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›› Editorial

Xi Jinping : « Pas de deux » avec l’Inde et l’Amérique

Terrorisme : Pékin ne reconnaît pas le rôle global de Washington.

De gauche à droite, les MAE russe Sergei Lavrov, chinois Wang Yi et indien Sushma Swaraj à la 13e conférence à trois à Pékin le 2 février dernier. A cette occasion la Chine et la Russie ont appuyé une proposition déjà ancienne faite par New-Delhi aux NU de sanctionner les pays qui abritent les terroristes. L’accord vise directement le Pakistan. Photo AFP.

Les autres aigreurs chinoises ont ciblé les États-Unis sur le mode bien connu qui conteste à Washington le rôle de garant de la sécurité de la planète et condamne son interventionnisme militaire. Cette fois la charge n’a pas été menée par le truchement d’un commentaire officiel du Waijiaobu, mais par deux articles de Xinhua.

L’offensive qui ne s’embarrassait d’aucune précaution diplomatique, a été lancée à l’occasion du sommet organisé par la Maison Blanche le 19 février pour la lutte contre le terrorisme et auquel participèrent des officiels de 60 pays, dont la Chine était cependant absente.

Elle reprenait toutes les critiques adressées à Washington : depuis les connivences crapuleuses en Amérique Latine jusqu’aux récentes initiatives de la Maison Blanche contre l’État Islamique, en passant par les manœuvres machiavéliques en Afghanistan qui donnèrent naissance aux Moudjahidines afghans, matrices des groupes terroristes qui mirent en échec les interventions des coalisés en Irak ou contre les Taliban.

Ce qui conduit l’auteur d’un des articles de Xinhua à s’interroger sur la pertinence antiterroriste de la Maison Blanche : « l’Oncle Sam est-il un “leader“ de la lutte contre les terroristes ou a t-il, au contraire, contribué à leur prolifération ? ».

Sans compter, ajoute Xinhua, que les interventions militaires qui détruisirent les États et libérèrent les radicalismes, furent à la racine du terrorisme, en Irak, en Afghanistan et en Libye. Pour l’agence chinoise, le sommet de Washington est aussi l’occasion de rappeler la position de Pékin qui réfute la prévalence américaine et l’ingérence militaire.

Un commentaire du magazine américain « The Diplomat » imagine que la Chine ne s’opposera pas à la stratégie exprimée lors du sommet - « combattre l’extrémisme violent et favoriser les prises des conscience » -. Mais que Pékin restera résolument hostile à une intervention militaire, même pour combattre le terrorisme.

Glissement stratégique de la Chine en faveur de New-Delhi.

Trois semaines avant, lors du 13e sommet trilatéral entre la Chine, l’Inde et la Russie et comme pour démontrer que d’autres voies existaient hors de celle proposée par Washington, Pékin et Moscou appuyaient une proposition indienne aux NU vieille de 19 ans visant à sanctionner les États abritant les terroristes sur leur sol.

La convergence sino-russe en faveur d’une proposition indienne signale un glissement stratégique majeur de la Chine dans la région. Jusqu’à présent en effet, le régime chinois, soucieux de ménager son allié pakistanais principalement visé par l’accord, avait refusé d’y souscrire. Il ne fait pas de doute que la correction de trajectoire est motivée par le surgissement sur le sol chinois d’une menace terroriste.

Enfin pour faire bonne mesure, les dures critiques de Xinhua contre Washington étaient accompagnées d’une offensive chinoise contre les groupes High-Tech américains. Nouvel épisode des frictions commerciales sino-américaines à quoi s’ajoute une cyberguerre articulée autour des duels d’espionnage, l’initiative chinoise qui frappe CISCO, Apple, Citrix System et la branche des logiciels sécurité d’Intel McAfee, tous interdits de participer aux appels d’offres publics de l’administration chinoise, est d’abord une manœuvre protectionniste.

Elle est aussi une riposte aux accusations d’espionnage contre l’Armée Populaire de Libération rendues publiques en 2014 et à l’ostracisme qui frappe Huawei sur le marché américain.

Lire : Cyber-guerre. Une autre perspective.

Désir d’apaisement, persistance des contentieux et des non dits.

On le voit, comme entre la Chine et l’Inde, les contentieux ne manquent pas entre Pékin et Washington. La route vers un apaisement est semée de chausses trappes qui vont des rivalités stratégiques, aux querelles commerciales en passant par les accusations réciproques d’espionnage, les contentieux sur Taïwan, la mer de Chine du sud et les accusations d’ingérences américaines dans les affaires intérieures chinoises, à quoi s’ajoute la lourde méfiance de Pékin face aux projets militaires américains au Moyen Orient.

Les intentions d’apaisement existent cependant des deux côtés. Le 12 février, un éditorial du Global Times – surgeon du Quotidien du peuple - se projetait en septembre prochain, évoquant la visite d’État de Xi Jinping à Washington. Sans édulcorer le profond fossé idéologique et les « contradictions structurelles », l’article soulignait que, contrairement aux analyses pessimistes, les relations entre les deux pays n’avaient pas sombré dans le conflit qui guette habituellement une puissance établie et sa rivale émergente.

L’auteur ajoutait que la prévention d’une catastrophe était d’autant plus difficile que des critiques réciproques s’étalaient chaque jour dans les médias, attisant le soupçon ou le ressentiment des opinions publiques en dépit des efforts officiels pour améliorer la confiance. Mais il concluait que les sept mois qui restaient avant la rencontre au sommet entre les présidents Obama et Xi Jinping qualifiée d’historique seraient consacrés à valoriser les bonnes relations existantes entre les deux dirigeants nées au cours de leurs rencontres précédentes en Californie et à Pékin.

Le site du Département d’État est sur la même ligne. Allant plus dans le détail des sujets de coopérations bilatérales possibles qui vont de la question iranienne au sud-Soudan en passant par la Corée du nord, les changements climatiques, le terrorisme, la protection de l’environnement et la sécurité énergétique, il appelle de ses vœux la naissance d’une Chine forte, pacifique et prospère jouant un rôle plus important dans les affaires du monde.

En arrière plan restent les malentendus et les non dits : ceux du flou des intérêts vitaux chinois d’abord clairement assimilés aux questions de Taïwan du Tibet et du Xinjiang, mais auxquels la Direction chinoise a, en 2014, brièvement rajouté les îlots des Senkaku, tandis que l’affirmation de souveraineté sur la mer de Chine du sud se durcit ; à quoi s’ajoutent les réticences chinoises de plus en plus nettes à se couler dans un ordre mondial calibré par les États-Unis et leurs alliés.

Par-dessus plane le sentiment du régime chinois que les menées démocratiques de Washington constituent une menace existentielle pour le Parti Communiste chinois.


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