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›› Technologies - Energie

Environnement : Un ministère plus puissant, mais toujours de grands défis

Le casse tête de la pollution vient de refaire surface avec la publication du rapport annuel du Ministère de l’environnement.

Après avoir souligné les améliorations de la qualité de l’air et de l’eau avec la réduction des polluants de surface et des émissions de dioxyde de souffre dans les villes, le rapport pointe du doigt d’importants problèmes rémanents.

Leur solution supposera un engagement plus soutenu des autorités centrales, une meilleure coordination entre les administrations, dont certaines empiètent sur les prérogatives du ministère, et la mise au pas des administrations locales, toujours tentées, moyennant rétribution, par une connivence avec des entreprises peu respectueuses des règles anti-pollution.

Surtout, l’amélioration notable de l’environnement passera par la réduction, aujourd’hui encore bien difficile, de la part des combustibles fossiles dans la production d’énergie, la maîtrise systématique des effluents industriels, ainsi que le traitement de l’eau et des ordures à grande échelle, dont, pour l’heure, seulement 10% sont retraités ou recyclés.

Li Gangjie, l’un des vice-ministres explique que la biodiversité décline partout dans les campagnes, de plus en plus polluées à mesure que les industries sont déménagées hors des villes. Le 12e plan prévoit de donner un coup d’arrêt à la dégradation des régions rurales, où 20% des zones transformées en réserves naturelles protégées sont illégalement exploitées, souvent avec la complicité des gouvernements locaux.

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Prise de conscience

Dans les hautes sphères du régime, la prise de conscience est incontestable. Tout indique en effet que, dans un contexte où la rupture des équilibres écologiques commence ici et là à provoquer des tensions sociales et politiques - la dernière crise sociopolitique en date s’étant cristallisée en Mongolie intérieure - les pouvoirs du ministère de l’environnement ont été sérieusement augmentés.

Alors qu’à ses débuts et 1998, il n’était qu’une « agence » sans trop d’influence, sa capacité d’action a, depuis lors, été décuplée. Non seulement ses propositions de lois sont rapidement acceptées, mais il est aujourd’hui capable d’exercer des contrôles plus efficaces sur les abus et d’orienter les politiques énergétiques.

Pour ne citer que quelques exemples, une nouvelle législation sera votée à brefs délais, destinée à contrôler la dispersion des métaux lourds à l’origine de 30 cas d’empoisonnement au plomb depuis 2009 ; désormais, les détournements illégaux de zones protégées sont détectés par satellite ; des projets jugés polluants sont annulés - en 2010, 59 projets d’une valeur totale de 15 Mds de $ ont été supprimés, tandis que de nombreuses usines polluantes ont été fermées. - Dans le seul mois de mai 2011, les gouverneurs du Zhejiang et de Canton ont annoncé la fermeture de plusieurs usines de galvanoplastie et de 300 usines de batteries au plomb -.

En 2010, la Chine a investi 34 Milliards de $ dans le secteur des technologies propres, qui donnera à un coup de fouet au développement de l’hydraulique et du nucléaire, les deux plus grandes sources d’énergie alternative. Quant aux énergies éolienne et solaire, leurs progrès sont très rapides, mais il sont dominés par l’appât du gain, le désordre et d’importantes lacunes de qualité.

En effet, 50% des sources ne sont pas connectées au réseau, et au moins 1/3 des éoliennes sont endommagées par les vents de sable et d’importantes impasses sur les opérations d’entretien.

Le plan quinquennal prévoit également l’introduction de ratios pour les émissions d’oxyde de nitrogène et de gaz d’ammoniaque en plus des actuelles limites pour les émissions de dioxyde de souffre. A quoi s’ajoutent les quotas sur les exportations de terres rares, dont l’objectif est à la fois de restructurer un secteur devenu incontrôlable, de protéger les paysages dévastés par des années d’exploitation sauvage et de mieux valoriser cette ressource par la création d’une industrie de transformation proprement chinoise.

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De grands défis.

