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›› Politique intérieure

Les grandes ambitions du 5e Plenum. Entre « Rêve chinois » et obstacles

NOTE de CONTEXTE

Les dernières étapes de la prise de conscience écologique chinoise.

En mars dernier la journaliste de CCTV avait diffusé un documentaire sur la pollution de l’air à Pékin où elle avait répété : « je ne veux plus vivre comme ça ». Le Parti est conscient de ce rejet et prend des mesures.

Au printemps, la censure du documentaire de Chai Jing sur la pollution de l’air pouvait laisser croire au triomphe des conservateurs rassemblés autour de la position traditionnelle des pays émergents dont la Chine s’était fait le porte parole au sommet de Copenhague. Il n’en est rien. Tout porte en effet à croire que la décision intempestive d’effacer du net une vidéo qui avait déjà été vue par plusieurs centaines de millions d’internautes, a plutôt été motivée par la crainte que le sujet ne fédère trop de mécontents contre le Parti (Lire notre article La longue marche chinoise vers la conscience écologique).

En réalité, la préoccupation écologique du pouvoir ne peut pas être sous estimée. Même si beaucoup reste à faire pour rattraper les effets de 30 années de croissance sans égards pour l’environnement dont certains ne seront peut-être jamais corrigés et en dépit d’hésitations, parfois de marche-arrières, on ne peut nier la prise de conscience du pouvoir.

Dépollution des cours d’eau.

Un mois après la réunion des Assemblées en mars 2015, le régime a en effet adopté des mesures pour commencer à assainir les réserves hydriques du pays. Le 16 avril, le Conseil des Affaires d’État publiait une « feuille de route » assorti d’un plan en 10 points dont l’objectif affiché prévoit que d’ici 2020, 70% des 7 plus grands cours d’eau de Chine, dont le Yangzi, le Fleuve Jaune, la Rivière des Perles et la Huai auront été nettoyés.

Pour l’instant, alors que, d’après une étude de 2013 du ministère des ressources foncières, le gouvernement affirme que seules 22% de l’eau des plaines du nord sont potables, les ressources en eau sont classées en 5 niveaux qui vont de l’eau potable aux « eaux lourdement polluées, noires et puantes » (sic) dont les critères ne sont cependant pas rigoureux et varient selon les provinces. Alors que le Jiangsu calcule que 20% des eaux du Jiangsu sont « noires et puantes », le Henan situe cette proportion à 56,7%.

Au total, le plan prévoit que d’ici 2030, 70% des principaux cours d’eau seront classés au-dessus de la catégorie 3 (conditions acceptables). D’ici là, des directives ont été adressées aux provinces pour appliquer des prix de l’eau différents en fonction de sa qualité, affiner la mesure des pollutions dans chaque municipalité et fermer ou surveiller plus efficacement les effluents des usines les plus polluantes (papeteries, usines de fertilisants, production de métaux non ferreux, cokéfaction), avec l’introduction d’un système de points payants en échange du droit à polluer. A partir de 2018, toutes les villes devront rendre public l’état de leurs ressources en eau potable.

Vers une atmosphère urbaine plus respirable ?

S’agissant de la pollution de l’air, Li Keqiang a reconnu que les réglementations publiques étaient mal appliquées essentiellement à cause de la faible autorité des administrations locales sur les industries polluantes. Alors que le ministère de l’environnement reconnaissait qu’en 2014, seulement 8 villes parmi les 74 inspectées avaient satisfait aux tests d’une atmosphère propre, Pékin et Washington ont annoncé en novembre dernier, lors du sommet de l’APEC, un accord qui fixe le pic des émissions chinoises de dioxyde de carbone à 2030. S’il est vrai que l’échéance est loin de l’idéal de Paris d’un pic à 2020 contrôlable, l’accord avec les États-Unis n’en témoigne pas moins d’une inflexion notable de la position chinoise, en contraste total avec l’atmosphère d’hostilité qui prévalait il y a 5 ans au Danemark.

