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Terres rares. La face cachée du monopole chinois

Les terres rares, un atout chinois

En 1992, Deng Xiaoping lançait un slogan qui allait mettre en branle l’énergie des scientifiques chinois autour du secteur des terres rares : « Au Moyen Orient le pétrole, à la Chine, les terres rares ». L’impulsion venait de Xu Guangxian - Docteur en chimie de l’université de Columbia (1951), revenu en Chine après le déclenchement de la guerre de Corée - également connu pour ses recherches sur le nucléaire militaire chinois.

Peu après l’ouverture, un premier élan, focalisé sur les hautes technologies, baptisé Plan 863, dont les objectifs étaient de « s’efforcer de réaliser des percées dans les domaines technologiques liés à l’économie et la sécurité nationales », comportait déjà, grâce à Xu Giangxian et d’autres, un volet consacré aux terres rares. L’effort fut poursuivi et amplifié à partir de mars 1997, avec le plan 973, à ce jour, un des plus vastes programmes de recherche chinois.

Tentatives pour contrôler la production globale

Dans une première phase, la Chine réussit à dominer le marché mondial des aimants, multipliant sa production par 10 entre 1997 et 2007. Mais ses ambitions ne s’arrêtèrent pas là, puisqu’en 2005, elle tenta, par le biais de l’acquisition du pétrolier américain UNOCAL, de contrôler la société Molycorp, propriétaire et exploitant du plus grand gisement américain de terres rares à Mountain Pass en Californie.

L’offre de 18,5 milliards de $, faite par le pétrolier chinois CNOOC, aurait conféré à la Chine un contrôle total sur les principaux gisements mondiaux connus. Elle fut rejetée par le gouvernement américain.

En 2009, une autre tentative fut bloquée, cette fois, par les autorités australiennes qui repoussèrent l’offre d’un minéralier chinois de prendre le contrôle, en rachetant ses dettes pour la somme de 252 millions de $, de la compagnie australienne Lynas, exploitant le gisement de terres rares de Mount Weld, au Sud-ouest de l’Australie. Une société chinoise du Jiangsu a cependant réussi à racheter 25% des parts d’Arafura Resources Ltd., un autre exploitant de terres rares australien.

Hausse des prix, désordres et trafics

A ce jour, l’obsession de la Chine de prendre le contrôle des gisements de terres rares de la planète, alors qu’elle dispose de la majorité des réserves mondiales, oblige à s’interroger sur ses intentions réelles. A l’intérieur cette fièvre a provoqué d’importants effets pervers. Le secteur y est en effet en proie à la lèpre des trafics et à une frénésie d’exploitations illégales, provoquant de graves atteintes à l’environnement.

Selon China Business News, la hausse du prix des terres rares a entraîné une explosion des trafics, au point qu’en 2008, 20 000 tonnes auraient été exportées illégalement, ce qui représentait 18% du marché mondial et près de 60% des exportations officielles de la Chine. Le désordre, qui s’affranchit des règles de sécurité sanitaire et des principes élémentaires de protection de l’environnement, entraîne également de graves conséquences écologiques.

Graves pollutions....

Le processus d’extraction des terres rares est en effet compliqué, long et polluant. Les techniques traditionnelles de raffinage utilisent des produits chimiques à base d’acides et d’ammonium toxiques, dont la décharge par les mines dans les rivières n’avait jamais été règlementée. Plus encore, selon une note de Xu Guangxian, rédigée en 2005, l’extraction du thorium dans la région de Baotou a entraîné la contamination radiologique du Fleuve Jaune.

« A baotou, où près de 150 millions de personnes dépendent du fleuve pour leur approvisionnement en eau, tous les poissons sont morts (...) ; Des personnes âgées de 30 ans qui travaillaient près des mines sont mortes d’un cancer, probablement provoqué par une contamination radiologique ».

...et alarmes publiques

Depuis un an, le Conseil d’Etat a réagi. En 2009 il a en effet établi une règlementation spéciale pour contrôler les effluents des carrières de terres rares, en espérant que les contraintes imposées élimineront les exploitations vétustes et illégales, tout en incitant les autres à réduire la pollution. Cependant, tout porte à croire que les vieilles désinvoltures à l’égard de l’environnement seront difficiles à éliminer.

Quant aux trafics et à la surexploitation, également dénoncés par Xu - ce dernier estime qu’au rythme actuel, la Chine aura épuisé ses réserves dans 35 ans -, la solution passe par une très difficile restructuration du secteur et un accroissement drastique des contrôles.

Ailleurs, où on avait laissé se construire le monopole chinois sans trop réagir, essentiellement parce que les coûts de production des mines de Mongolie Intérieure étaient inférieurs de plus de 50% à ceux des exploitations américaines ou australiennes, on commence à organiser la riposte. Celle-ci sera facilitée par la montée des prix provoquée par les récentes mesures chinoises et l’utilisation croissante des terres rares dans l’industrie high-tech.

Réactions des concurrents

Aux Etats-Unis, Molycorp Minerals a lancé une offre publique de 478 millions de $ pour redémarrer le site de Mountain Pass et sa mine du désert de Mojave, fermés il y a huit ans. En Australie le minéralier Lynas modernise ses installations à Mount Weld. Au Japon, l’une des plus grandes bases industrielles au monde utilisant des terres rares, on bouge également. Des contacts ont été noués avec le Vietnam et des négociations sont en cours avec l’Australie.

Il reste que les délais nécessaires à la rénovation des anciennes exploitations et à leur mise en conformité avec les nouvelles règles écologiques ou à l’ouverture de nouvelles mines, pourraient retarder les réactions. Les perspectives du secteur, sans être dramatiques, seront peut-être tendues à moyen terme.


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