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›› Technologies - Energie

Premiers pas hésitants des compagnies privées dans l’espace

La fusée Hyperbola 1S de iSpace (hauteur 8,4 m/poids 4,6 t) testée lors d’un vol suborbital en avril dernier à Hainan.


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Le 5 septembre, une fusée baptisée SQX-1Z lancée du pas de tir de Jiuquan par la compagnie privée chinoise iSpace (en Chinois 星际荣耀- xingji rongyao - « Gloire cosmique » -) a mis en orbite 3 microsatellites de la taille d’une boîte à chaussures. Deux d’entre eux resteront dans l’espace, tandis que le 3e sera récupéré.

En avril iSpace avait testé à partir du centre de Hainan, un vol suborbital avec la fusée Hyperbola-1S (8,4 m/4,6 tonnes) dont le moteur serait dérivé des missiles balistiques de la 2e artillerie de l’APL DF-11 ou DF-15 ; en septembre un autre essai a été effectué avec le modèle Hyperbola-1Z aux ailerons modifiés.

Les tests seraient la première étape du développement d’une fusée de 20 m dont le lancement serait prévu en 2019, capable d’emporter une charge de 300 kg en orbite basse. L’objectif serait Hyperbola-3 une fusée capable d’emporter en 2021 une charge de 2 tonnes.

En mai la « start-up » spatiale concurrente One Space (en Chinois 零壹 空間 - Lingyi kongjian-) avait aussi lancé de Jiuquan une petite fusée de 9,14 m baptisée « Etoile des deux fleuves –重庆两江之星 – nom de code « OS-X »- qui avait atteint une altitude de 40 km avant de retomber sur terre.

Ces premiers pas marquent la naissance de l’industrie spatiale privée en Chine où les « start-up » concurrentes se lancent dans une compétition commerciale et technologique effrénée dont le départ avait été donné en 2014 quand le gouvernement autorisa les investissements privés dans le secteur, jusque là contrôlé par l’armée.

Mais dans un contexte où les informations de première main sont confuses, parfois contradictoires, il convient de garder ses distances avec les dithyrambes médiatiques sur la véritable nature privée des acteurs et leurs déclarations dont il est difficile de démêler la réalité de leurs capacités techniques de la propagande et de l’autopromotion.

Dans cette phase de démarrage où chacun rêve de concurrencer l’Américain Space X d’Elon Musk et ses Falcon et où, à l’évidence, les financements privés sont insuffisants, il est probable que tous enjolivent leurs performances et utilisent des équipements provenant du parc des fusées de l’aérospatiale d’État.

Au printemps dernier, Xi Zhang, ingénieur aérospatial, professeur à l’Université de Hong Kong avait exprimé des doutes sur l’autonomie et les capacités technologiques de One Space qui dit vouloir construire à terme une vingtaine de fusées OS-X capables de mettre en orbite une charge de 100 kg à 800 km de la terre.

Compte tenu du court délai de mise au point de la fusé - seulement une année -, le professeur Xi suspectait une aide publique substantielle. Le fait est qu’en 2017, la société avait signé un accord pour établir une base industrielle et un centre de R&D avec la branche investissements du groupe public Chongqing Liangjiang Aviation Industry - ayant fabriqué sous licence les avions suisses Pilatus de 2013 à 2016, avant que Pilatus se retire en 2017, submergé par des obstacles politico-administratifs.

L’analyse du professeur Xi renvoie aux sérieux doutes que le régime chinois laisse libre cours à des privés dans un secteur aussi stratégique que l’espace.

(lire : Pilatus va fermer sa coentreprise en Chine.)

Compétition féroce et financements insuffisants.

Hu Zhenyu, PDG de Linkspace présente ses modèles de fusées récupérables Xin Gan Xian 1 à 3. XGX 1 (hauteur 20m, poids 33 t) dotée d’un système d’atterrissage similaire à celui de la fusée Falcon 9, est capable de mettre en orbite géosynchrone des satellites de 200 kg. Le prix d’un lancement est de 4,5 millions de $.


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Alors que les informations ouvertes sur le financement des sociétés sont minces, il faut constater que les sommes publiquement déclarées - OneSpace a dévoilé 78 millions de $ - sont notoirement insuffisantes pour le développement d’une industrie spatiale privée, autonome.

iSpace, fait état de 90 millions de $ investis par une série d’acteurs privés en 2018, après avoir levé à sa création en 2016, 600 millions grâce à la filiale chinoise du gestionnaire de fonds américain Matrix Partners spécialisé dans les opérations capital risque dans le secteur des hautes technologies. Dans cette opération, il avait rallié Baidu Inc, Didi Chuxing, Citic Juxin Co., Fosun Group, Shunwei Capital Partners et Shuairan Investment Management.

