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›› Chronique

L’Eurasie au cœur des rivalités entre Washington, Pékin, Moscou et Téhéran

Riposter aux projets de bouclier missiles et aux intrusions de l’OTAN.

A la mi-avril la Russie a annoncé la vente à la Chine 8 batteries de missiles S-400 pour la somme de 3 Mds de $. Pékin devient ainsi la première armée non russe à mettre en œuvre cet armement que Moscou n’avait jusqu’à présent pas exporté. L’exception faite pour la Chine donne à la vente un fort contenu stratégique. Le système complet est capable d’engager simultanément 36 cibles volant jusqu’à 2800 m/s à une altitude de 16 km.

Si on ajoute à ces stratégie sino-russes la vente en mars dernier à la Turquie, pays membre de l’OTAN, de missiles sol-air chinois haute altitude de type HQ-9 pour un prix de 4 Mds de $, à la suite d’un appel d’offres gagné contre le Patriot des Américains Raytheon et Lockheed Martin, le S-300 russe et l’Aster 30 franco-italien, on comprend qu’il s’agit non seulement d’une riposte systématique aux États-Unis, mais également de coups de boutoir contre l’OTAN dont la genèse remonte au milieu des années 90 et 2000.

En 2005, Pékin et Moscou inquiets du prosélytisme pro-démocratique de l’Alliance à leurs portes, avaient en effet réussi à persuader les pays de l’Organisation de Coopération de Shanghai où il faut rappeler que Téhéran bénéficie du statut d’observateur, à fixer une date limite pour le retrait des bases américaines d’Asie Centrale.

La stratégie anti-OTAN est clairement apparue lors de la conférence sur la sécurité internationale organisée par Moscou à la mi-avril à laquelle assistaient les généraux Hussein Dehghan et Chang Wenquan, ministres de la défense iranien et chinois. A cette occasion l’Iranien a clairement annoncé que Téhéran souhaitait que la Chine, l’Inde et la Russie membres de BRICS s’opposent à l’expansion vers l’Est de l’Alliance atlantique.

Sous la pression de Washington, Pékin, Moscou et Téhéran ripostent

Ainsi semble se dessiner une stratégie concertée entre Pékin, Moscou et Téhéran. Placés tous trois sous les pressions de Washington, la Chine, la Russie et l’Iran paraissent riposter aux projets de boucliers anti-balistiques du Pentagone et de l’OTAN en Europe et en Asie de l’Est dont ni Moscou ni Pékin ne veulent.

La fin de non recevoir s’exprime au travers des récents et très médiatisés transferts de missiles sol-air russes vers l’Iran et la Chine à quoi s’ajoutent les étonnantes ventes de HQ-9 chinois à la Turquie. Accompagnant les initiatives des « routes de la soie » vers l’Asie Centrale, l’Iran et l’Europe de l’Est, le jeu des missiles chinois et russes dessine une stratégie d’intégration de la partie orientale de l’Eurasie où la Russie est tournée vers l’Asie, concurrente de celle de Washington à laquelle Moscou et Pékin associent Téhéran.

Tel est l’arrière plan des défilés de la victoire à Moscou et Pékin qui en dépit des démentis semblent un retour à la guerre froide puisque déjà l’épisode moscovite qui présentera 16 000 hommes, 150 aéronefs et 200 blindés sera, pour cause de crise ukrainienne, boycotté par les chefs d’États occidentaux. La réplique de Pékin en septembre pourrait être un casse-tête encore plus difficile à résoudre puisque s’il s’agit de célébrer la victoire contre le Japon, on voit mal comment les États-Unis qui en furent les principaux artisans pourraient en être absents.

Le casse-tête du défilé chinois

Mais l’évolution de la perception de la menace chinoise a changé la donne. Le Japon, ancien ennemi durement combattu par les « boys » de « l’US Army » est resté pour Pékin un adversaire potentiel à qui on ne cesse de rappeler ses exactions de la guerre, tandis que lui-même, inquiet de la montée en puissance chinoise est devenu le principal allié stratégique des États-Unis.

Difficulté supplémentaire pour Pékin : à l’occasion de la visite officielle de Shinzo Abe à Washington à la fin avril, Tokyo et le Pentagone viennent, après le premier ajustement en 1997, de mettre à jour les termes de leur coopération de défense où désormais les armées japonaises pourront s’impliquer partout dans le monde aux côtés des unités militaires américaines.

L’ajustement considéré par les observateurs chinois et coréens comme un pas significatif vers l’abandon de la constitution pacifique de l’archipel par Tokyo, est considéré par Pékin comme un initiative inamicale de Washington destinée à freiner son influence stratégique dans le Pacifique occidental.

Dans la liste des contentieux sino-américains, le rapprochement du Pentagone avec les Forces d’Auto-défense japonaises s’ajoute aux rivalités stratégiques en mer de Chine du sud et à propos de Taïwan, à quoi se grefferont d’autres différends encore dans les limbes mais qui ne manqueront pas de s’aggraver comme la compétition pour la maîtrise de l’espace extra-terrestre et le contrôle de la sécurité des satellites, clé de la suprématie technologique militaire américaine.

*

En attendant, les postures arc-boutées autour des démonstrations de forces maquillées en commémorations pour la paix, la stratégie des missiles chinois et russes auxquelles ripostent les sanctions et le boycott occidental de la parade de Moscou risquent de sérieusement fragiliser le plan d’ouverture américain destiné à bloquer la prolifération nucléaire militaire de Téhéran, principal objet de la manœuvre d’Obama en Iran.

Sans compter que l’invitation de Kim Jong Un à Moscou, résultat d’un autre défi de Poutine à la Maison Blanche, ne facilitera pas les stratégies américaines de dénucléarisation de la péninsule coréenne. Une consolation cependant pour Obama, il n’est pas certain que la présence à Moscou du petit fils de Kin Il Sung contre qui la Chine nourrit de sérieux contentieux, soit tout à fait du goût de Xi jinping.


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