Mais la tâche est immense et les efforts entrepris n’effleurent que la surface des choses, d’autant que, s’il est vrai que le ministère, aujourd’hui mieux reconnu, a plus de pouvoirs, il n’a pas toujours les moyens de ses ambitions. Une partie importante des crédits dédiés à la lutte contre la pollution sont en effet affectés à une structure plus ancienne, créée en 1988, la China Energy Conservation Investment Corporation - 中国节能-également placée sous la férule du Conseil des Affaires d’Etat.

Son rôle est d’investir dans des projets liés au contrôle de la pollution, avec cependant l’objectif annexe d’assurer de substantiels bénéfices aux commanditaires des projets au sein de l’administration. A ces difficultés administratives, qui diluent les responsabilités et créent des rivalités, il faut ajouter l’énormité des défis.

Ces derniers vont de la prévalence, aujourd’hui encore irrémédiable du charbon, source de 77% de l’électricité chinoise et responsable de la plus grande partie des pluies acides et des émissions de gaz à effet de serre, dont la réduction par les procédés modernes entraînerait un surcoût de 15%, aux insondables gabegies des ressources hydriques, également gravement polluées, en passant par le gigantesque chantier du traitement des ordures urbaines et des milliards de tonnes de déchets qui couvrent illégalement la Chine, provenant de la frénésie de travaux et de consommation, et provoquant la pollution des sols et des nappes phréatiques.

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Brèves.

• Panneaux solaires chinois en Afrique.

1er producteur mondial de panneaux solaires, la Chine a selon le China Daily, l’intention de réduire drastiquement la dépendance aux énergies fossiles de 40 pays africains, ouvrant ainsi un nouveau marché pour les fabricants chinois. Les études de marché devraient débuter en juin, avec comme premiers objectifs l’installation de panneaux sur les toits des écoles et des hôpitaux. Le prix estimé de chaque projet serait de 1,5 à 3 millions de $.

L’initiative, portée par 2 compagnies chinoises du secteur - JA Solar Holding Co et Suntech Power Holdings - s’inscrit dans un plan d’ensemble de 100 projets d’énergie propre, proposé à l’Afrique par Wen Jiabao en 2009.

La progression du secteur qui était de 100% en 2010, ralentira cette année et ne devrait plus être que de 60% - dit le China Daily - suite à la baisse des subventions européennes. La Chine produit la majeure partie de panneaux solaires vendus dans le monde, mais elle n’a, elle-même, acheté que 3% de cette offre. La majorité des panneaux produits en Chine sont de basse qualité, et leur durée de vie est limitée.

Cette réalité pose le problème du traitement des composants des équipements hors d’usage, en général très polluants qui nécessiteront des sites spéciaux de recyclage, ce qui induira un surcoût à venir.

• Fin des subventions aux éoliennes chinoises.

Pour mettre fin à un différend commercial à l’OMC sur les éoliennes, la Chine a accepté de cesser ses subventions au secteur. Celles-ci étaient de surcroît assorties de l’obligation d’acheter des pièces détachées fabriquées en Chine. Une disposition qui heurtait les intérêts des producteurs de pièces détachées européens et Américains.

• Augmentation du prix de l’électricité.

Les pouvoirs publics ont repoussé le plus tard possible la décision d’augmenter les prix de l’électricité, finalement intervenue le 1er juin, pour les industriels et les agriculteurs. C’était la première hausse depuis un an.

La hausse des prix du charbon que les pouvoirs publics avaient d’abord interdit de répercuter sur les prix de l’électricité, avait mis en difficulté les opérateurs nationaux. Pour équilibrer leurs comptes, ces derniers mettaient en panne les centrales, provoquant de fréquentes coupures.

La hausse des prix de l’électricité complique la lutte contre l’inflation. Elle induira une hausse de la consommation du charbon et de son prix que les pouvoirs publics tenteront de contrôler. Mais de nouvelles vagues de coupures à l’été paraissent inévitables.

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• Opération batteries propres.

Une opération coup de poing menée en mai par le gouvernement contre 300 usines de batteries au plomb / acide dans le Zhejiang et dans la province de Canton toutes fermées pour non respect des règles de sécurité environnementales a brièvement mis sous tension le marché du plomb.

