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Stress financier et volonté réformiste. Le marché contre les conservatismes

Test de solvabilité des banques et ouverture à la concurrence privée

En réponse à l’épisode dont il faut rappeler qu’il fut à la fois brutal, très localisé et de très faible ampleur, le gouvernement central s’est livré à une opération de communication dont la portée pratique sur la réalité des désordres de la finance grise sera marginale. Début avril, la Commission de régulation bancaire a annoncé que les banques chinoises allaient être soumises à une nouvelle série de tests de solvabilité, déjà mis en œuvre depuis 2011.

Rassurer les épargnants...

La manœuvre engagée depuis 3 ans et avant tout destinée à éviter que l’angoisse des petits épargnants se répande comme une trainée de poudre, a abouti à un résultat insolite : l’opacité des réseaux financiers enchevêtrés avec le pouvoir, à la source de considérables conflits d’intérêts inexpugnables n’a pas été levée. De même que n’ont pas été éradiqués les liens des grandes banques publiques avec la « finance grise », consubstantiels du système politique chinois.

Mais en même temps a surgi une contradiction : la force des exigences de solvabilité imposées aux institutions financières officielles a fait qu’aujourd’hui les grandes banques chinoises protégées de la concurrence sont devenues des champions mondiaux en terme de rentabilité et de capitalisation boursière, tandis que les services offerts à leur clientète moyenne dont l’épargne n’est pas rémunérée, sont toujours très en deça des performances exigées par la compétition internationale.

Les deux visages de la machine financière

Le système financier chinois donne donc l’image contrastée d’une tête élitiste en bonne santé financière, épine dorsale des féodalités opposées aux réformes, à la fois en cheville avec les entreprises publiques et peu préoccupées des petits épargnants comme des PME, tandis qu’au bas de l’échelle, les institutions grises, jusque là tolérées par le pouvoir, restent engluées dans les priorités contradictoires du clientélisme politique, de l’assainissement financier et du soutien à l’activité.

Mais ce tableau rassurant de la situation des grandes banques publiques, doit être relativisé par l’absence d’informations crédibles sur l’ampleur des dettes toxiques qu’elles abritent.

Dans ce contexte, le nouvel exercice de contrôle de solvabilité annoncé par le pouvoir début avril, apparaît aussi comme une manœuvre préparatoire à la mise en œuvre d’un des plus anciens projets du gouverneur de la banque centrale Zhou Xiaochuan, dont on se souvient qu’à l’occasion du 18e Congrès en novembre 2012, il avait été repéché par Xi Jinping et Li Keqiang, alors que le Comité Central influencé par la mouvance conservatrice l’avait ostracisé.

Porter le fer dans le cœur des prébendes financières

Déjà en janvier dernier la Commission de Régulation Bancaire avait annoncé que 2014 verrait l’ouverture du système financier chinois à la concurrence de 5 banques privées, avec en arrière pensée l’idée de faire contrepoids au monopole des banques publiques.

Le 11 mars, Zhou Xiaochuan a répété cette intention, ajoutant aussi sa volonté connexe de libéraliser les taux de rémunération de l’épargne dans un délai de « un à deux ans. ». Dans le même temps, le Conseil des Affaires d’État a depuis un an empiété sur le domaine réservé de la puissance des grandes banques publiques en autorisant la vente sur internet de « produits financiers » rémunérés jusqu’à 7% , contre les 3% proposé par le système financier étatique dont les avoirs ont atteint 18 000 Mds d’€ en décembre 2013, soit deux fois plus qu’en 2008.

Les futures banques privées en partie financées par l’étranger

Shang Fulin, président de la Commission de régulation a annoncé que les 5 banques privées seraient créées dans les zones sous douane de Shanghai, Tianjin et celles de la province de Canton. Sans préciser l’éventail des activités financières ouvertes aux nouvelles banques, il laissa aussi entendre que les investissements à l’origine de la manœuvre viendraient, entre autres, des deux athlètes chinois du commerce en ligne Alibaba et Tencent, dont il faut rappeler que le capital est lui-même en grande partie détenu par des investisseurs étrangers.

Ces derniers sont Américains, Japonais et Singapouriens pour Alibaba, dont le PDG Jack Ma ne possède que 7,4% du capital, détenu par l’Américain Yahoo avec 24% et le Japonais Softbank Corp avec 37%, à qui il faut ajouter les minoritaires américains Silverlakee et Tiger Global Management complétés par le fonds Singapourien Temasek ; Pour Tencent, propriétaire du réseau de messagerie QQ -, le capital est détenu à 34% par la compagnie sud-africaine de médias Naspers. Voir à ce sujet l’étude des services économiques de l’Ambassade de France en Chine (document PDF).

Dans l’opération « banques privées », Alibaba et Tencent seraient alliés au holding financier China Wanxiang 万向集团, le géant chinois des composants automobiles qui vient de racheter pour 149 millions de $ Fisker Automotive, le n°1 américain des voitures de sport hybrides. Le même Wanxiang avait en 2013 racheté pour 256 millions de $ la licence de batteries au lithium pour voitures électriques ou hybrides d’un producteur américain basé au Massachusetts.

Un test significatif de la dynamique réformiste

La phase ouverte par les récentes déclarations des autorités financières chinoises constitue une mise à l’épreuve des réformes qui prennent de plein fouet les avantages corporatistes des banques et des entreprises d’État. Il est évident qu’il y faudra aussi une volonté politique sans faille pour briser la suprématie des banques publiques qui se nourrissent de l’épargne sans la rémunérer et pour casser les mécanismes routiniers qui entretiennent des avalanches de crédits uniquement accordés pour couvrir les dettes mal garanties contractées par les administrations locales ou les groupes industriels au nom de la puissance publique auprès de structures de financement grises, à l’assise financière aléatoire.

Il est également facile de prévoir que la préoccupation sociale focalisée sur l’emploi et la paix sociale qui favorise « l’esprit de relance », contre l’adaptation de la machine financière au marché et aux compétitions internationales, constituera un frein à la remise en ordre des finances.


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