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›› Chronique

L’enjeu stratégique d’une éventuelle fin d’embargo

Si l’on fait abstraction d’un petit détail, les relations entre la Chine et l’Union européenne sont actuellement au beau fixe. Aussi bien dans le domaine économique que politique, les échanges s’accroissent régulièrement et un partenariat stratégique, souhaité par les deux parties, commence à prendre la forme. Cependant, le détail en question, survenu depuis l’été 1989, fait encore obstacle à une normalisation complète des relations bilatérales. Il concerne les ventes d’armes européennes à la Chine. Elles font l’objet d’un embargo décidé au lendemain de la tragédie de la place Tian’anmen. Les Chinois espèrent une levée rapide car ils estiment que non seulement elle répondra à l’attente des industriels impatients de trouver un grand marché d’exportations mais aussi à la volonté de certains pays - la France et l’Allemagne en tête - soucieux de manifester leur indépendance vis-à-vis de la politique des Etats-Unis d’Amérique. Mais une telle décision requiert l’unanimité des 25 Etats membres et ce n’est pas le cas d’aujourd’hui. Trois types d’obstacles au moins barrent encore le boulevard des marchands d’armes et la probabilité de les franchir à court et moyen terme reste faible.

Le premier obstacle est celui de l’opinion publique en Europe. Rappelons-nous que l’embargo a été instauré pour sanctionner les dirigeants chinois sur les violations des droits de l’homme. A moins d’un geste spectaculaire de la part de Pékin dans ce domaine, comme la réhabilitation du mouvement étudiant de 1989 ou la libéralisation de la presse, il est difficile de changer l’image de la Chine en la matière. Tout indique que Hu Jintao ne dispose pas aujourd’hui des moyens politiques nécessaires pour procéder à de telles réformes. Néanmoins, ce type d’obstacle n’est pas infranchissable puisqu’au Moyen-orient ou en Afrique, certains régimes qui reçoivent des armes européennes ne peuvent pas se prétendre champions des droits de l’homme, loin s’en faut.

Le deuxième obstacle est le risque d’un déséquilibre des forces entre la Chine et Taiwan. Les relations entre les deux rives du détroit de Formose se sont particulièrement détériorées depuis la réélection (par ailleurs assez contestable) de Chen Shui-bian sur l’île nationaliste. Un déséquilibre des forces en faveur du continent pourrait inciter les militaires chinois à prendre l’île par force. L’acquisition de matériels militaires européens par les Chinois peut contribuer à créer ce déséquilibre. Même si le risque d’un conflit paraît à ce jour improbable, les Européens ne souhaitent pas voir éclater une guerre qui compromettrait l’économie de l’ensemble de la région d’Asie-pacifique.

Le troisième obstacle se trouve dans les relations trans-atlantiques. Les craintes de Washington sont fondées sur l’hypothèse suivante : la modernisation de l’armée chinoise sera à long terme une menace pour la présence américaine en Asie et les ventes d’armes européennes vont favoriser la réduction de l’écart technologique entre Chinois et Américains. Récemment, sur les ondes de la Voix de l’Amérique (VOA), un représentant de l’Administration Bush évoquait la possibilité de mettre fin au partage de technologies militaires dans l’OTAN au cas où les Européens lèveraient l’embargo en question. En clair, les Européens doivent choisir entre leurs partenariat avec la Chine et leur alliance avec les Américains.

Ainsi, la fin éventuelle de l’embargo sur la vente d’armements à la Chine est un enjeu hautement stratégique pour l’Europe des 25. Les intérêts essentiellement économiques des Européens se heurtent alors à des contraintes inhérentes à l’Alliance atlantique. Comment sortir un tel dilemme ? Nous ne voyons actuellement pas de réponse à cette question.

 

 

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