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La tentation de Moscou

L’exercice conjoint sino-russe « Amitié-2005 », le premier du genre dans l’histoire des deux pays, se déroulera en août au large de la Mer Jaune. Comportera-t-il une valeur symbolique pour l’orientation de la diplomatie chinoise ? Si la presse occidentale reste silencieuse sur cet événement, celle de Pékin ne tarit pas d’éloges sur la qualité des équipements russes participant à la manœuvre, notamment des bombardiers Tu-22M3, Tu-95MS et Tu-160, soulignant le caractère “stratégique” de l’exercice. Au moment où la Chine subit de sérieuses pressions, d’ordre commercial et monétaire en provenance de l’Europe et des Etats-Unis, la Russie s’impose, du moins dans l’opinion chinoise, comme un partenaire fiable, voire un allié implicite dans le dessein de l’ « émergence pacifique » du pays sur la scène internationale. Cependant, le retour en force de Moscou dans la diplomatie chinoise n’est pas une simple réplique de l’idylle sino-soviétique des années cinquantes. Les relations sino-russes d’aujourd’hui reposent sur trois piliers, les ventes d’armes et de pétrole russe à la Chine, la coopération sur le terrain de la sécurité régionale et la résistance à l’unilatéralisme américain. Mais ceux-ci ne présentent qu’une solidité apparente.

C’est à la suite de l’embargo occidental instauré en 1989, au lendemain de la tragédie de Tian’anmen, que la Russie est devenue le premier fournisseur d’armes des Chinois. Or jusqu’à cette époque, la Chine se trouvait dans le camp anti-soviétique et bénéficiait d’apports considérables d’équipements militaires occidentaux. Il est probable que la vraie raison de cet embargo tenait plus au rapprochement sino-soviétique (avec la visite officielle de Gorbatchev à Pékin en mai 1989) qu’à la répression sanglante des mouvements d’étudiants. La volte-face de Deng Xiaoping dans sa politique extérieure devait par ailleurs créer un effet de surprise chez la plupart des observateurs. Si depuis lors les Chinois se sont résignés à acheter de l’armement russe, ils n’ont pas cessé leurs efforts en vue de diversifier les fournisseurs. L’insistance avec laquelle la Chine a appelé les Européens à lever ledit embargo en est une parfaite illustration.

En ce qui concerne les fournitures énergétiques, la Russie est loin de tenir la même position de quasi-monopole. Par ailleurs, les hésitations de Moscou à construire le pipe-line transsibérien en direction de Chine sont devenues un sujet régulier de discorde entre les deux pays.

C’est sans doute sur le terrain de la sécurité régionale que les deux pays ont le plus d’intérêts convergents. Sur le problème nucléaire nord-coréen, Pékin et Moscou sont parvenus à établir un consensus : dénucléariser la péninsule sans provoquer, du moins à court terme, la chute du régime de Kim Jong-il, avec l’arrière-pensée d’empêcher l’entrée des Américains au-delà du 38e parallèle qui sépare aujourd’hui les deux Corée. La prévention d’une extension de l’influence américaine s’applique également à l’Asie centrale, où la Chine et la Russie s’attachent à renforcer leur présence dans les pays concernés, notamment à travers l’Organisation des coopération de Shanghai (OCS) dans laquelle Pékin et Moscou jouent conjointement le rôle de moteur.

La vraie question qui mérite d’être posée est la suivante : la Russie est-elle une véritable alliée de la Chine à long terme ou simplement une carte à abattre dans les dialogues sino-occidentaux en général et sino-américains en particulier ? Les revirement successifs, pour ne pas dire cycliques, de la diplomatie chinoise durant le demi siècle passé trancherait plutôt en faveur de la seconde hypothèse. L’idée d’une alliance politique et militaire est d’autant plus invraisemblable que l’essentiel du commerce extérieur de la Chine est aujourd’hui orienté à l’Ouest.


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