Mais les fermetures n’ayant concerné que les petites unités de production, la confiance est vite revenue. Pour 2012, la demande chinoise restera inchangée, pour un prix pouvant varier entre 2500 $ et 3000 $ la tonne.

Mais une autre pollution tout aussi préoccupante, prenant de l’ampleur, est liée aux batteries des bicyclettes électriques, dont l’usage explose. Après 2 années d’utilisation en moyenne elles sont abandonnées dans des décharges à la périphérie des villes, où les travailleurs les désossent pour en récupérer le plastic et le plomb.

• Controverse autour des taxes carbone infligées par l’UE aux compagnies aériennes.

Après une brève période de tensions, l’EU pourrait exempter les compagnies aériennes des pays émergents de sa nouvelle taxe carbone.

Se référant à la règle des responsabilités différenciées, installant deux poids deux mesures entres les pays développés et les pays émergeants, la Chine avait annoncé le 7 juin qu’elle ne se conformerait pas à la nouvelle règlementation européenne imposant, à compter du 1er janvier 2012, une taxe carbone aux compagnies aériennes dont les appareils ne seraient pas aux normes d’émission définies par l’UE.

Selon l’UE, les compagnies refusant la règlementation s’exposeraient à des sanctions pouvant aller de fortes amendes à la suspension de leurs vols. 16 compagnies chinoises effectuent des vols vers les pays de l’UE.

Le 6 juin le Directeur Général de l’IATA a accusé l’UE d’avoir fait cavalier seul, ignorant les règlementations internationales, créant un différend autour de mesures qui ne contribueront pas à réduire les émissions.

Il reste que pour des raisons d’organisation, de choix des itinéraires et de charge de carburant au décollage, les appareils des compagnies chinoises, chargés au maximum, consomment en général 15 à 20% de carburant de plus que leurs homologues occidentales, dont la charge au décollage est calculée avec précision en fonction des conditions de vol prévues.

• Les métaux lourds dans le collimateur du ministère de l’environnement.

Le 31 mai, le ministre de l’environnement Zhou Shengxian déclarait ouverte la guerre contre la pollution des métaux lourds. Cette fermeté nouvelle prévoit l’arrêt des usines et des projets polluants. Elle vient après une longue série d’empoisonnements au plomb survenus dans les provinces du Zhejiang, Canton, Anhui, Yunnan, Hubei et Hunan.

Le 12e Plan, dévoilé en mars, avait déjà fixé l’objectif d’une réduction de 15% d’ici 5 ans, calculée à compter de 2007, des rejets de métaux lourds. 14 provinces à forte concentration d’industries polluantes ont été ciblées : Mongolie, Jiangsu, Zhejiang, Jiangxi, Hunan, Henan, Hubei, Canton, Guangxi, Sichuan, Yunnan, Shaanxi, Gansu, Qinghai.

Le Plan prévoyait aussi de fermer les sites situés proches des sources d’eau potable et les usines incapables de réduire les rejets. Sont visées les fonderies, les mines illégales, les producteurs de batteries, les industries du cuir, les usines chimiques. Une aide publique est prévue pour moderniser les procédés de fonderie.

• La Chine en tête des émissions dioxyde et N°1 des énergies alternatives.

Selon une étude conduite par BP, les émissions de dioxyde de carbone chinoises ont augmenté de 10,4% en 2010, - représentant 25% des émissions mondiales -, dans un contexte où la hausse mondiale moyenne était de 5,9%, la plus rapide depuis 1969. La consommation chinoise de charbon a augmenté de 10,1%, comptant pour 48,2% de la consommation mondiale.

La hausse mondiale d’énergie hydroélectrique a été de 5,3%, dont 60% est attribuée à la Chine qui a fortement augmenté sa capacité. La Chine a également été, avec les Etats-Unis, la principale responsable de l’augmentation de l’énergie éolienne, les deux pays comptant pour 70% de la hausse mondiale.

 

 

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