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›› Chronique

Quand Xi Jinping visite Pyongyang, Trump arpente Panmunjom avec Kim

Après le coup de cymbale du sommet Trump – Kim de Singapour, le 12 juin 2018 et la rencontre écourtée de Hanoi, huit mois plus tard qui ne fut qu’un demi-échec, les ponts n’ayant jamais été coupés en dépit de quelques invectives échangées de part et d’autre et un net affaissement de l’enthousiasme initial, Kim Jong-un, le 3e héritier de la dynastie au pouvoir à Pyongyang depuis 1948 et Donald Trump, le président américain, iconoclaste, adepte du contrepied théâtral, se rencontraient sur la ligne de démarcation, au cœur de la mythique D.M.Z de Panmunjom.

Quel que soit l’angle de vue, l’événement dont la Maison Blanche dit qu’il a été improvisé par Trump grâce à l’entremise du président sud-coréen Moon Jae-in, constitue un symbole d’autant plus puissant que Kim Jong-un a répondu à une invitation présentée comme impromptue.

Plus encore, après s’être mis en scène comme le premier président des États-Unis en fonction foulant avec volubilité le territoire nord-coréen, Trump a, brisant un tabou vieux de 70 ans, invité Kim aux États-Unis.

Des analyses contrastées.

Pris de court, les analystes hésitèrent entre la prudente circonspection de Julian Borger, rédacteur en chef des Affaires internationales du Guardian et les critiques acerbes proférées par John Fuchs, ancien adjoint au sous-secrétaire d’État pour l’Asie de l’Est (2013 – 2016) accusant Trump de faire une politique dans le style des émissions de « TV réalités » .

Quand le deuxième dénonçait le manque de substance et l’unique préoccupation du « paraître électoral » de D. Trump, qu’il traita de « président bouffon », Borger, écrivait le même jour que la rencontre surprise avait une portée dépassant largement celle de la photo.

Pour le rédacteur en chef des Affaires internationales du Guardian, le spectacle qui vient de se jouer sur la scène de la D.M.Z avait certes un arrière-goût électoral. Il n’en reste pas moins que le tête-à-tête d’une heure entre les deux hommes qui, à l’été 2017, avaient porté au rouge vif la menace d’apocalypse, a permis de relancer les échanges des groupes de travail, 4 mois seulement après le malentendu de Hanoï à propos du rythme de relâchement des sanctions.

Au passage, l’explication de l’échec de Hanoï varie selon les parties. Les versions divergentes éclairent l’essentiel des actuelles dissonances sur le rythme de la dénucléarisation.

Divergences sur le sommet de Hanoï.

Selon Pékin et nombre d’analystes occidentaux, les désaccords portent sur le processus même de la dénucléarisation, Pyongyang proposant une démarche graduelle où le relâchement des sanctions serait ordonné par les étapes du démantèlement, quand Washington exigerait en préalable une dénucléarisation complète et vérifiable.

L’ambiguïté a probablement surgi à Hanoï du fait d’un désaccord interne à la Maison Blanche entre Bolton inflexible sur la démarche du « tout ou rien » et ceux, dont Trump, prêts à accepter une levée progressive des sanctions. Ajoutant au brouillard, l’explication officielle de Washington fut qu’en promettant la dénucléarisation du complexe de Yongbyon, 80 km au nord de Pyongyang, Kim aurait refusé d’en donner les détails.

*

Pour Kim Jong-un en tous cas, dont le pays s’approche à nouveau d’une crise alimentaire, la question des sanctions est d’autant plus importante qu’à son avènement il avait promis de soulager les souffrances de la société.
De plus, il n’est pas impossible que l’approche symbolique teintée de la rhétorique sentimentaliste de D. Trump touche un point sensible chez Kim : Celui qu’à terme il espère être auréolé de la gloire politique intérieure d’un traité de paix avec Washington.

En tous cas, dit Borger, l’initiative de Panmunjom a remis sur les rails les négociations opérationnelles pour la dénucléarisation, objectif dont il faut rappeler qu’il est également affiché par Pyongyang et Pékin, ce qui n’est pas rien.

Incertitudes

La suite reste encore enfermée dans le flou des conjectures. De lourdes inconnues et intentions cachées subsistent qui pourraient faire capoter le processus. Après le dégel avec Pyongyang replaçant clairement Pékin aux côtés de Kim Jong-un, il faut s’attendre que, désormais, le n°1 chinois suivi par Poutine, exigera toujours plus bruyamment la suspension au moins partielle des sanctions. L’insistance télescopera directement l’inflexibilité des plus intransigeants qui, à Washington, posent comme préalable la dénucléarisation complète et vérifiable.

La prochaine carte que le Xi Jinping garde dans sa manche – deuxième temps de la stratégie chinoise et irritant de première grandeur pour les caciques de l’Alliance conjointe Séoul – Washington -, est, on l’aura deviné, la question sensible de la présence des troupes américaines en Corée du sud.

Un sujet que la Maison Blanche refuse pour l’heure bec et ongles d’inclure dans la négociation. Autant dire que si aucune des parties ne bouge sur cette question, un accord pour un traité de paix n’est pas pour demain.

Pour l’heure cependant, la priorité est à la reprise des négociations. Le ton est clairement celui de l’apaisement qui spécule sur le rétablissement de la confiance, clé du processus et condition cependant encore très improbable de l’espoir que Kim accepte d’abandonner sa bombe contre un allègement des sanctions et la signature d’un traité de paix.

 

 

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