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›› Editorial

Le Renminbi accède au cercle fermé des monnaies de référence du FMI

La longue marche vers la reconnaissance internationale.

Satisfait de la décision du FMI d’inclure le RMB dans le cercle fermé des monnaies de référence pour le calcul des DTS, Yi Gang, vice-gouverneur de la Banque Centrale, a balayé les craintes d’une possible chute de la monnaie chinoise et confirmé qu’il interviendrait en cas de trop fortes fluctuations ou de mouvements anormaux de capitaux.

La longue marche de la devise chinoise vers le statut de monnaie de référence au sommet de la gouvernance financière mondiale a commencé en juillet 2005 quand, pour la première fois de son histoire, la Chine a décidé de laisser prudemment flotter sa monnaie à l’intérieur d’étroites limites, officiellement, non plus par rapport à la seule référence dollar, mais par rapport à un panier de monnaies dont la composition et le poids relatif des devises furent modifiés au cours du temps, avec par exemple une importance variable accordée à l’Euro ou même au Won coréen.

Mais, l’examen des statistiques depuis cette date montre que le Dollar est resté la référence majeure, contre laquelle la monnaie chinoise n’a cessé de s’apprécier, strictement pilotée chaque jour par la Banque Centrale à l’intérieur d’une marge de plus ou moins 0,3% [3]. A l’été 2008, le Dollar était redevenu la principale monnaie de référence du RMB. Par la suite, le système bancaire chinois, strictement contrôlé par l’État a consenti d’importants efforts pour diminuer les risques, installer des mesures prudentielles et éliminer les dettes toxiques.

A partir de 2006, l’ouverture s’est poursuivie par la présence de banques ou d’investisseurs étrangers au sein des 4 banques d’État et d’une vingtaine d’autres institutions financières, avec, cependant, un plafond limité à 25% du capital.

Simultanément une loi sur les sociétés et deux autres sur les opérations boursières effectives entre 2004 et 2006 fournirent un cadre légal au marché des capitaux dont le fonctionnement était soumis à des lois et règlements parfois illisibles et contradictoires. L’arsenal légal fut complété en 2007 et 2009 par une loi sur les faillites et une autre sur l’assurance des dépôts, dont la mise en place effective eut lieu en mai dernier (remboursement à hauteur de 500 000 RMB - 74 000 € -) dégageant en théorie la puissance publique de l’obligation de renflouer une banque en faillite, rapprochant ainsi le système financier chinois des lois du marché.

Depuis le 18e Congrès, le Parti accélère la promotion du Yuan à l’étranger.

Mais l’accélération la plus notable des réformes financières eut lieu à partir de 2012, grâce à Zhou Xiaochuan gouverneur inamovible de la Banque Centrale depuis 2002. C’est en effet depuis 2013 que se sont multipliés les accords bilatéraux (29 depuis 2012) pour l’utilisation de la monnaie chinoise dans les transactions commerciales. C’est également en 2014 qu’eut lieu la mise en connexion directe des bourses de Shanghai et Hong Kong.

L’arrangement permet désormais aux investisseurs chinois d’acheter directement des titres à Hong Kong et offrait pour la première fois aux étrangers un accès au marché boursier de Shanghai dont le potentiel est estimé à près de 4000 Mds de $.

L’accord créait potentiellement la 3e bourse mondiale après le NYSE et le Nasdaq et avant les places de Londres et Tokyo, avec une capitalisation de 5600 Mds de $ et un volume potentiel de transactions quotidiennes dans les deux sens de 3,5 Mds de $, avec cependant toujours des limites journalières et des plafonnements pour chaque investisseur traduisant la crainte rémanente d’un dérapage échappant au contrôle politique. Ces restrictions diminuèrent la portée de l’ouverture et jetèrent un doute sur la volonté réelle de la Chine d’ouvrir son compte de capital.

Une manœuvre de dernière minute.

