Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Technologies - Energie

La station Tiangong entre dans sa phase finale

Le 29 avril, la Chine a procédé depuis Hainan au premier des onze lancements prévus pour mener à terme d’ici 2022, l’assemblage en orbite basse – moins de 400 km d’altitude - de sa station spatiale, baptisée « Tiangong, Palais Céleste – 天宫 - ».

D’un poids total de 66 tonnes, la station aura, une fois achevée, la taille de l’ancienne station russe MIR, soit un cinquième de la station internationale, à laquelle les astronautes chinois n’ont pas accès à la suite d’un décret du Congrès interdisant à la NASA de coopérer avec la Chine. Ce que nombre de scientifiques américains avaient à l’époque regretté (lire : Shenzhou 10 et Tiangong 1, dernier arrimage. Quelle coopération avec la Chine ?)

Au scepticisme des scientifiques qui regrettent l’ostracisme dans lequel est tenue la Chine, le Congrès oppose l’hostilité du régime de Pékin envers les États-Unis, la lourde implication de l’APL dans les programmes, ainsi que les risques de captation de technologies et de savoir-faire, mettant en danger la suprématie américaine acquise depuis 40 ans.

Le fait est que Pékin avance sur ses projets spatiaux (positionnement par satellites, exploration de la lune, mission vers mars et station spatiale), dont elle fait les emblèmes de sa puissance, avec une détermination sans faille. Lire : 天宫. La revanche céleste de la Chine.

L’assemblage final de Tiangong qui vient de commencer par une mise sur orbite d’un modules de 22,5 tonnes, avait été préparé par les expériences des prototypes Tiangong-1 et 2 et accompagné par des exercices d’arrimages, de sorties dans l’espace et de récupération des prototypes.

Pour tenir l’échéance de 2022, cette dernière phase devrait être conduite à un rythme de lancements exceptionnellement élevé. Une fois achevée, la station accueillera les astronautes des pays amis de la Chine – sans surprise, il n’y aura pas d’Américains - [1].

Il reste que les conditions du retour sur terre du corps central de la fusée Longue Marche 5B soulève quelques inquiétudes.

Inquiétudes sur la sécurité du retour sur terre.

Après un vol de 492 secondes le 29 avril et la mise en orbite des 22,5 tonnes du premier module de Tianhe, l’étage central de la fusée Longue Marche 5B, long d’une trentaine de mètres sur 5 m de diamètre et pesant plus de 20 tonnes, évolue à plus de 27 000 km/h.

Son altitude de vol sur une orbite passant au-dessus de New-York, Madrid, Pékin, le Chili et la Nouvelle-Zélande était initialement de 300 km. Elle se rapproche de la terre à mesure de son interaction avec l’atmosphère.

Alors que le 29 avril à Wenchang Wang Jue, le responsable du lancement affirmait que, depuis le tir inaugural de la fusée Longue Marche B, le 5 mai 2020, des « progrès avaient été réalisés », il n’a donné aucune précision sur le contrôle de son retour sur terre.

Déjà, le 15 mai 2020, Jim Bridenstine, l’administrateur de la NASA avait dénoncé les risques posés par le retour sur terre mal contrôlé de l’étage central de la LM 5-B, dont certains gros débris avaient atterri sur les côtes de l’Afrique, près du village de Mahounou en Côte d’Ivoire, 200 km au nord d’Abidjan.

Cette fois encore, la sécurité du retour ne paraît pas complètement assurée. A la vitesse où il évolue, même un changement minime de trajectoire provoqué par une secousse, modifiera considérablement le point de chute devenu imprévisible.

Compte-tenu de la taille de l’étage, certaines pièces survivront à la combustion de rentrée et pourraient impacter des zones habitées. Même si la probabilité la plus forte est qu’elles s’abiment en mer, le fait est que de sérieux doutes de sécurité existent.

Les Américains eux-mêmes en savent quelque chose. Le 11 juillet 1979, le retour mal contrôlé du laboratoire Skylab de la NASA pesant 76 tonnes, avait disséminé des débris dans l’océan indien et à l’ouest de l’Australie.

Plus récemment, le 26 mars dernier, le retour sur terre du deuxième étage de la fusée Falcon 9 tirée par SpaceX depuis le pas de tir de Floride pour mettre en orbite 60 satellites Starlink ne s’est pas non plus déroulé de façon sûre.

A la suite du dysfonctionnement d’un moteur de contrôle, le module de 3,7 tonnes s’était désintégré. Les images des débris enflammés du module au-dessus des rocheuses près de la frontière canadienne avaient circulé sur les réseaux sociaux.

