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Xiaomi, la nouvelle perle technologique chinoise

Lei Jun le PDG de Xiaomi qui bénéficie de toutes les attentions du pouvoir annonce que le groupe a triplé ses ventes en 2014. Dans ses apparitions publiques, il cultive une ressemblance avec Steve Job, le PDG emblématique d’Apple.

Xiaomi est la marque de « smartphones » qui prend une ampleur considérable en Chine et dans le monde. Créée par Lei Jun, un entrepreneur charismatique qui se donne des allures de Steve Job, elle fait un tabac dans plusieurs pays d’Asie et se prépare doucement à pénétrer les marchés européen et américain en ouvrant des boutiques en ligne. En Chine, avec 15,9% des parts de marché au deuxième trimestre 2015, elle est désormais n°1 après avoir résolument empiété sur la clientèle de Samsung et d’Apple, les 2 vedettes mondiales du secteur.

En 2014, Xiaomi a globalement vendu 61 millions de « smartphones » soit près de 3 fois plus qu’en 2013, avec des revenus en hausse de 135%. Le modèle, compatible avec toutes les applications androïde de Google play possède un plus grand écran, il est plus fin, plus léger, sa batterie a une plus longue autonomie et son appareil photo une meilleure résolution. Son prix : 370 $.

Présenté en janvier dernier, le Mi Note, concurrent de l’iPhone 6 Plus et du Galaxy Note 4 de Samsung est un smartphone mince, doté d’un écran de 5,7 pouces équipé du microprocesseur Snapdragon 801 de Qualcomm et d’un appareil photo de 13 megapixel Sony avec stabilisateur d’image et d’une pile à rechargement rapide, à quoi il faut ajouter une mémoire de 16 GB et des prises pour micro et cartes SIM. Le tout semble un hybride plus fin et plus léger de l’iPhone 6 et de l’ iPhone 5, qui propose à moindre prix un écran plus grand, des performances photo meilleures et une batterie fiable à rechargement rapide.

Pour la direction chinoise, Xiaomi est bien plus qu’un simple portable. Nouveau fleuron high-tech chinois, il est à la pointe des efforts d’indépendance technologique dans le cadre des efforts d’innovation symbolisés par le slogan Zhongguo Zhizao 中国 制造 2025, sur fond de concurrence avec les groupes high-tech américains.

Une base financière irréprochable et une coopération technologique très haut de gamme.

Xiaomi a été lancé en avril 2010 avec un investissement du fond souverain singapourien Temasek, deux fonds d’investissements chinois et, depuis décembre 2014, un apport financier de All-Stars Investment Limited géré par Morgan Stanley. A quoi il faut ajouter la participation du fabricant américain de microprocesseurs Qualcomm, un des leaders mondiaux des « chips » dans le secteur des télécoms mobile 3G et 4G et dont les revenus se nourrissent des royalties payées par les fabricants d’équipements télécoms comme Xiaomi et Huawei qui utilisent ses produits.

Au passage, la structure de l’investissement – fonds souverains singapourien et fonds chinois ayant pignon sur rue à quoi s’ajoute la participation de Qualcomm - symbolise la problématique chinoise de ce secteur stratégique. Compte tenu de la nature des financiers, il est peu probable que Xiaomi soit une entreprise privée classique totalement indépendante. Au contraire, la structure du capital indique un engagement des pouvoirs publics derrière Xiaomi identifiée par le régime comme une entreprise high-tech capable de concurrencer les grands du secteur.

La présence de Qualcomm souligne aussi la stratégie de coopération avec les leaders mondiaux des microprocesseurs en appui technologique des ingénieurs chinois. Une démarche à laquelle les fabricants de « chips » en compétition sur le marché chinois ne peuvent se soustraire, sous peine de s’infliger un handicap commercial rédhibitoire. Intel, concurrent américain de Qualcomm a d’ailleurs adopté de gré ou de force la même stratégie de coopération avec le secteur chinois des fabricants de chips. Le tout dans une ambiance crispée des pouvoirs publics américains partagés entre leur volonté de protéger les avantages technologiques de leurs fleurons et la conviction que leur extension commerciale ne pourra faire abstraction d’une coopération avec la Chine.