Au printemps 2015, Pékin accéléra sa campagne pour convaincre le FMI que les nombreux accords autorisant l’usage du RMB pour les transactions commerciales internationales étaient une preuve suffisante que la monnaie chinoise était librement convertible. Washington resta sceptique. Le temps était compté puisque la prochaine échéance d’une possible modification du panier des monnaies de référence ne se représenterait qu’en 2020, tandis que le FMI pressait la Chine de réduire les contrôles exercés sur le taux de change. A l’été, Pékin prit plusieurs mesures dont le premier but était de répondre à ces injonctions.

En dévaluant de 4,4% par rapport au Dollar – la plus forte baisse en 20 ans -, la Banque Centrale adopta une nouvelle méthode pour fixer la valeur quotidienne de sa monnaie. Désormais la variabilité du taux de change n’est plus calculée autour d’un point fixe immuable, mais déterminée à partir du cours du Yuan à la clôture de la veille, ce qui rapproche en effet le taux de change du marché.

A venir : Consolider la stature internationale du Yuan…

Alors que la Banque Centrale a atteint l’objectif de faire figurer le Yuan au cœur de la direction des finances mondiales, la question est de savoir si Pékin a l’intention de pousser son avantage pour tenter de hisser sa monnaie au niveau d’une réserve globale à parité avec le Dollar.

A côté des avantages (entre autres : primauté et ubiquité universelle de la monnaie, utilisable à l’extérieur comme à l’intérieur pour financer ses propres déficits à des taux avantageux, facilités commerciales et bancaires, prestige international, indépendance par rapport au Dollar), la direction chinoise en connaît aussi les inconvénients et les risques.

La difficulté la plus compliquée à gérer pour le régime résiderait dans la difficulté à contrôler les flux de capitaux d’une monnaie devenue complètement soumise au marché, avec les risques qui ne seraient pas sans conséquences politiques, d’une surévaluation et d’un creusement du déficit commercial ou, au contraire, les dangers d’un effritement de la valeur du Yuan tiré vers le bas par les incertitudes de la transition avec en collatéral, une aggravation de la fuite des capitaux.

A terme, la décision du FMI encouragera les banques centrales à détenir plus de réserves en monnaie chinoise et contribuera à augmenter l’utilisation du Yuan dans les transactions commerciales. Elle pourrait aussi pousser les autorités chinoises à ouvrir plus avant le marché des capitaux en Chine et à réaliser l’objectif que le Parti s’est lui-même fixé, de parvenir en 2020, à un marché du Yuan complètement libre dont le taux serait fixé sans entraves par le marché.

L’examen des décisions récentes prises par l’appareil ne permet pas de dire si cette profession de foi publique correspondait à une volonté réelle ou à un simple élément de langage à l’égard du FMI. Pour l’heure en tous cas, le Parti surveille le taux de change du RMB et les flux financiers comme l’huile sur le feu.

…Sans relâcher les contrôles à l’intérieur.

Réagissant le 1er décembre à la déclaration de Christine Lagarde, Yi Gang le n°2 de la Banque Centrale se félicitait que le FMI ait reconnu les efforts de la Chine, ajoutant que la politique de change du Yuan ne serait pas modifiée, mais que la réforme du système financier chinois serait poursuivie.

Rejetant les craintes de nombreux observateurs qui s’attendent à une baisse du Yuan, tiré vers le bas par le ralentissement de l’économie influant plus directement que la nouvelle méthode de calcul du change, il a cependant précisé que si des fluctuations trop importantes ou des mouvements anormaux de capitaux se produisaient, la Banque Centrale n’hésiterait pas à intervenir. Compte tenu des incertitudes liées à un relâchement des contrôles alors que le pays est engagé dans une vaste restructuration de son économie, on ne peut pas la blâmer.

A lire aussi :
- L’élan global de la monnaie chinoise, craintes américaines et perspectives
- Basculement du schéma de croissance de la Chine et craintes politiques

Note(s) :

[3Le 22 juillet 2005, la parité Dollar / RMB était de 8,22. A la rédaction de cette note, elle était de 6,39. Soit une réévaluation de 22,2% en dix ans.


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