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Secousse politique à Taïwan. Réajustements, manœuvres et arrière-pensées

En février 2013, Lien Chan avait présenté son fils Sean Lien à Xi Jinping. Il s’agissait d’une manœuvre très en amont des élections locales taïwanaises pour promouvoir un canal pro-Pékin dans l’Île. La victoire de Ko à la mairie de Pékin a gravement fragilisé cette stratégie.

Pékin, entre la vision du long terme et l’impatience politique

Quant à la Chine, elle est face à la perspective d’échec de sa stratégie de rapprochement par les affaires que nombre de Taïwanais également inquiets du cours des événements à Hong Kong, considèrent comme une manœuvre oblique de réunification rampante. L’inquiétude de Pékin a été exprimée après le scrutin par le porte parole du Bureau des Affaires taïwanaises : « nous avons pris note du résultat des élections, et nous espérons que les compatriotes de chaque côté du Détroit auront conscience de la valeur des progrès accomplis dans la relation bilatérale et qu’ils s’efforceront de les préserver et de promouvoir le développement pacifique des liens dans le Détroit ».

Augmentation des pressions chinoises.

En réalité Pékin qui, depuis 2 années, a augmenté sa pression sur Ma Ying-jeou pour entamer des négociations politiques, n’est pas sans responsabilités dans la mauvaise performance électorale du KMT. Jusqu’à 2012, Ma Ying-jeou se retranchait derrière une vision prudente d’une relation avec Pékin privilégiant l’économie avant les points durs d’un dialogue politique que les Taïwanais rejettent becs et ongles.

Ces derniers estiment en effet que la situation ne sera pas mûre aussi longtemps que les deux parties ne feront pas preuve de « sincérité et de bonne foi » et qu’à Taïwan l’opinion ne sera pas prête. Cette position avait été clairement exprimée au forum de Boao d’avril 2012 par le Vice-Président Wu Tung-yi (Cité dans par Paris H. Chang dans « The Korean Journal of Defense Analysis, Vol. 26, No. 3, de septembre 2014. Voir le The Korean Journal of Defense Analysis).

…sur le sujet sensible de la marge de manœuvre diplomatique.

Mais 18 mois plus tard, une fois intronisé, le Président Xi Jinping avait marqué son impatience en rappelant à Vincent Siew (76 ans), ancien premier ministre et ancien vice-président de la République, lors du sommet de l’APEC en octobre 2013, que la question politique taïwanaise devait certes être résolue pas à pas, mais qu’elle ne pouvait pas être « transmise en héritage de génération en génération ».

Après l’échec de la ratification par le Yuan Législatif (YL) de l’accord cadre sur les services, vu à Pékin par le Bureau politique comme la base de son influence politique dans l’Île par le truchement du Front Uni et des hommes d’affaires chinois à qui l’accord devait procurer une assise légale, Pékin qui n’avait pas ménagé ses efforts pour influencer le Président du YL Wang Jin-pyng et les parlementaires, a, à l’été et à l’automne 2014, brutalement augmenté le niveau de ses pressions.

La nouvelle manœuvre portait sur un sujet hautement sensible pour les Taïwanais : leur marge de manœuvre diplomatique internationale et la signature avec des pays tiers d’un traité de libre échange. En août 2014, pour la première fois depuis 2010, la Chine a, en représailles des blocages opposés au traité sur les services par le Yuan Législatif et le mouvement du « Tournesol », fait obstacle à un traité de libre échange envisagé entre Taipei et Kuala Lumpur.

Ces représailles qui ne sont pas passées inaperçues dans les milieux intellectuels de l’Île, se sont doublées d’une tentative de séduction des PME taïwanaises et de coups de sondes en direction des membres éminents du KMT pouvant présenter une alternative crédible au Président Ma, dont l’audience est gravement affaiblie.

Stratégies de séduction et manœuvres obliques.

« Mieux comprendre les Taïwanais », tel était l’objet de la mission de 4 jours fin juin 2014, de Zhang Zhijun, 61 ans, membre du Comité Central du Parti Communiste Chinois, Directeur du Bureau des Affaires taïwanaises. Comme Zhang l’a expliqué lui-même, le voyage fut en effet largement consacré à prendre contact avec la société taïwanaise dans le but essentiel d’en identifier les lignes de force politiques et sociales principalement dans les secteurs de la petite entreprise, de la pêche et de l’agriculture laissés pour compte du développement.

A l’évidence elle visait aussi à calmer les inquiétudes politiques de l’opinion de l’Île : « Nous comprenons les Taïwanais et apprécions le prix qu’ils accordent à leur style de vie, leur système social, leurs valeurs et leurs idées ».

Simultanément Pékin – et après coup la manoeuvre apparaît catastrophique - ne put s’empêcher une intrusion dans la politique intérieure taïwanaise. Le candidat battu à la mairie de Taipei, Sean Lien, fils de Chan Lien évoqué plus haut, avait même été reçu au Grand Palais du Peuple par Xi Jinping. Paris H. Chang souligne que dans l’esprit du président chinois, il est clair qu’un succès de cette « grosse pointure » du KMT aux élections locales du 29 novembre aurait procuré au Bureau Politique un lien direct avec la mouvance au pouvoir, ouvrant de multiples canaux d’influence, dont certains utilisés par le Front Uni n’obéissent pas toujours aux critères de l’éthique démocratique.

Recherchant une stratégie alternative à Ma Ying-jeou et dans la crainte d’une victoire du DPP aux présidentielles de 2016, le Bureau Politique envisage toutes les options. A Pékin les médias ont même prêté attention à Ko Wen-je, le nouveau maire de Taipei qui, sur l’Île a été accusé de « ratisser large », et de rechercher l’appui du Continent y compris de la mouvance maoïste quand, lors d’un voyage en Chine, il avait visité la base historique de Yan’an, un des symboles fondateurs de la résistance communiste face aux armées de Thang Kaï-chek.


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