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›› Technologies - Energie

Risques imminents de fragmentation du paysage global des hautes technologies

L’affaire Huawei, pointe émergée d’une rivalité globale.

En réalité, disent les auteurs, la focalisation américaine sur l’obligation d’espionnage imposée à Huawei par l’État chinois est un prétexte.

Ce dernier cache la méfiance envers tout le système chinois, rival économique, idéologique et militaire, dont la portée est considérablement plus vaste. Les conséquences et les ramifications d’une telle vision sont potentiellement sans fin.

Si, comme l’envisagent certains responsables de la sécurité américaine, le risque chinois ne peut pas être contourné ou « géré », affirmant au contraire qu’il est nécessaire de l’éliminer complètement en tenant systématiquement à distance toute technologie d’origine chinoise, alors l’entreprise serait d’une insondable complexité.

Qu’en serait-il des composants dans les équipements 5G des entreprises occidentales rivales ? Ou des ordinateurs portables chinois équipant des infrastructures sensibles telles que les raffineries ou les centrales électriques ? Et comment bloquer les connexions avec les serveurs « Cloud » utilisant les technologies chinoises ?

Les interconnexions des équipements sont déjà telles que le critère d’une fiabilité articulée aux seules rivalités nationales, ostracisant les technologies en fonction de leurs pays d’origine, risque de gripper les chaînes d’approvisionnement et d’installer des ruptures non seulement en Chine et aux États-Unis, mais aussi en Europe, en Russie en Corée et au Japon.

Psychose anti-chinoise.

La tendance à l’exclusion basée sur la nationalité commence d’ailleurs à se répandre. Jusqu’à présent l’ostracisme américain ne visait que les équipements Huawei et ZTE impliqués dans les réseaux de télécommunications mobiles. Depuis peu, la méfiance s’est élargie aux drones commerciaux du Chinois DJI et aux groupes chinois fabriquant des matériels numériques et des scans de sécurité utilisés dans les aéroports.

La suspicion qui devient une psychose, se dilate même aux wagons du métro de Washington où les experts américains de la sécurité craignent que la Chine installe des équipements espions permettant d’écouter les conversations des fonctionnaires se rendant à leur travail. Un nouveau décret est en préparation qui donnera au ministre du commerce le pouvoir de bloquer tout achat d’équipements fabriqués par un « pays rival ».

En théorie, la formulation justifierait aussi les restrictions imposées aux technologies en provenance de Russie, de Corée du Nord ou d’Iran. En réalité, le décret vise d’abord la Chine.

L’embargo américain prend aussi un sens politique. Les entreprises chinoises d’Intelligence artificielle ayant vendu leurs produits à des organismes de sécurité publique au Xinjiang pour surveiller et réprimer les Ouïghours ont également été mises sur la liste de l’embargo américain.

Mais la méfiance est historique. Réciproque et contagieuse, elle se renforce dans une spirale de surenchères, tandis que chacun sait bien que la Chine n’a pas, loin s’en faut, l’apanage de l’espionnage.

Méfiances et raidissements chinois.

En Chine, bien avant les doutes sur Huawei, on se méfiait des connexions entre les groupes américains et le gouvernement des États-Unis. En 1999, Pékin soupçonnait déjà la présence de logiciels espion dans Microsoft Windows.

En 2012, les révélations de Snowden confirmèrent la présence d’intrus ajoutés aux équipements américains destinés à la Chine. La même année, rendue publique par The Guardian et le Washington Post, la planète apprenait l’existence d’un programme de surveillance de masse par la NSA.

A cette époque, coïncidant avec l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping à la pensée politique très nationaliste, le gouvernement chinois lança une action visant à réduire la dépendance technologique chinoise aux équipements américains. La campagne visait IBM, Oracle et EMC (Dell) indiquant déjà une tendance à un ostracisme basé sur des critères nationaux. Dans la foulée, Alibaba supprima de ses équipements les équipements IBM et Oracle.

En 2020, ripostant à l’ostracisme américain, la défiance chinoise mit en place un programme national appelé « 安全 可靠 – anquan kekao - sûr et fiable » dont le but, coordonné par un nouveau « groupe dirigeant 领导小组 », est, à un horizon de 5 ans, de débarrasser des hautes technologies américaines, toutes les entreprises publiques et celles du secteur des nouvelles technologies.

Jusqu’à présent Huawei et les grands groupes chinois avaient tiré bénéfice de leur intégration dans les chaînes d’approvisionnement et les écosystèmes mondiaux à forte valeur ajoutée des secteurs clés des hautes-technologies, y compris le « cloud computing » et l’Intelligence artificielle.

Avec de toute évidence l’idée de réserver le développement de 5G aux États-Unis aux entreprises américaines, la stratégie de fermeture sans nuance adoptée par la Maison Blanche, « jette le bébé avec l’eau du bain ».

Au lieu de tenter un accommodement négocié assorti d’une surveillance stricte des installations chinoises, elle ferme la porte et installe une cloison qu’elle espère étanche. Sous la pression, les Européens impressionnés par les mises en garde de sécurité nationale, suivent.


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Par Jacqueline MEUNIER Le 2/03/2020 à 10h49

Risques imminents de fragmentation du paysage global des hautes technologies.

Tous les états qui font appel à des équipements de haute technologie non fabriqués sur leur territoire risquent autant l’espionnage et/ou le sabotage de leurs installations par les États-Unis que par la Chine.

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