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›› Chronique

Retour sur la troublante psychose de l’origine fabriquée de la pandémie

Décidément, nombre d’interrogations restées sans réponses et la hantise d’un virus échappé d’un laboratoire à Wuhan n’en finissent pas de peser sur le régime. Le 29 mars, a été rendu public le rapport de 124 pages sur la mission d’enquête d’une équipe de chercheurs internationaux.

Ayant séjourné 27 jours en Chine et à Wuhan, elle était chargée d’éclaircir les causes et les conditions du déclenchement de l’épidémie globale qui dure depuis plus de 16 mois, ayant à la date de la rédaction de cette analyse, tué près de trois millions de personnes.

Alors que Pékin réfutait les accusations d’avoir retardé la mission quand bien même elle ne fut, sous d’incessants prétextes, seulement autorisée une année après l’explosion des cas à Wuhan, le rapport offre une longue collection de nouveaux détails, mais peu de réponses de fond sur l’origine de la maladie. Il ne dit rien non plus sur la disponibilité du régime à laisser continuer les enquêtes sur place par des experts indépendants.

Le 30 mars, 14 pays dont les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Tchécoslovaquie, le Danemark, les trois pays baltes, Israël, le Japon, la Norvège, la Corée du sud, la Slovénie et le Royaume Uni ont publié un communiqué où, tout en exprimant leur solidarité et leur soutien à l’OMS, ils firent état de leurs soucis communs.

Ces derniers avaient trait au retard imposé à la mission et à la nécessité d’une réaction plus rapide à l’avenir ; à la rareté des sources directes consultables ; à l’indépendance des experts et, par-dessus tout à la persistance d’un sentiment de défiance généré par les atermoiements de Pékin, laissant mal augurer d’une meilleure réaction globale à l’avenir.

Le directeur général de l’OMS lui-même, qui l’année dernière avait été accusé de connivence avec la Chine au moins jusqu’au 25 janvier 2021, relaya les observations de certains membres de la mission se plaignant de l’absence de données brutes. Lire : L’influence du parti communiste chinois sur l’OMS.

Doutes du Directeur de l’OMS et riposte chinoise.

Surtout à la surprise de nombre d’observateurs, Tedros Adhanom Ghebreyesus, en poste depuis juillet 2017, a exprimé un doute sur le sérieux des investigations pour déterminer l’origine du virus, revenant même sur l’hypothèse hautement sensible d’un accident dans un des laboratoires de sécurité biologique de Wuhan « Le rapport ne propose pas de conclusion suffisamment précise à propos d’une fuite de laboratoire ».

En réponse, le 31 mars, Liang Wannian, le co-directeur chinois de la mission, riposta selon le mode défini par l’appareil à la fin 2020, il fallait désormais chercher l’origine du virus hors de Chine.

« Si nous limitons l’étude de l’origine en Chine, nous commettons une faute de méthode scientifique. » (…) « Tous les experts s’accordent à dire que le lieu où le premier cas a été identifié n’est pas nécessairement celui où le virus est apparu. » (…)

Il ajoutait : « Le rapport de l’OMS a conclu que le virus ou un progéniteur de celui-ci était très probablement transporté par une chauve-souris, qui a infecté un autre animal ayant lui-même infecté un humain. Les chercheurs n’ont pas encore été en mesure de retracer la chauve-souris ou l’animal intermédiaire, mais la suspicion est tombée sur les habitats des chauves-souris dans le sud-ouest de la Chine au Yunnan ou à proximité de l’Asie du sud-est. »

« Par conséquent, nous estimons qu’il est nécessaire de mener l’étude de la source du virus dans un cadre mondial. »

Polémiques.

Le 31 mars Hua Chunying la porte-parole du Waijiaobu commença la conférence de presse journalière du ministère des Affaires étrangères par une longue introduction où elle affirmait que la Chine critiquée pour les abus contre les populations Ouïghour au Xinjiang et ciblée par des allégations sur l’origine artificielle du virus chez elle était victime du « conspiration stratégique ».

