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›› Technologies - Energie

Course aux armements en Asie du Nord-Est

Les spécialistes s’interrogent chaque année sur ce que l’APL fait -ou fera- du budget sans cesse croissant que lui accorde le gouvernement depuis de nombreuses années. Une partie de la réponse se trouve dans une étude exhaustive réalisée récemment par la RAND Corporation : « Dans le repaire du Dragon : les stratégies chinoises d’interdiction et leurs implications pour les Etats-Unis ». Il s’agit d’une revue détaillée des stratégies asymétriques que l’APL envisage d’employer en cas de conflit avec les Etats-Unis à propos de Taiwan.

L’étude tombe à point nommé dans un contexte où les tensions entre Pékin et Taipei ressurgissent et où, dans les cercles de la défense, les plus pessimistes des nationalistes chinois croient dur comme fer à l’éclatement d’un conflit après les Jeux Olympiques de 2008. Si l’on admet que la question de Taiwan est au centre des préoccupations de défense de la Chine, il est légitime de faire l’hypothèse que les dépenses d’équipements affectées aux capacités militaires liées à un conflit sur ce théâtre justifient une part importante des augmentations du budget de l’APL. Le travail de la RAND Corporation, long de plus de 150 pages, s’appuie essentiellement sur des analyses d’experts et de chercheurs liés à l’APL et publiées dans la presse ouverte chinoise.

Conscients des lacunes de l’Armée de Libération confrontée à la marine et à l’aéronavale américaines dans « un conflit local mené dans une ambiance high-tech », expression consacrée des stratèges chinois pour désigner le type de conflit envisagé dans le Détroit, l’objectif du commandement chinois n’est pas de remporter une victoire sur les Américains, mais seulement d’interdire ou à tout le moins de ralentir leur accès au théâtre. Privilégiant l’effet de surprise et les frappes préventives, prenant soin d’éviter tout affrontement direct (qui reviendrait, écrit un expert de l’APL, à « jeter un oeuf contre un mur »), les planificateurs chinois ont -tenant compte des vulnérabilités américaines- identifié une série d’objectifs à frapper en priorité. Simultanément, l’accès direct aux parages immédiats du Détroit serait interdit par un dispositif combinant le mouillage de mines et l’action de sous-marins.

Dans ce contexte, l’APL attaquerait d’abord les systèmes de commandement, d’information et de détection, ainsi que les systèmes de transmission qui les relient entre eux ou qui connectent les senseurs aux systèmes d’armes, y compris en détruisant les satellites américains et en utilisant l’effet d’impulsion électromagnétique (IEM) ; elle s’en prendrait ensuite aux lignes de communication et aux bases américaines situées au Japon et en Corée du Sud ; enfin elle chercherait à frapper les porte-avions de la 7e flotte, dont les vulnérabilités sont analysées en détail et en toute transparence depuis plusieurs années dans la littérature spécialisée chinoise.

Le tout baignerait dans une série d’actions diplomatiques pour affaiblir l’influence américaine dans la région comme sur la scène mondiale et dans une ambiance de guerre électronique totale destinée à gêner les mouvements, les ravitaillements et les déploiements initiaux de l’US Navy, l’obligeant à prendre des risques importants pour tenir son engagement de protéger Taiwan en cas de conflit.

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Les dépenses pour l’acquisition des capacités liées à la mise en oeuvre de cette stratégie du faible au fort vont des R&D dans les domaines de la guerre électronique, de la précision et de la portée des missiles balistiques et de croisière, des techniques d’armes laser anti-satellites, aux développements ou aux achats d’équipements navals et aéronavals (chasseurs Sukhoi russes, chasseur J10 de fabrication chinoise, sous-marins Kilo ou croiseurs lance-missiles de fabrication russes Sovremenny, équipés de missiles de croisières anti-navires ultra-rapides).

Ces analyses débouchent naturellement sur une liste des améliorations que les Américains devraient apporter à leur dispositif et à leurs équipements pour contrer ces menaces : « durcir » les systèmes informatiques, multplier les défenses anti-missiles à tous les niveaux et autour des objectifs et des bases sensibles, améliorer les capacités anti-aériennes et anti-sous marines des groupes de porte-avions, diversifier les déploiements, « durcir » et multiplier les satellites, améliorer les capacités d’alerte et de détection avancée etc.

Faciles à imaginer, mais difficiles et très coûteuses à mettre en oeuvre, ces mesures induiront fatalement une course aux armements dans la région, et -si personne ne se décide à inverser la tendance- à une utilisation accrue de l’espace à des fins militaires.

 

 

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