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›› Editorial

Les convulsions de la croissance

Grâce à sa puissance financière incomparable, à son système politique centralisé et à ses banques d’Etat, vecteurs efficaces des investissements publics au profit des entreprises nationales et des grands projets d’infrastructure, la Chine a traversé la crise mondiale sans subir de secousses majeures.

La reprise est au rendez-vous, la production est à la hausse, les exportations ont repris, l’inflation est, pour l’heure, sous contrôle, et les investissements spéculatifs dans l’immobilier sinon arrêtés, du moins sévèrement encadrés. Enfin, les réserves de change accumulées atteignent 2440 milliards de dollars (+53% depuis 2008).

En revanche, le Régime, champion du pilotage macroéconomique et dont l’étonnante capacité de mobilisation s’était aussi exprimée lors du séisme du Qinghai, peine à répondre aux crises sociales qui secouent le pays depuis quelques semaines.

Il est vrai qu’il y a un an des consignes avaient été données aux juges et aux policiers pour plus de souplesse et de clémence. De même, la volonté du pouvoir de procéder à un rééquilibrage social, dont il fait sa priorité n’est pas en cause.

Il n’en reste pas moins que les relations qu’il entretient avec la société nouvelle, ses complexités, ses incertitudes, ses espoirs et ses exigences nées de l’urbanisation rapide, de la modernisation, de l’emprise d’internet, des téléphones portables et de l’émancipation d’une partie de la presse écrite, restent encore marquées par les anciens réflexes de gouvernement à coup de slogans politiques, appuyés par la censure, les pressions des syndicats officiels et la toute puissance de la police.

Psychose dans les écoles primaires

Après la série d’attaques dans les écoles primaires et maternelles, où 15 enfants ont été assassinés par des déséquilibrés dans six établissements scolaires - les attaques les plus meurtrières ont eu lieu le 23 mars dans le Fujian, perpétré par un médecin au chômage - (8 morts) et, le 11 mai, dans le Shaanxi par le propriétaire de l’école privée lui-même (7 morts) - , les médias d’État n’ont que très rarement rapporté les commentaires de Wen Jiabao sur la chaîne privée Phoenix télévision de Hong Kong, où le Premier Ministre expliquait que les « contradictions sociales » étaient à la racine des événements.

En revanche, ils ont largement insisté sur les mesures de sécurité spéciales prises dans les écoles. Début juin, le Quotidien du Peuple rapportait une déclaration de Hu Jintao, qui peut difficilement passer pour une analyse des causes profondes des incidents ou une innovation politique : « La société doit accorder de l’importance à la sécurité des écoliers et tout faire pour protéger les enfants de la Patrie ». En fait, dans le sillage des extraordinaires bouleversements en cours, surgissent des tensions auxquelles le Parti est mal préparé.

Et dans la région de Canton

Lors de la vague de suicides (au total 13 en quelques semaines) dans les usines du géant Taïwanais Foxconn - n°1 mondial de la sous-traitance électronique, 900 000 ouvriers en Chine, dont la moitié à Shenzhen, 2,4 milliards de $ de revenus annuels nets, 1,4 milliards de taxes payées à la municipalité -, qui fabrique des gadgets pour Apple, Sony, Dell, Nokia ou HP, les familles des victimes ont accusé les autorités locales, qui tirent leurs subsides des taxes payées par les entreprises, d’avoir tenté de camoufler des blessures suspectes sur les corps de certains suicidés.

« La justice ne nous a pas aidés » disent les parents de ces jeunes migrants qui, venus seuls de leur campagnes affronter sans préparation les pièges des grands centres urbains, n’ont pas supporté le déracinement et les conditions de leur nouvelle vie.

L’avocat Li Qiang, Directeur de l’ONG China Labor Watch, explique que même les 20% d’augmentation de salaires promis par la Direction du groupe, n’amélioreront le malaise qu’à la marge : « le rythme de travail est insupportable ; le management est inspiré de l’armée ; on attend des ouvriers qu’ils se comportent comme des machines ; l’ambiance de travail est stérile, personne ne se parle. Il sera très difficile de changer la culture d’entreprise d’une aussi société aussi gigantesque ».


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