Après quoi, elle a contre attaqué en ciblant le laboratoire militaire de virologie de Fort Detrick dans le Maryland aux États-Unis. « Comme vous le savez les États-Unis pointent l’Institut de virologie de Wuhan, mais la situation de Fort Detrick reste entourée de mystère. Les États-Unis permettront-t-ils à des experts internationaux de s’y rendre ? ».

Puis développant une idée clairement conspirationniste spéculant sur la complicité des médias américains, « Il semble que les médias américains aient évité de couvrir cette question depuis le déclenchement de l’épidémie. En juin 2019, il y eut des rapports dans les médias américains à ce sujet, mais plus tard, nous n’en avons pratiquement pas vu. » (…)

(…) « Pourquoi donc ? Les médias américains ne sont-ils pas réputés pour aller au fond des choses ? Pourquoi s’ils sont si bons dans ce genre d’investigation, gardent-ils maintenant le silence ? »

L’accusation de Hua faisait référence à la fermeture d’un laboratoire pathogène de Detrick à l’été 2019 après qu’une inspection avait mis à jour un déficit d’étanchéité dans le système d’évacuation des eaux usées et des dysfonctionnements dans l’appareil de décontamination du laboratoire.

Au milieu des accusations réciproques jetant un brouillard sur l’origine de la pandémie, QuestionChine exhume quelques informations dont plus personne ne parle, mais qui circulaient au printemps 2020, alors que, déjà, s’échangeaient des rafales d’accusations réciproques. Tandis que D. Trump commençait à évoquer le « virus chinois », le discours officiel à Pékin montrait déjà du doigt un laboratoire militaire américain.

Puis, remettant en cause l’explication officielle situant le « patient zéro » au marché aux fruits de mer de Wuhan fermé par les autorités en janvier 2020, le Centre chinois de contrôle des maladies infectieuses expliqua fin mai, que l’origine du virus ne pouvait plus être déterminée avec certitude.

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Une conjonction d’informations troublantes.

A la fin de l’hiver 2020, alors que commençait à circuler l’hypothèse de la responsabilité du laboratoire P4 de Wuhan, la virologue chinoise Shi Zhengli, 石正丽, 57 ans, titulaire d’un doctorat de l’Université de Montpellier - baptisée « Dame chauve-souris 蝙蝠女 » attira sur elle les feux de l’actualité.

On la remarqua pour deux choses : 1) Le foisonnement de ses travaux menés sur la population des chiroptères du Yunnan ; 2) Le fait qu’elle ait publiquement exprimé l’angoisse qui l’avait un moment saisie, avant de démentir aussitôt, que l’épidémie aurait pu être provoquée par un accident lié à ses travaux.

Le fond de tableau des contrefeux immédiatement allumés par une série de missions chinoises partout dans le monde, s’appuyait sur l’argument que les communications ouvertes des virologues de Wuhan n’avaient jamais caché que, depuis l’épidémie de SRAS en 2003, ils travaillaient sur des souches de coronavirus.

La partie de l’image cependant restée dans l’ombre concernait la manipulation des pathogènes pour en augmenter la virulence. Le procédé dit « de gain-de-fonction », consiste à provoquer par une mutation expérimentale, une capacité virale augmentée facilitant les travaux de recherche.

La méthode présente l’avantage scientifique d’aider à mieux comprendre la transmissibilité, au cœur de la virologie. Elle est cependant controversée parce qu’elle augmente les risques en cas d’accident de laboratoire.

Un virus « augmenté » en laboratoire.

Plusieurs informations crédibles venant de virologues américains ayant coopéré avec des chercheurs chinois affirment que ces derniers avaient ouvertement participé à des recherches sur « le gain de fonctions » en partenariat avec des universités et des institutions américaines, avant que l’administration Obama les interdise.