Pour la première fois, la Chine qui durant les 15 dernières années a été à l’origine de 60% de l’augmentation du dioxyde de carbone dans l’atmosphère et les États-Unis qui furent les plus grands pollueurs jusqu’en 1997, sont tombés d’accord sur la question globale et essentielle du réchauffement de la planète. Même s’il est très peu probable que Pékin accepte de se conformer aux contraintes de Paris, l’accord n’en prépare pas moins le terrain de la 21e conférence sur le climat du Bourget sur un mode plus coopératif qu’il y a six ans.

Pour autant, les promesses chinoises restent très en deçà des objectifs fixés par Paris. Depuis les accords conclus avec Washington, la Chine n’a pour l’instant pas évolué : ses promesses restent identiques à celles de l’APEC et ont été répétées lors du voyage de Li Keqiang en France en juin.

En 2030, les émissions de gaz à effet de serre seront réduites de 60 à 65% par point de PIB par rapport au niveau de 2005 (ce que reviendrait à une réduction annuelle de 2%), tandis que la part des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie primaire sera augmentée de 20%. (Pour mémoire, les pays de l’Union Européenne ont tous déjà conclu un accord contraignant pour réduire de 40% leurs effluents de dioxyde d’ici 2030. Quant aux États-Unis, ils promettent 26 à 28% de réduction par rapport au niveau de 2005).

*

Un très long chemin.

La plupart des observateurs applaudissent aux promesses chinoises et constatent les efforts en cours pour fermer les industries les plus polluantes et en surcapacité du Hebei (acier, charbon, ciment) et développer les énergies non renouvelables. Après avoir augmenté sa production d’énergie solaire de près de 14 gigawatts en 2014, l’objectif 2015 prévoit d’en rajouter 15 autres, pour atteindre 100 gigawatts en 2020. Récemment des photos de la NASA ont révélé que le vaste champ de panneaux solaires installé dans le désert de Gobi en 2012 avait triplé sa surface et sa production passée de 5,2 à 28 GW.

En avril, l’Agence Nationale de l’énergie a demandé aux provinces de lui soumettre les plans de leurs nouveaux champs de panneaux solaires pour 2015. Combinés avec le ralentissement industriel, les efforts commencent à produire des résultats. Selon le Bureau National des Statistiques, les émissions de carbone ont baissé de 2% en 2014 pour la première fois depuis 2001. Mais, compte tenu de l’ampleur des pollutions, la plupart des ONG sur l’environnement qui suivent la situation, considèrent qu’il s’agit du début d’un très long processus, homothétique de celui des réformes socio-économiques où les obstacles sont souvent retranchés dans les mêmes féodalités des grands groupes industriels.

Mise à jour le 6 novembre.

Début novembre, la visite en Chine du Président Hollande a confirmé la nouvelle conscience écologique du Bureau Politique, attisée par l’intérêt de plus en plus vif porté par l’opinion publique aux pollutions industrielles de l’air et des rivières. Durant la visite du Président français, Pékin a confirmé les promesses de réduction des émissions de CO2 faites lors de sa dernière visite aux États-Unis qui étaient elles-mêmes un rappel des accords conclus lors de l’APEC à Pékin en novembre 2014.

La nouveauté est que Paris et Pékin ont annoncé le 2 novembre un accord pour la vérification tous les 5 ans des engagements pris par les États. Sans être véritablement « contraignant » comme l’annonce la presse française, l’accord signale une modification notable de l’état d’esprit du gouvernement chinois par rapport à la conférence de Copenhague où Pékin avait pris la tête d’une fronde des émergents et des pays en développement pour réaffirmer leur priorité au développement économique. Cette fois le Président chinois a promis à François Hollande que son pays s’engageait à contribuer au succès de la COP 21.

Lire notre article Copenhague. La fronde de la Chine et des pays émergents

Par ailleurs, s’inscrivant dans les projets de « décarboniser » l’économie chinoise, l’autorité chinoise de l’énergie nucléaire, les groupes Huaneng et Datang ont signé avec Areva un accord d’une valeur de 22 Mds de $ pour le recyclage des déchets nucléaires, tandis que la China Nuclear Corporation a rendu publique son intention de prendre une participation minoritaire dans le capital d’AREVA. Le 3 novembre l’action du groupe nucléaire français affichait une forte hausse de 13,95% portant le cours à 7,76 € (il était à 10,1€ en janvier 2015).


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