›› Taiwan
Les perspectives du Président.
Voilà donc le KMT et Ma Ying-jeou investis d’un nouveau mandat autorisant la poursuite de la politique de rapprochement économique et commercial avec la Chine, dont les 2 millions d’entrepreneurs taïwanais résidant en Chine sont les plus ardents défenseurs. Mais le retour en force du DPP au Yuan Législatif souligne que les craintes de l’électorat vis-à-vis de Pékin subsistent. Une réalité qui complique la tâche de la présidence.
Les premières difficultés viendront avec l’approfondissement de l’Accord Cadre, pierre angulaire du rapprochement. Les réticences ne seront d’ailleurs pas uniquement taïwanaises. Sur la « Grande Terre », les grands groupes d’état ont déjà manifesté leur grogne après les réductions de taxes accordées aux importations taïwanaises, tandis que les banques et institutions financières chinoises ne souhaitent pas la concurrence de celles de l’Ile. Enfin, à Taipei on est agacé par les réticences chinoises à garantir la protection des investissements des groupes taïwanais et la sécurité des ressortissants de l’Ile travaillant en Chine.
Reste l’inconnue politique, sujet sensible entre tous à Taïwan, où la majorité de la population craint l’alourdissement de la main de Pékin qui - disent la plupart des observateurs - réclamera tôt ou tard l’ouverture des négociations pour la réunification. Le sujet est d’autant plus sensible que le rapprochement économique augmente la dépendance à l’égard de la Chine et que le processus s’apparenterait à une lente « finlandisation ».
La proximité économique croissante des deux rives, point clé des craintes et controverses, est d’ailleurs l’objet d’une polémique entre l’administration de Ma Ying Jeou et l’opposition. Quand Tapei explique que la dépendance de l’Ile aux exportations vers la Chine aurait baissé, passant de 43,3% en 2010 à 40,7% en 2011, le DPP rappelle que les investissements taïwanais en Chine ont, l’année dernière, fait un bond de 60%.
Les deux chiffres sont exacts – la part des exportations vers la Chine peut baisser, tandis que les engagements financiers des hommes d’affaires augmentent avec le rapprochement -. Le fait est qu’on ne peut nier le resserrement des liens économiques et la plus grande imbrication. Selon les statistiques chinoises, le commerce dans le Détroit a fait un bond de 36% en 2010, tandis que Xinhua signale qu’en 2011 les Taïwanais ont investi 12 Mds de $ dans 520 projets. Cette réalité est la bête noire des indépendantistes qui exigent une stratégie moins univoque.
Le Président a bien compris l’exigence d’alléger la contrainte chinoise, puisque le 28 décembre dernier il déclarait que le « rapprochement avec la Chine inciterait d’autres pays à signer des accords commerciaux avec Taïwan, ce qui réduira la dépendance de l’Ile à la Grande Terre ».
« Nous avons une image apaisante qui contraste avec celle de perturbateur des années 2000 - 2008 ». Après la signature de l’Accord Cadre, Taipei a ainsi conclu un accord d’investissement avec le Japon – son 2e partenaire commercial – et en négocie actuellement d’autres avec Singapour, la Nouvelle Zélande, l’Inde et l’Indonésie. Il est probable que ces initiatives visant à desserrer l’étau économique chinois ne soient pas du goût des plus radicaux à Pékin.