A ce sujet lire : Compétitions, libre marché, transferts de technologies et sécurité nationale. La psychose sino-américaine des microprocesseurs

La démarche consistant à prendre appui sur les technologies et les savoir faire étrangers est notamment attestée par le recrutement récent de Wang Xiang, ancien directeur des opérations de Qualcomm en Chine nommé début juin vice-président de la division de coopération stratégique. Surtout, Xiaomi avait, il y a deux ans, recruté le brésilien Hugo Barra, 40 ans, formé au MIT et ancien vice-président de Google Androïde, nommé en octobre 2013 rien moins que n°2 de Xiaomi International. A l’époque l’épisode fut une des péripéties de la bataille en cours entre les pouvoirs publics chinois et le géant américain Google, toujours inaccessible en Chine.

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Un élan international malgré les controverses.

Ainsi bardé de solides appuis financiers et de l’un des tous meilleurs ingénieurs du secteur, Lei Jun le PDG de Xiaomi, ingénieur télécoms formé à Wuhan a lancé sa marque à l’international, en Malaisie, à Singapour, en Inde, en Indonésie, aux Philippines et au Brésil. En cours : des projets d’expansion en Turquie et en Russie. Le succès est du aux prix très serrés obtenus grâce à l’impasse sur la publicité et sur les magasins – les ventes se faisant uniquement par le truchement des boutiques en ligne - , ainsi qu’à la qualité et à la variété des produits phares et des accessoires tous intelligemment intégrés par la marque, avec - réalité oblige - une totale compatibilité avec la nébuleuse androïde de Google play.

Cette année au printemps, Xiaomi annonçait le lancement du smartphone Mi 4i en Inde et, le 30 juin dernier, la commercialisation au Brésil du Redmi 2 fabriqué sur place, premier exemple de délocalisation par le groupe d’une de ses chaînes de fabrication. Ce n’était qu’un début. Le 11 août démarrait l’usine Xiaomi de Srinigar au nord de l’Inde dont le groupe a fait un objectif commercial prioritaire. Mais cette marche triomphale rapide n’a pas toujours été exempte de controverses.

Se donnant des airs de Steve Jobs, imitant même le style et les tics de présentation des nouveaux produits, Lei Jun a lui-même alimenté les critiques de contrefaçon des innovations technologiques d’Apple et d’imitation des stratégies commerciales du groupe à la Pomme.

Mais il y a plus sérieux. Lei Jun a été accusé de faciliter par son système « cloud » le transfert et le stockage en Chine des données privées des utilisateurs. A l’automne 2014, l’armée de l’air indienne publiait une note de mise en garde contre les téléphones Xiaomi accusés d’envoyer automatiquement des données aux services de renseignements chinois. Ce qui a obligé Lei Jun à délocaliser des serveurs hors de Chine et à mettre en option l’utilisation du système de messagerie « cloud ».

On ne peut que relever la similitude de la situation avec celle de Huawei géant global des équipements télécoms qui avait rencontré les mêmes méfiances, notamment en Inde, mais pas seulement, avant de multiplier les efforts pour s’imposer sur le vaste marché du sous-continent. Ses principaux arguments que Xiaomi tente d’imiter avaient bien sûr été d’abord des prix avantageux, mais également une vision stratégique globale par une approche circulaire des grands marchés occidentaux abordés après la conquête systématique des émergents et, surtout, grâce au recrutement d’experts incontestés du secteur, aucune concession sur la qualité.

Lire : HUAWEI, le flambeau du succès High Tech, pilier de la captation de technologies ?

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Reste, en arrière plan de cette saga high-tech chinoise, la question cruciale des micro-processeurs, cœurs de toute la série d’équipements des nouvelles technologies de la communication et dont la production globale est, pour l’instant, contrôlée par des fabricants non chinois, pour la plupart américains.

En observant la situation où se croisent les turbulences de la relation entre Pékin et Google, les manœuvres chinoises pour amener les groupes américains tels que Qualcomm et Intel à transférer leurs technologies par le truchement de coopérations en échange de leur présence sur le marché chinois, on distingue clairement la stratégie du régime en marche vers l’indépendance high-tech définie par le nouveau slogan « Zhongguo Zhizao 2025 » qui ambitionne de siniser d’ici 10 ans la production de haute technologie chinoise.


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