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›› Technologies - Energie

L’extraordinaire défi du nucléaire en Chine

La sûreté au centre des discours. Le poids des lobbies.

La classe politique ayant pris conscience que l’engagement dans le nucléaire civil doit désormais être exemplaire dans la maîtrise des risques d’accident, en Chine tous les articles et prises de position renvoient ostensiblement aux efforts consentis depuis un an par le pouvoir pour rehausser la sûreté des centrales et harmoniser les règles et procédures de surveillance, d’estimation et de préventions des risques, ainsi que les protocoles de réaction aux catastrophes.

A quoi s’ajoutent les efforts de R&D et la coopération avec l’étranger pour acquérir de nouvelles technologies plus sûres et les « siniser ».

Remise à plat après Fukushima

Il y a un an, après la catastrophe de Fukushima du 11 mars 2011, le Premier Ministre avait ordonné la suspension du programme de construction de centrales nucléaires et imposé une évaluation de sécurité des 14 réacteurs en service.

Selon Wang Yuqing, ancien directeur de l’Agence de Sécurité Nucléaire (ASN) qui, le 8 mars dernier, parlait en marge de la CCPPC, les travaux sur les 10 centrales nucléaires approuvées, dont la construction avait été arrêtée en 2011, allaient reprendre bientôt. La décision ferait suite à l’approbation par le Conseil des Affaires d’état d’un plan national de sûreté nucléaire, en gestation depuis un an.

Simultanément on apprenait que la Commission Nationale pour l’Energie (CNE) avait lancé 13 projets de recherche pour améliorer les mécanismes de réaction d’urgence en cas de désastre nucléaire. Ces derniers, conduits sous l’égide de l’Université Qinghua, par la China National Nuclear Corporation (CNNC), la China Guangdong Nuclear Power Holding Corporation et l’Institut pour les Nouvelles Technologies et les Technologies Nucléaires, devraient être menés à terme en 2013.

Enfin, le 10 mars, lors d’un séminaire sur l’accident de Fukushima réunissant des experts Chinois, Taïwanais, Français et Américains, organisé à la City University de Hong Kong, Ren Junsheng, expert en sûreté nucléaire au ministère de l’environnement chinois, faisant le point des contrôles effectués par la Chine pour le choix des sites, la résistance aux secousses sismiques et aux inondations, ainsi que des capacités de réactions d’urgence aux catastrophes.

L’élan nucléaire n’a pas faibli

Mais sa conclusion trahissait le retour en force des préoccupations industrielles ainsi que les choix, pour l’heure irréversibles, de la Direction chinoise. Elle soulignait en effet que « le nucléaire, énergie propre, restait important pour la stratégie industrielle de la Chine ». Il ajoutait que « l’industrie nucléaire chinois serait en mesure d’atteindre une capacité installée de 40 millions de kilowatts en 2015 et de 70 millions en 2020 ».

La capacité actuelle de la Chine étant de 11 millions de kilowatts avec 14 réacteurs en service, l’objectif fixé par Ren Junsheng d’atteindre une capacité de 70 millions de kilowatts en 2020, supposerait la mise en service de 40 à 50 réacteurs en 8 ans. A l’horizon 2050, la capacité installée envisagée est de 400 millions de kilowatts ce qui exigerait la construction de 150 réacteurs (rappelons que la capacité de la France est de 63 millions de kilowatts, celle des Etats-Unis de 100 millions de kilowatts).

Dans les premières phases les objectifs définis par le « Plan à long terme pour le développement de l’énergie nucléaire », rendu public le 22 mars 2006, est de porter la part du nucléaire dans la production d’électricité (aujourd’hui moins de 2%) à 6% en 2020 et à 16% en 2030.

La filière chinoise explose. Un marché incontournable et risqué.

Les défis liés à une planification de cette ampleur, qui constitue par ailleurs une force d’attraction irrépressible pour toutes les industries nucléaires de la planète en concurrence sur le marché chinois (France, Canada, Russie, Etats-Unis), sont considérables.

Ils se posent dans un contexte général où l’accident de Fukushima a ébranlé les convictions des filières nucléaires dans le monde, dont l’image est de plus en plus porteuse de risques majeurs, tandis que la concurrence des intérêts corporatistes de la planète suscite de très dangereuses surenchères, où l’attrait de vastes profits risque de faire passer les considérations de sûreté à l’arrière plan.

En Chine, s’efforçant de consolider leurs lucratives positions de pouvoir, les lobbies nucléaires dont les chefs de file, liés au Parti Communiste Chinois, sont la CNNC et la China Guangdong Nuclear Power Corporation (CGNPC), recherchent activement l’indépendance des savoir-faire et des technologies par le truchement de captations au travers des coopérations avec les grands du nucléaire mondial, dont les Français AREVA et EDF.

Les mêmes intérêts corporatistes chinois, confondus avec les priorités nationales, visent aussi à augmenter leur part du marché mondial, en concurrence directe avec ceux des lobbies internationaux qui leur transfèrent la technologie dans l’espoir de conforter leur part de marché en Chine.

C’est dans ce contexte général, où s’affrontent les logiques industrielles et commerciales, forcément contraintes par les nouveaux défis de sûreté, que s’inscrivent les initiatives franco-chinoises pour développer une coopération visant à construire à moindre coût des réacteurs de 3e génération en Chine et à les exporter conjointement sur le marché mondial. Pour l’industrie nucléaire française cette coopération constitue aussi un gage du maintien à flot de la filière et de la préservation de sa maîtrise technologique.


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