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La décision du tribunal administratif de Stockholm de lever temporairement les restrictions de sécurité imposées à Huawei a conduit le régulateur suédois des télécom à mettre en sommeil la procédure d’enchères pour l’attribution des canaux de fréquence 5G qui devait commencer le 10 novembre.
Le jugement qui n’a pas statué sur le fond, fait suite à une procédure d’appel lancée par Huawei le 6 novembre par un rapport de plus de 70 pages. Le groupe chinois y faisait valoir qu’il était « une société privée opérant dans le monde entier, n’ayant jamais eu d’incidents de cyber sécurité graves au cours des 20 dernières années d’activité en Suède ». Il assurait qu’il « ne représenterait aucune menace pour la cyber sécurité suédoise. ».
Sur le fond, le régulateur devra apporter au tribunal la preuve que Huawei constitue un risque pour la sécurité nationale suédoise. Le jugement exigeant des pouvoirs publics d’un pays européen qu’ils argumentent dans une procédure légale leurs accusations contre Huawei, s’inscrit à contre-courant d’une vague de défiance générale contre le groupe chinois.
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Le 9 novembre, le tribunal administratif de Stockholm a temporairement annulé la condition de licence frappant Huawei pour l’allocation des fréquences de la bande 3,5 à 2,3 GHz, essentielle pour la haute capacité de transmissions nécessaire à la 5G.
Invoquant des raisons de sécurité nationale, la condition avait été introduite le mois dernier par le régulateur du ministère des Postes et Télécommunication suédois (PTS). Les restrictions s’appuyaient sur la nouvelle loi entrée en vigueur en janvier 2020, après avis des forces armées et de police, imposant que les nouveaux équipements utilisés « ne nuisent pas à la sécurité de la Suède ».
La mesure s’inscrivait dans le contexte général d’interdiction des équipements Huawei et ZTE assortie de l’obligation imposée aux opérateurs de démonter ceux déjà installés d’ici janvier 2025.
Le 6 novembre, par un document de plus de 70 pages, le groupe chinois avait fait appel des réserves de PTS qu’il jugeait « incorrectes au fond » et dont il disait qu’elles « manquaient de base légale, violaient les droits de l’homme et contrevenaient aux lois européennes ».
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Mais l’affaire des enchères de fréquences n’est pas close. Le jugement d’attente n’a pas statué sur le fond et PTS est maintenant tenu d’apporter des preuves que l’attribution des canaux de fréquences à Huawei constituerait un risque de sécurité.
Dans l’ambiance de défiance contre Huawei, la décision d’attente qui fait peser la charge de la preuve sur PTS n’est certes pas une victoire décisive de Huawei. Mais elle constitue une éclaircie dans la succession de revers ayant frappé le groupe en 2020 dans la guerre impitoyable que lui livre Washington.
Alors qu’en Suède, Huawei est en compétition directe avec Ericsson et Nokia dont les équipements sont beaucoup plus chers, la pugnacité juridique du groupe chinois dont les équipements sont de bonne qualité, renvoie à ses soupçons que les accusations d’espionnage ont une motivation commerciale destinée à compenser ses avantages de prix.
D’ores et déjà les restrictions contre Huawei profitent aux deux européens, dont les affaires étaient jusqu’ici moins florissantes que celles du Chinois.
Il reste qu’en Europe, Huawei est toujours dans la course. S’il est par exemple exact qu’Orange-France utilise Nokia et Ericsson pour son réseau 5G et que Londres a interdit Huawei, imposant même à ses opérateurs de démonter ses composants, le Chinois est toujours présent en Espagne, en Belgique, en Pologne et en Roumanie. En Allemagne, il a passé un contrat 5G avec Telefonica.
Quant au palmarès 5G global des trois concurrents, il est serré. Fin janvier 2020, Ericsson était en tête avec 79 contrats, suivi par Huawei avec 65 projets en cours. Nokia ferme la marche, mais non loin derrière Huawei avec 63 contrats.