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Le dessalement de l’eau de mer et le défi de l’eau potable

Le dessalement une solution d’urgence « non durable ».

Fin 2013, 103 usines de dessalement étaient opérationnelles en Chine. La carte montre les points moyens des sites : en vert les usines en fonctionnement avec une forte concentration dans la conurbation Pékin - Tianjin, autour du golfe de Bohai et sur la cote sud du Shandong. Les autres étant réparties le long des cotes du Zhejiang, du Fujian et du Guangdong. En rouge les usines en construction. En jaune les projets de déviation sud nord.

Le dessalement de l’eau de mer est devenue une des solutions du gouvernement pour faire face au stress hydrique. Ayant admis que les projets de diversion seront insuffisants pour combler les pénuries d’eau au Nord du Yangzi, Pékin a prévu d’augmenter les capacités de dessalement de 800 000 tonnes/jour aujourd’hui à 3 millions de tonnes en 2020. Mais nombre d’experts chinois et étrangers pointent du doigt les coûts en énergie et, partant, en émissions polluantes des centrales thermiques dont la multiplication sera aggravée par le choix de dessalement.

Un mouvement global et des technologies nouvelles.

Le choix chinois s’inscrit dans un mouvement global qui augmente la quantité d’eau de mer traitée de 15% par an, au point qu’en 2016 la production mondiale d’eau dessalée atteindra 38 milliards de m3, soit un doublement depuis 2008. L’élan s’accompagne d’innovations technologiques importantes visant à réduire la consommation d’énergie des anciennes techniques de distillation. Par ailleurs, l’utilisation de la méthode dite d’osmose inversée a ainsi permis de diviser les coûts par deux. Elle présente cependant l’inconvénient d’augmenter très notablement la salinité de l’eau de mer environnante.

En Chine plus d’une centaines d’usines de dessalement fonctionnent déjà, de nombreuses autres sont en construction. Leurs centres de gravité sont la région de Qingdao, la connurbation Tianjin – Pékin – Tangshan, et les cotes des provinces du Zhejiang, du Fujian et de Canton. Les progrès technologiques et l’augmentation de la capacité sont rapides, accompagnés par une diminution des coûts de 20% sur fond de bataille pour capter les technologies des groupes étrangers par le truchement de centres de recherche délocalisés en Chine. (85% des brevets et 50% des unités en construction sont aujourd’hui contrôlés par des groupes non Chinois).

Pour ne citer que quelques exemples des progrès qui accompagnent la rémanence des groupes étrangers on citera l’usine de Baijiang de Tianjin qui a coûté 26 Mds de RMB (3,6 Mds €). Utilisant l’ancienne technique de distillation avec cependant des dispositifs modernes destinés à réduire la consommation en énergie et la pollution, elle a été en partie construite en Israël puis remontée en Chine. Dotée de technologies anti-pollution sophistiquées elle produit 10 000 tonnes d’eau dessalée par jour.

En revanche, les usines de Dagang (Tianjin), Caofeidian (80 km au sud de Tangshan) et de Qingdao respectivement construites par le Singapourien Hyflux, le Norvégien Aqualyng et l’Espagnol Abengoa utilisent la technique de l’osmose inversée plus économique et moins vorace en énergie. Au total la capacité de production de la centaine de sites construits en Chine devrait à la fin 2015 approcher les 2 millions de tonnes/jour.

La rentabilité en question.

Le choix du dessalement n’est cependant pas sans problèmes. Une récente étude du World Resources Institute montrait que la technique consommait 10 fois plus d’énergie que le recyclage des eaux usées ; à la longue elle coûterait même plus cher que les projets de diversion sud-nord. Couplée sans précaution avec le développement des centrales au charbon, elle serait un facteur aggravant de la pollution atmosphérique.

A ces inconvénients s’ajoutent ceux de la rentabilité dont le souci est de plus en plus au cœur des préoccupations de Bureau Politique. Subventionnée par le gouvernement l’eau produite par le dessalement coûte deux fois plus cher que son prix de vente contrôlé par l’État. Sans compter que, lancée plusieurs années avant les décisions de restructuration du 18e Congrès, la planification des usines de dessalement appuyée par des investissements pilotés par la Commission Nationale pour la Réforme et Développement qui dépassent 30 Mds de $ est en contradiction avec les mesures de restriction des crédits publics.

La prudence succède aux engouements.

Après un engouement initial, l’ambiance est aujourd’hui à la prudence. Favorisé à l’origine par les investissements publics qui attisaient les convoitises, à quoi s’ajoutaient l’attrait du nouveau marché des membranes pour la technique de l’osmose inversée et les délocalisations vers la Chine des centres R&D de quelques grands groupes étrangers, l’élan a faibli. Les raisons en sont d’abord la persistance de coûts prohibitifs de l’eau à la production en dépit des baisses permises par les nouvelles techniques et la réduction des soutiens publics décidée par l’actuel Bureau Politique engagé dans une vaste restructuration de l’appareil industriel et de l’économie où se pose la question de la rationalisation des prix.

Le dilemme place les investisseurs étrangers sous la pression des pouvoirs publics. Ces derniers pourraient exiger une réduction des coûts commercialement insupportable, sans compter que le risque existe pour les opérateurs non chinois d’être ciblés par la campagne contre les monopoles, principal moyen utilisé par l’administration pour corriger le déséquilibre provoqué sur le marché chinois par les avantages technologiques des groupes étrangers. Mais au-delà des choix commerciaux guidés ou non par l’habileté et l’opportunisme des opérateurs, reste la question de la validité du choix technologique.

Le débat n’est pas clos dans un contexte où la Chine, qui se rapprochera de l’Espagne en 2020 avec 3 millions de m3/jour d’eau dessalée, est encore loin derrière l’Arabie Saoudite et les Émirats qui à eux deux produisent 16 millions de m3/jour. Une des conclusions de l’étude citée plus haut réalisée par World Ressources Institute mérite attention :

« Aussi longtemps que le rendement énergétique du dessalement sera aussi faible, il ne devrait être utilisé qu’en cas d’urgence pour combler des pénuries momentanées. La solution au stress hydrique en Chine doit en priorité s’appuyer sur des stratégies d’économie et de recyclages des eaux usées plus efficaces. »


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Par terminet schuppon Le 17/03/2015 à 21h13

Le dessalement de l’eau de mer et le défi de l’eau potable.

article intéressant, bien documente.le dessalement de l’eau de mer coute cher, et produit des sels naturels et chimiques, que l’on ne sait pas , ou ne voulons pas traiter.. resultat, tout se retrouve en mer, ou la les degats sont considérables pour la faune et la flore, qui avaient déjà la pollution industrielle.
des solutions existent pourtant.
cordialement
schuppon de beijing

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