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La 3e start-up engagée dans cette course au marché de l’espace et des lanceurs, méritant attention est Beijing LandSpace Technology Corporation Limited (LandSpace) – 北京 蓝箭 空间 科技 有限 公司 – Beijing Lanjian Kongjian keji -. Créée en 2015, la société qui dit avoir levé 35 millions de $ d’investissements privés, peut se prévaloir d’avoir testé avec succès en mars 2018 une fusée Phoenix de 10 tonnes équipée d’un moteur à carburant mixte oxygène liquide et méthane.

En avril, au symposium de l’espace de Harbin, LandSpace a annoncé la mise au point des fusées TQ-2 et ZQ-2 de 70 tonnes également à carburant mixte ayant la capacité de mettre 1,5 tonnes en orbite synchrone à 500 km ou 3,6 tonnes en orbite basse.

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4e en lice, Linkspace – 翎客航天 – Ling Ke Hang Tian - se présente elle-même comme le premier « lanceur de fusées » privé en Chine. Basée à Pékin, elle a été fondée en 2014 par Hu Zhenyu (Université de technologies de Chine du sud – Canton -), Yan Chengyi (Qinghua) et Wu Xiaofei, ayant 6 ans d’expérience comme ingénieur mécanicien à Shenzhen.

En 2013, la compagnie a testé un vol suborbital d’une fusée avec une charge de 50 kg. Aujourd’hui, elle développe la technique de fusées récupérables dont la première, capable d’un atterrissage vertical, a été testée en 2016. L’année suivante 3 autres modèles ont été testés au Shandong.

Le modèle Xin Gan Xian 1 新 干 线 一 号 à carburant liquide, haute de 20 m, pesant 32 tonnes pouvant emporter une charge de 200 kg est destiné à explorer le marché du transport par fusée récupérable à l’imitation de SpaceX. Elle comporte un premier étage réutilisable doté de 4 moteurs à carburant mixte – oxygène liquide/kérosène – dont les tests moteurs ont été achevés fin 2017. Un premier lancement en orbite synchrone est prévu en 2020.

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Enfin, ExPace, basée à Wuhan se dit privée mais est en réalité une filiale du géant China Aerospace Science & Industry Company – 中国航天 科工 集团 - CASIC (44 Mds de $ d’actifs, 145 000 employés dont l’ADN est la panoplie des missiles destinés à le 2e artillerie de l’APL, mais dont les vastes activités vont de la construction d’infrastructures aux fusées spatiales en passant par les équipements télécom, les ordinateurs, et l’automobile.

Créée en 2016, ExPace dont le nom est une copie mimétique de SpaceX travaille sur le créneau du lancement commercial de microsatellites avec une fusée Kuaizhou (快舟) à carburant solide dérivée des missiles de la CASIC.

A l’avenir, CASIC dont les progrès dans le domaine des microsatellites de télécom sont rapides [1], et ExPace ont d’autres objectifs.

Une hypothèse de la presse spécialisée suggère un projet identique à celui de la navette spatiale britannique Skylon à l’hydrogène liquide propulsée dans l’espace après une première phase atmosphérique.

Point de situation.

La photo montre le modèle Kuaizhou (KZ-1) développé par Expace sous le patronage de la CASIC. Son PDG, Zhang Di est aussi le n°2 de la 4e académie de la CASIC. Dérivées de la fusée à la base du système de défense antimissile chinois, la série KZ est propulsée par un moteur à carburant solide. Le modèle KZ-11 pourra emporter une charge de 1,5 tonne.


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A ce jour, les premiers pas notables des « start-up » chinoises de l’espace dont la nature « privée » n’est cependant pas encore tout à fait avérée sont (source Caixin) :

One Space : 1) Décembre 2017, test d’un moteur à carburant solide ; 2) Janvier 2018 : Test d’un moteur à carburant liquide ; 3) Mai 2018 : Lancement de la fusée OS-X 重庆两江之星.

iSpace : 1) Mai 2018, lancement de la fusée Hyperbola 1-S ; 2)5 septembre 2018, mise en orbite de 3 microsatellites par la fusée SQX-1Z.

Landspace : Mars 2018 : Test d’une fusée Phoenix de 10 tonnes à carburant mixte.

Linkspace : 1) 2013 test suborbital avec 50 kg de charge utile ; 2) 2016, test d’une navette récupérable ; 3) Tests de 3 fusées récupérables.

Note(s) :

[1La CASIC dont la contribution au programme spatial chinois est essentielle (vols habités et exploration de la lune) a récemment fait des progrès rapides dans une série de mini-projets spatiaux.

Notons : Réseaux de télécom déployables en urgence à base de drones à haute altitude propulsés à l’énergie solaire (Feiyun 飞)云) ou d’aéronefs stratosphériques sans pilote (Kuaiyun 快运);

Nébuleuse de 48 microsatellites de communication et 9 micro-relais en orbite basse déployés d’ici 2020 destinés à relayer les téléphones portables (Xingyun - 星云);

156 microsatellites télécom en orbite à 1000 km d’altitude d’ici 2022 (Hongyun - 红云)


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