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La marine chinoise s’engage loin de ses bases

Depuis une semaine trois bâtiments de guerre chinois font route vers la corne de l’Afrique pour participer à la lutte contre la piraterie. C’est une première : jamais dans son histoire moderne, la Chine n’avait engagé sa marine aussi loin de ses bases dans une opération de combat aux côtés de navires de guerre étrangers. La qualité des bâtiments et le niveau des personnels impliqués dans cette mission au large de l’Afrique de l’Est indiquent l’importance que Pékin lui accorde. Il s’agit pour la Chine, dont les navires marchands ont récemment été piratés au large de la Somalie, non seulement de contribuer à la sécurité des liaisons maritimes en haute mer, mais également d’affirmer la disponibilité et le niveau opérationnel de sa marine face aux grands rivaux régionaux que sont l’Inde et le Japon.

Le 26 décembre dernier, l’Armée Populaire de Libération a en effet fait appareiller de la base de Sanya dans l’île de Hainan en direction du Golfe d’Aden, deux destroyers lance-missiles et un bâtiment logistique avec à leur bord 800 marins et 70 membres des forces spéciales. Le deux navires lance-missiles, le Wuhan et le Haikou, qui déplacent tous deux 7000 tonnes à une vitesse maximum de 30 noeuds, ont été construits en 2002 et 2003. Ils sont équipés de missiles anti-navires et, pour le Haikou, de missiles anti-aériens à lancement vertical. Le Wuhan est en outre doté d’un hélicoptère de bord.

Quant au Weishanhu, le navire logistique, il a été mis en service en 2004 et déplace 23 000 tonnes. En septembre 2007, il avait déjà participé à un exercice conjoint avec la marine française en Méditerranée. C’est le dernier né des bâtiments de soutien chinois et le premier à disposer d’une capacité de ravitaillement 24 / 24. La flottille est commandée par le Vice Amiral Du Jingchen, chef d’état-major de la flotte du sud, à laquelle appartiennent les bâtiments. Ce dernier a précisé que la flottille serait également en mesure de participer à des opérations humanitaires au profit du Programme Alimentaire Mondial, mais qu’elle resterait sous commandement chinois pendant toute la durée de l’opération.

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Cette opération témoigne des progrès effectués par la marine chinoise au cours des vingt dernières années. Grâce à ses longues tournées autour du globe, elle commence à mieux maîtriser les opérations en haute mer. Ses destroyers achetés à la Russie sont équipés de missiles anti-navires supersoniques « Sun Burn ». Ses capacités de tir vont au-delà de l’horizon. Sa flotte de sous-marins - nucléaires ou classiques - se développe lentement mais sûrement, en dépit de nombreuses difficultés et faiblesses. Elle ne possède pas encore de porte-avions, mais il est probable que cette lacune sera bientôt comblée. Selon un compte rendu de la presse japonaise, la Chine mettrait en chantier en 2009 deux porte-avions de 50 à 60 000 tonnes chacun.

On a beaucoup glosé sur les raisons de cet engagement de la Chine aussi loin de ses bases et contre toutes ses habitudes de prudence. Mais il faut se souvenir que près de la moitié de l’approvisionnement de la Chine en pétrole transite dans la région. Les importations chinoises de brut augmentent au rythme de 12% par an. En 2007, elles ont atteint 164 millions de tonnes, dont plus de 60 millions de tonnes provenaient des pays du Golfe (en moyenne 6 super tankers par semaine). En 2008, 1300 navires de commerce chinois ont emprunté la route du golfe persique. 7 d’entre eux ont été attaqués. Un bateau de pêche et 18 marins chinois sont encore aux mains des pirates. Ces incidents avaient d’ailleurs déclenché de nombreux commentaires critiques des internautes chinois s’étonnant de l’inertie de leur gouvernement.

Par ailleurs, la Chine, elle-même concernée au premier chef du fait du nombre de mouvements de ses bateaux dans une zone à hauts risques - 100 actes de piraterie en 2008, 40 navires détournés, 14 autres encore aux mains de pirates -, était jusqu’à présent le seul membre permanent du Conseil de Sécurité à ne pas s’impliquer directement, alors que 12 pays, dont l’Inde, son grand rival régional, avaient déjà envoyé des bateaux sur zone. Enfin, le fait que la piraterie maritime n’ait pour l’heure, et contrairement à la piraterie aérienne, aucune implication idéologique ou politique, a probablement facilité la décision des autorités chinoises.

 

 

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