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Les BRICS à Xiamen. Contraste entre les discours et la réalité

Il y a loin de la coupe aux lèvres.

Sur la portée réelle du sommet, même si Pepe Escobar considère dans Asia Times que l’alliance entre Moscou et Pékin, actuels moteurs de la contestation de l’ordre ancien et de Washington au sein des BRICS porte un projet alternatif global, la réalité oblige à dire qu’il y a loin de la coupe aux lèvres, tandis que la rumeur dit que le volontarisme chinois irait jusqu’à envisager de renouveler l’erreur européenne confondant élargissement et puissance.

Selon la presse russe, Wang YI, le Ministre des Affaires étrangères chinois proposerait d’ouvrir le groupe à une liste non arrêtée de pays allant du Pakistan à l’Indonésie, en passant par le Bangladesh, l’Iran, le Nigeria, la Corée du sud, l’Egypte, le Mexique, la Turquie, le Tadjikistan, la Guinée et la Thaïlande. Parmi ces candidats potentiels étaient présents à la session de Xiamen, le présidents Sissi d’Egypte et Alpha Conde de Guinée président en exercice de l’OUA, le Thaïlandais Prayut, le Mexicain Pena Nieto et le président Tadjik Emomali Rahmon.

Concrètement, des critiques montent à propos de l’efficacité de la banque des BRICS et de ses procédures de financement. Même Pékin qui avait engagé 41 Mds de $ lors de la création de la banque s’essouffle puisqu’à Xiamen la Chine n’a mis sur la table que 500 millions de Yuan soit 76 millions de $ à comparer avec les 46 Mds engagés au Pakistan en 2015, un projet que New-Delhi en froid avec Islamabad observe d’ailleurs avec un intérêt mêlé d’inquiétude.

Lire Le Pakistan, premier souci stratégique de Pékin. Les faces cachées de l’alliance.

Prévalence des intérêts nationaux.

S’il fallait une preuve que l’alchimie espérée par Moscou, initiateur du projet en 2009 n’a pas encore complètement produit ses effets de cohésion, il suffirait d’examiner la teneur de l’échange entre Modi et Xi Jinping et celle de la conférence de presse de Vladimir Poutine. Dans les deux cas l’essentiel aura porté non pas sur la dynamique du groupe et ses projets, mais sur les tensions bilatérales entre Pékin et New-Delhi et, dans le cas du président russe, sur la rivalité avec Washington, la question nord-coréenne et les problèmes internes russes.

Entre Narendra Modi et Xi Jinping, il n’a été question que de mesures de confiance pour « replacer la relation sur la bonne voie » et éviter que ne se reproduisent les tensions himalayennes.

Quant à la conférence de presse de Poutine donnée à un public en grande partie russophone, elle a fait ressurgir la méfiance à l’égard de la nouvelle administration américaine, la préoccupation nord-coréenne et les controverses internes russes, liées aux élections présidentielles ou à la question des droits. Sur une heure de conférence, moins d’un tiers a été consacré à la coopération au sein des BRICS, avec la seule mention concrète des projets chinois de voie ferrée rapide (200 km/h) par la Sibérie, de la Chine vers l’Europe.

En revanche, le président russe a amplement et vertement commenté ses méfiances à l’égard de la Maison Blanche et les tensions à propos de la réduction du nombre de diplomates russes aux États-Unis « une attitude vulgaire ». Sur la nouvelle administration américaine, son appréciation fut sans appel « Un tel nombre de personnes avec un niveau politique si bas est impressionnant » a t-il asséné.

A propos de la Corée du Nord, mettant en garde contre les risques d’une « catastrophe planétaire », Poutine a confimé son alignement sur les positions chinoises, rappelant que la mémoire des événements d’Irak où Sadam Hussein et toute sa famille furent tués, ne pouvait qu’inciter Pyongyang à ne pas abandonner ses projets nucléaires.

Oubliant que jusqu’à présent les sanctions n’avaient été mises en œuvre que partiellement, Poutine répète comme Pékin qu’elles sont inefficaces et que seul le dialogue pourrait apporter une solution à la menace nucléaire nord-coréenne.

*

Au total il est vrai que les 5 pays (43% de la population mondiale et 25% de la puissance économique globale) réussirent à protéger leur croissance durant la récession des pays développés ; il est également exact qu’ils recèlent un vaste potentiel de développement appuyé par un immense marché de consommation et d’aménagement du territoire, point d’application de la capacité financière de la banque des BRICS.

Il reste que la disparité de leur puissance, de leurs systèmes politiques, de leur culture et de leur histoire freine leur cohésion. Même l’anti-américanisme évoqué par le SCMP en octobre 2016 ne constitue pas un ciment fiable.

S’il est vrai que Moscou et Pékin se retrouvent sur cette ligne, il n’en va pas de même pour les trois autres. New-Delhi, surtout qui craint la puissance enveloppante de la Chine dont le PIB de 11 000 Mds de $ est deux fois supérieur à la somme des quatre autres [1], soupçonne Pékin d’utiliser le groupe pour ses intérêts propres et affirmer la prévalence globales de sa monnaie contre le Dollar.

La profonde méfiance ancrée dans l’histoire entre Pékin et New-Delhi a encore percé la surface policée des mises en scène diplomatiques quand, le 6 septembre, au lendemain même du sommet de Xiamen, le chef des armées indiennes, le général Bipin Rawat, déclara que l’Inde devait se préparer à une guerre sur deux fronts à la fois contre le Pakistan et la Chine.

Choquée, la Chine a répliqué le 8 septembre par le porte parole du Waijiaobu en recommandant à New-Delhi de se conformer à la marche positive de l’histoire et de cesser dévoquer un affrontement armé.

Note(s) :

[1Avec un fort retard pour l’Afrique du sud dont le PIB est à moins de 300 Mds de $ alors que ceux du Brésil, de la Russie et de l’Inde sont compris entre 1800 Mds et 2200 Mds de $)


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