Pour compléter ce bilan des indices préoccupants recoupant l’hypothèse d’un accident de laboratoire, il faut rappeler une série d’informations exhumées il y a une année de l’histoire des coopérations virologiques sino-américaines et aujourd’hui oubliées.

Rendues publiques au printemps 2020 par un article du Washington Post signé Josh Rugin, au moment de la plus grande virulence de l’épidémie en Chine, elles faisaient référence à des échanges ayant eu lieu trois ans plus tôt entre virologues américains et chinois par le canal de l’ambassade des États-Unis à Pékin.

Inquiétudes sur la sécurité.

A la fin 2017, la section scientifique de l’ambassade américaine à Pékin rendait compte par message à Washington que des chercheurs chinois travaillant activement sur la population des chauve-souris du Yunnan avaient eux-mêmes reconnu « un sérieux déficit de techniciens correctement formés. ».

Cette information à la fois capitale et insolite, est à mettre en relation avec le fait qu’à partir de 2015, les autorités chinoises tirèrent progressivement un trait sur la coopération avec la France ayant installé à Wuhan un laboratoire de haute sécurité biologique de niveau P4. Lire : P4 de Wuhan et accord France-Chine sur les maladies infectieuses. La France a-t-elle manqué de clairvoyance pendant plus de 15 ans ?

Plus encore, la modestie très professionnelle et très candide exprimée en 2017 par les virologues chinois qui se confièrent aux diplomates américains, renvoie à leurs premiers contacts tués dans l’œuf par Pékin avec leurs collègues du Centre de Contrôle des Maladies infectieuses d’Atlanta.

Pour ajouter à l’écheveau néfaste d’une situation ayant perturbé la coopération vertueuse des chercheurs, à l’époque, le paysage de la virologie aux États-Unis, était lui-même placé sous le poids des injonctions politiques de D. Trump qui, début 2020, niait encore la réalité de la menace aux États-Unis.

Dans le cadre de leurs échanges, les scientifiques de l’Ambassade américaine apprirent également que les Chinois « auraient » découvert et introduit dans le laboratoire P4 de Wuhan trois nouveaux virus ayant la caractéristique unique de contenir une protéine dite « spike » plus particulièrement capable de favoriser l’infection de cellules du poumon humain appelées « récepteurs ACE2 ».

Fin 2017 et début 2018, répondant à l’invitation des Chinois, les scientifiques de l’Ambassade, accompagnés d’une équipe d’experts se rendirent au laboratoire P4 Wuhan où ils rencontrèrent les virologues chinois dont Shi Zhengli.

Après quoi, ils rédigèrent deux messages à Washington insistant sur la nécessité d’aider les Chinois à améliorer la sécurité du laboratoire, précisant que les nouveaux virus découverts par Wuhan aggravaient les risques de contamination humaine.

Bien que le dernier message insistât sur les risques portés par la présence d’un groupe de virus dangereux pour les humains dans un laboratoire à la sécurité fragile, dont les virologues Chinois eux-mêmes disaient qu’il pourrait présenter des failles, l’alerte est restée lettre morte.

Pire encore, alors que les relations sino-américaines avaient viré au rouge vif, l’ambassade à Pékin perdit son accès au laboratoire.

*

On se gardera de conclure. Pour autant, depuis les 9 et 15 janvier 2020, dates officielles des deux premiers décès chinois, l’insistante question de l’origine véritable de la pandémie n’a pas été éclaircie.

Les doutes prirent même une résonance globale quand le Directeur Général de l’OMS lui-même a regretté les imprécisions du rapport sur ce point. On peut conjecturer qu’il a pesé ses mots.

Il est probable que son appréciation fut motivée par les informations croisées rapportant à la fois les inquiétudes des virologues chinois eux-mêmes sur la sécurité de leurs travaux et le foisonnement des expériences menées dans les laboratoires de haute sécurité, y compris celles ayant consisté à augmenter artificiellement la virulence des germes pathogènes.

 

 

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