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La longue marche chinoise vers la conscience écologique

Des francs tireurs isolés à la transparence publique.

Ma Jun directeur de l’ONG « Institut des affaires publiques et environnementales » photographié en 2012 devant un site industriel. Il tente une démarche consensuelle, à mi-chemin entre la dénonciation des pollueurs et la pédagogie publique. Pour lui les prises de conscience exprimées par le pouvoir sont de bon augure.

Tout comme elle tente de se libérer de l’obsession de croissance quantitative, voilà que la Chine a commencé à se battre contre les graves effets pervers écologiques de son développement rapide. En 2007, Pan Yue, 潘岳 alors le n°2 de l’agence pour la protection de l’environnement qui n’était pas encore un ministère, avait dressé un tableau apocalyptique des intenses pollutions dont souffrait la Chine. Mais il était un franc tireur isolé dont le discours iconoclaste n’avait pas été repris par le Parti et dont l’audace s’expliquait par le fait qu’il était le gendre de l’amiral Liu Huaqing 刘华清 ancien membre du Comité Permanent du Bureau Politique, grand modernisateur de la marine chinoise (Lire notre article Pan Yue et la catastrophe écologique chinoise. Un cri d’alarme à méditer).

En janvier 2014, évolution majeure, la prise de conscience était exprimée directement par un conseiller scientifique du gouvernement. Chen Xiwen agronome de formation, ancien chercheur à l’Académie des Sciences Sociales, n°2 du centre de recherche du Conseil des Affaires d’État, estimait que 3,3 millions d’hectares de terres agricoles (soit 2,5 % des terres arables), la plupart dans des régions céréalières, étaient gravement polluées par des métaux lourds, affectant annuellement 12 millions de tonnes de céréales. Ce qui incita le Comité Central lui-même à pointer du doigt l’urgence de restaurer la qualité des terres agricoles pour éviter une crise de la sécurité alimentaire du pays.

Progressivement, le sujet a débordé des réunions secrètes pour s’étaler sur la place publique, repris par les autorités elles-mêmes. Après la publication par l’Ambassade des États-Unis à Pékin des mauvais indices de la qualité de l’air en 2009, le pouvoir, mis sur la sellette, a multiplié les déclarations et les initiatives sur l’efficacité énergétique, les techniques de capture et de stockage du dioxyde de carbone et décidé de consacrer l’équivalent de 80 Mds d’€ à la lutte contre la pollution dans la capitale.

La nécessité de corriger d’urgence la mauvaise qualité de l’air dans la région de Pékin et dans le Hebei exposée dans les médias du monde entier, a été à l’origine d’un nouvel élan pour les énergies renouvelables. Selon Li Shuo, analyste politique à Greenpeace Asie, en 2013, la Chine a battu le record mondial d’installation de panneaux solaires avec une capacité installée de 12 GW qui représentait 12% des ajouts capacitaires de l’année.

En 2014 : une initiative inédite du Bureau Politique…

Simultanément le Bureau Politique accomplissait le tout premier effort de transparence jamais consenti par le régime, obligeant les 15 000 entreprises les plus polluantes, y compris les grands groupes publics à faire état de leurs émissions et décharges toxiques dans l‘atmosphère et les rivières. Compte tenu des habitudes de maquillage et des vastes collusions entre les administrations locales et les usines en cause - ces dernières participant parfois elles-mêmes au financement des systèmes de contrôle, ce qui réduit d’autant leur efficacité -, l’initiative marquait une évolution majeure de la manière dont le pouvoir aborderait désormais la question.

Même les ONG habituellement sceptiques des initiatives du pouvoir saluèrent l’initiative. En février 2014, Ma Jun, ancien journaliste d’investigation et directeur d’une ONG baptisée « Institut des affaires publiques et environnementales » s’est dit interloqué par la mesure qui tournait le dos aux habituels réflexes d’omerta de la bureaucratie. Seule l’urgence et l’ampleur de la catastrophe écologique expliquent que le pouvoir ait décidé de jeter en pâture à la société les chiffres exacts de la pollution des entreprises, comme il oblige depuis 2012 les villes chinoises à publier la quantité de particules nocives dans l’atmosphère.
Lire notre article Pollution : Une initiative sans précédent des pouvoirs publics.


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Par Homo Sinicus Le 9/03/2015 à 03h07

La longue marche chinoise vers la conscience écologique.

A noter que ces jours-ci les autorités chinoises viennent de faire supprimer le documentaire de Chai Jing d’internet, il est maintenant totalement introuvable sur les réseaux sociaux et les sites de diffusion vidéo (le nom du documentaire n’apparaît même plus dans les recherches effectuées sur Weibo). La vidéo avait pourtant été diffusée par le site 人民网, ce qui semblait de bonne augure et laissait en effet entendre que le Parti avait approuvé la démarche, mais le dégel autour des questions d’environnement ne semble pas complétement gagné...

Par Guy Baudoux Le 9/03/2015 à 07h44

La longue marche chinoise vers la conscience écologique.

Félicitations pour votre article !
Pourriez-vous le corriger, en y commentant le dernier développement de l’affaire « sous le dôme » : la censure complète (http://www.bbc.com/news/world-asia-31778115). Merci !

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