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›› Politique intérieure

La saga de Google

L’information juste comme contrepouvoir

Hu Shili qui, il y a quelques mois, avait quitté avec fracas le magazine financier Caijing, pour protester contre les pressions de la censure, est une des têtes de liste de ce mouvement (cf. l’article de questionchine, publié le 23 octobre 2009, toujours en ligne dans la rubrique « Chronique »).

Il y en a d’autres qui eux aussi entretiennent, envers et contre tout, une mouvance qui place l’éthique professionnelle et la rigueur des informations au centre de leurs préoccupations. Ceux-là constatent avec regret, qu’après une période faste d’une bonne dizaine d’années, la censure se durcit à nouveau. « Les Chinois de la classe moyenne » disent-ils, « considèrent les médias comme le contrepouvoir le plus efficace ». Mais ils ajoutent : « depuis trois ou quatre ans, on resserre la vis et la proportion des articles censurés, qui n’était que de 30% il y a trois ou quatre ans, est aujourd’hui de 50% ».

La dénonciation publique des abus....

Ce sont eux qui, ces dernières années, ont mis à jour les affaires du sang contaminé dans le Henan, des adolescents réduits en esclavage dans les briqueteries illégales du Shanxi, des écoles construites en ciment frelaté et trop vite effondrées du Sichuan, ou des prisons illégales de Pékin. Avant d’être dévoilées dans la presse internationale, ces enquêtes iconoclastes qui mettent souvent directement en cause les cadres locaux, sont d’abord publiées dans quelques journaux de province ou spécialisés, dont l’audience ne cesse de croître.

Il est vrai que, la plupart du temps, les informations sensibles qu’elles dévoilent ne mettent en cause que des cadres locaux et épargnent la haute direction du régime. Souvent, la dénonciation des abus locaux viennent en appui des politiques d’assainissement développées par le pouvoir depuis Zhu Rongji, premier ministre de l’ère Jiang Zemin, au style direct et pragmatique, pourfendeur des corruptions et des comportements cyniques des petites bureaucraties locales, alliées à la pègre et relais d’hommes d’affaires sans scrupules. Beaucoup expliquent ainsi le fait que les nouveaux journalistes d’investigation, de plus en plus populaires, aient pu, jusqu’à présent, bénéficier d’une plus grande marge de manœuvre.

...et des maquillages...

Il n’en reste pas moins que la liberté de ton et la nature des articles, souvent écrits en dépit des menaces de sanction, prennent à contrepied les vieilles habitudes de maquillage. L’arrivée d’internet, au fonctionnement plus rapide et plus souple, et la multiplication des usagers individuels capables, à force d’ingéniosité, d’échapper, au moins pendant un temps, aux contrôles, contribue à diffuser cet état d’esprit nouveau, que le département de la propagande tente de combattre.

Surtout, l’anonymat, même éphémère, qu’il autorise, la rapidité avec laquelle il peut mobiliser des dizaines de milliers de critiques, parfois les plus virulentes, à travers toute la Chine, sont perçues comme des menaces graves, non plus seulement par les cadres locaux, mais également par les plus hautes strates de la bureaucratie. Ce qui explique que le régime se cabre au plus haut niveau.

....relayée par les médias internationaux

Il va sans dire que le sujet, dont on dit qu’il met le doigt sur une des plus grandes vulnérabilités du régime chinois dans cette phase d’ouverture au monde, passionne les médias occidentaux. Ces derniers, subjugués par l’incroyable puissance du bond en avant technologique, économique et social qui projette la Chine sans transition dans la modernité, expriment aussi leur perplexité devant les raidissements du régime.

Pour autant, aujourd’hui, conforté par les doutes et les échecs de l’Occident, le Parti ose en effet, sans trop de complexes, affirmer ses valeurs d’harmonie par le contrôle strict de la société, privilégiant la préservation de l’ordre social, en même temps que son pouvoir, au prix d’un encadrement sans concessions de l’expression individuelle, quand celle-ci est jugée trop hérétique.

Il reste à savoir si, du côté chinois, la position arc-boutée tiendra longtemps face à ceux qui analysent ces raidissements de la censure comme une régression politique ; et si, à l’inverse, chez Google, l’attrait du « grand marché », n’incitera pas, in fine, à quelques compromis.


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