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Point sur les réformes récentes. Essai d’analyse de la méthode

La réforme budgétaire et l’éradication des dettes locales.

Lou Jiwei ministre des finances lors du China Development Forum à la mi-mars. Sa politique dirigiste vise à mettre un terme aux emprunts incontrôlées des administrations locales : « le gouvernement ne viendra plus au secours des emprunteurs en difficulté. Les administrations locales devront régler elles-mêmes leurs problèmes ». Photo / Xinhua

Concoctée en juin 2014 par le groupe dirigeant sur l’approfondissement des réformes présidé par Xi Jinping, la réforme des budgets des administrations locales été mise en œuvre en 3 temps dès le mois de juillet par Lou Jiwei, le ministre des finances : 1) Instauration de l’obligation de transparence et du contrôle des budgets par l’ANP ; 2) Obligation de distinguer clairement les sociétés fiduciaires des administrations ou de les fermer ; 3) Obligation de procéder à l’inventaire détaillées des dettes locales.

Le relevé des dettes effectué par un audit national en 2013 - qui avait identifié 7170 sociétés fiduciaires et comptabilisé 30 000 Mds de RMB de créances locales (4500 Mds d’€) - devait servir de base au nouvel inventaire à réaliser avant la fin décembre 2014, après quoi il devait être clos. Assorti à ces mises en demeure venaient une série de directives concernant la catégorisation des projets lancés à l’avenir par les administrations locales.

La répartition en trois groupes des projets de développement, principaux générateurs des créances jusque là accumulées sans contrôle, visait à stopper l’hémorragie : a) les projets ne générant pas de revenus ont été mis à la charge des budgets des administrations locales ; leur financement devra se faire non plus par des emprunts bancaires mais par des obligations garanties autorisées par le pouvoir central ; b) les projets générant des bénéfices devront être transformés en entreprises dont les revenus rembourseront les dettes contractées ; c) les projets intermédiaires générant des bénéfices, mais en volume insuffisant pour honorer les dettes seront structurés en entreprises mixtes publiques-privées recevant chaque année une aide financière de l’État.

Dans ce contexte, les emprunts contractés pour des projets déjà approuvés avant les nouvelles mesures continueront à être honorés, après quoi plus aucun prêt bancaire ne sera autorisé, tous les projets locaux devant être financés par l’émission d’obligations. A la fin 2015, le financement par des sociétés fiduciaires devra avoir pris fin. Par ailleurs, l’évaluation de la valeur des projets et de leurs besoins de financement ne sera pas laissée aux soins des fonctionnaires locaux, mais déterminée par le marché et contrôlée par l’État.

Pour autant, la brutalité des changements qui tranchaient avec le laxisme précédent a, sans surprise, généré de vastes réticences qui, à elles seules, dessinent la difficulté des réformes. La province de Hainan fut en effet la seule à rendre publiques ses dettes en février 2015. Encore faut-il préciser que l’inventaire des créances fut approuvé non pas parce qu’il était exact, mais parce qu’il ne révélait aucun dysfonctionnement ou abus : la somme totale des dettes de l’île était raisonnable comparée au PNB de la province et leur croissance était acceptable. Dans son entreprise d’assainissement Lou Jiwei devra tenir compte de ces blocages et de la tendance normale des pouvoirs locaux à tirer le plus possible vers le haut le plafond de leurs créances à restructurer.

Réforme de la propriété foncière.

Le foncier rural est soumis à la pression de l’urbanisation qui transforme les terres agricoles en terrains immobiliers.

La question de la propriété en Chine n’est pas seulement complexe parce que la notion de jouissance individuelle d’un bien foncier privé est opposée à l’idéologie fondatrice de la République Populaire ; elle l’est aussi parce qu’il existe deux régimes séparés l’un pour les zones rurales et l’autre pour les villes ; elle l’est enfin parce que le pays est aujourd’hui engagé dans un vaste mouvement d’urbanisation qui transforme les terres agricoles en parcelles urbaines constructibles faisant passer les terres d’un régime de propriété à l’autre. Les intérêts particuliers ou collectifs imbriqués dans ces problématiques expliquent la lenteur de la résolution des questions foncières.

En novembre 2014, il y eut cependant une avancée majeure. Le Parti et le gouvernement ont en effet défini dans un document officiel les trois niveaux de propriété des terres agricoles : 1) l’ancien système de propriété collective des communes ; 2) les contrats d’exploitation non transférables attribués aux fermiers qui renvoient à la réforme initiée par Deng au début des années 80 ; 3) les droits gestion transférables. Ces derniers inaugurés récemment ouvrent en théorie le droit de louer la terre, de l’hypothéquer ou de l’incorporer dans un apport immobilier pour une création d’entreprise. Le cadastrage du foncier selon ces trois critères est en cours et devrait être achevé en 2020.

Le système des droits de gestion transférables constitue une nouveauté de taille qui, plus encore que les contrats d’exploitation de Deng Xiaoping, heurte de plein fouet le dogme de la propriété collective au point que la promulgation de la loi a été entourée d’une grande discrétion.

S’il est vrai que les réformateurs voient dans la mesure une manière de relever le niveau de vie des fermiers et de freiner l’exode rural, les « conservateurs gauchistes » qui la considèrent comme une entorse grave au dogme socialiste, y sont violemment opposés. Leur principale crainte, d’ailleurs justifiée, est que la terre finisse pas échapper aux fermiers dépouillés de toute sécurité au profit des grandes concentrations de capital. Déjà nombre de fermiers ont abandonné la terre et dans les campagnes une part croissante des revenus ne vient plus de l’agriculture.


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