Mise à jour le 9 mai :

Citant l’Agence Spatiale chinoise, Xinhua a annoncé que la fusée Longue March-5b était rentrée dans l’atmosphère le 9 mai à 10h24, heure de Pékin (02h24 GMT) dimanche. Aucun blessé ni dommage n’a été signalé.

L’agence a déclaré que les débris de la fusée de 18 tonnes - l’un des plus gros objets depuis des décennies à avoir plongé sans contrôle dans l’atmosphère -, s’était abimé dans l’océan Indien en un point situé à 72,47 ° de longitude Est et 2,65 ° de latitude Nord, soit environ à 500 nautiques au sud-ouest du Sri Lanka, et seulement 23 nautiques à l’ouest de l’archipel des Maldives.

Alors que Global Times rejetait les critiques occidentales accusant la Chine d’avoir manqué du sens des responsabilités, Bill Nelson, le Directeur de la NASA fustigeait la négligence de Pékin, qu’il accusait de n’avoir pas respecté les standards de sécurité concernant la retour sur terre de l’étage central de sa fusée LM-5B.

L’ISS en question, au milieu d’une profusion de projets.

A ce stade, aucune expérience américaine n’est répertoriée à bord de Tiangong, tandis que les incertitudes sur l’avenir de l’International Space Station – Russes et Américains ont annoncé vouloir l’abandonner -, laissent penser que, d’ici quelques années, la station chinoise pourrait être seule en lice.

Le flou sur l’avenir de l’ISS dont la disparition mettrait fin à plus de 20 ans de coopération vertueuse des humains – notamment Russes et Américains - dans l’espace, baigne dans une profusion d’annonces de projets spatiaux, développés par de nombreux acteurs étatiques ou privés.

Ils vont – la liste est loin d’être exhaustive - du projet Artemis par la NASA, en coopération avec l’Agence Spatiale européenne et des acteurs privés, visant à installer une base permanente sur la lune, aux projets de voyages commerciaux par une profusion de nouveaux acteurs, pour la plupart américains (Entre autres, SpaceX, Virgin Galactic, Blue Origin, Bigelow Aerospace) ;

Sur la liste se trouvent aussi en bonne place les projets de télescopes spatiaux européens et américains, la mission Gaganyaan, première mission spatiale habitée de l’Inde ; SLIM (Smart Lander for Investigating Moon), module lunaire développé par le Japon ; Rosalind Franklin (ancien ExoMars), robot, d’exploration de Mars construit par une coopération Russie – Europe (repoussée à 2022), et Mangalyaan 2, deuxième mission indienne d’exploration de Mars.

Enfin, signe que rien n’est arrêté, une nouvelle société américaine de vols spatiaux privée appelée Axiom Space a dans ses tiroirs sa propre station spatiale qu’elle prévoit d’abord de rattacher à l’ISS.

Axiom a prévu de connecter son premier module d’ici 2024. Quelques autres y seraient arrimés par la suite. L’idée est qu’une fois tous les modules attachés à l’ISS, ils seront complètement autonomes pour s’en détacher entre 2028 et 2030.

Note(s) :

[1En revanche, une liste de scientifiques russes, japonais, et indiens est déjà arrêtée. Elle sera complétée par des chercheurs de pays moins développés, du Kenya, du Mexique et du Pérou que l’Agence Spatiale Chinoise encourage à proposer des projets en liaison avec les pays ayant déjà une expérience spatiale.

Les travaux de recherche conduits à bord de la station dupliqueront ceux effectuées à bord de la station internationale. Ils vont de la mécanique des fluides et de l’astrophysique, à l’effet de la gravité et des radiations spatiales sur l’ADN des organismes humains par des chercheurs européens, en passant par le comportement du feu et le vaste champ de la biologie dans l’espace.

Un autre projet baptisé Polar-2, objet d’une coopération internationale pilotée par la Chine, pour l’instant encore dans les limbes, expérimentera un senseur déjà testé sur Tiangong-2 pour explorer la nature des « sursauts Gamma » que les astrophysiciens considèrent comme les explosions les plus violentes de l’Univers depuis le Big-Bang.


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

La nouvelle course à la lune, au cœur de la rivalité sino-américaine

A Dubaï, la Chine championne des renouvelables et du charbon

Les guerres de l’espace et des microprocesseurs, deux secteurs clé de la rivalité sino-américaine

Projets spatiaux chinois et rupture de la coopération avec l’Occident

Guerre froide sino-américaine. Pékin riposte aux embargos de Washington en interdisant le géant MICRON