflation dans le secteur alimentaire pénalise surtout la population à revenus modestes. Il ne faut pas oublier que plus de 500 millions de Chinois vivent avec moins de 2 dollars US de revenus par jour ! Sur les raisons probables de cette hausse, on peut incriminer la réduction de terres agricoles et l’exode de la population rurale vers les régions côtières. Quant à l’état des récoltes, très peu d’informations sont diffusées par la presse. La voix officielle prédit une bonne récolte pour l’automne mais cela ne s’est pas traduit dans les prix à terme des céréales.

La lutte contre cette inflation atypique risque ainsi de devenir, contre toute attente, le premier des chantiers prioritaires du gouvernement chinois. En cas de succès, le pouvoir de Hu et Wen sera durablement consolidé alors qu’un éventuel échec entamera significativement leur crédibilité.


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