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L’aéronautique mondiale à Zhuhai

Un J-10 de la patrouille acrobatique de l’armée de l’air « Ba Yi – 1er août » créée en 1962.

Le 10e salon de l’aéronautique de Zhuhai s’est déroulé du 10 au 16 novembre et a attiré près de 700 exposants d’une quarantaine de pays, 110 000 visiteurs professionnels, plus de 2000 journalistes, 141 délégations techniques ou commerciales, civiles ou militaires. Petit à petit l’événement né en 1996 se rapproche de la fréquentation des grands salons internationaux. A titre de comparaison, le salon du Bourget de 2013 dont c’était la 50e édition, avait accueilli 2215 exposants et 285 délégations venant de 44 pays.

Cette année les nouveautés chinoises du salon auront été le MA 700 - déjà montré en maquette au salon de 2008 -, turbopropulseur commercial de 70 à 80 places dont le premier vol est prévu en 2017 avec une certification programmée en 2019 et deux nouveaux aéronefs militaires : le nouveau chasseur furtif J-31 et l’avion de transport stratégique Y 20. A quoi il faut ajouter l’avion de patrouille et de surveillance KJ 2000, déjà plus ancien, mais présenté pour la première fois au salon.

La présentation du J-31 et l’absence du J-20 son concurrent chinois ont donné lieu à des spéculations sur les intentions de l’industrie aéronautique chinoise, à côté des commentaires sur les performances de l’appareil et d’autres sur les fortes présomptions américaines de captages illégaux de technologies par intrusion informatique. Le surgissement depuis 2011 des chasseurs de combat furtifs dans le paysage aéronautique de l’Asie a incité le Pentagone à souligner dans ses rapports successifs au Congrès la montée d’une menace nouvelle contre d’éventuelles opérations aéronavales américaines dans la région.

En arrière plan des présentations, le Salon a donné lieu à l’annonce de plusieurs accords conclus entre AVIC et les constructeurs étrangers qui, tous, s’efforcent de conquérir un part du vaste marché aéronautique chinois contre l’acceptation de transferts de technologies. Boeing, Airbus et le motoriste CFM semblent pour l’instant en position de force sur des créneaux (moyen courrier et motorisation) que la Chine a du mal à occuper sans le renfort des technologies importées.

En revanche, sur le créneau des lignes intérieures occupées par les modèles de turbopropulseurs chinois MA 60 et MA 600 auxquels la Chine prépare un successeur plus moderne, le MA 700, tout en imposant 24% de taxes à l’importation des modèles étrangers, la percée commerciale est plus difficile.

Photo : La maquette du C.919 de la COMAC – Commercial Aircraft Corporation of China (中国商用飞机有限责任公司) – créée en mai 2008. A ce jour, elle pilote les projets ARJ-21 et C 919. Ce dernier sera suivi des C 929 et C 939.

L’avion régional MA 700.

Avec les moyens courriers ARJ 21 et C 919 de la COMAC, le MA 700 mis au point par Xian Aviation Industries, filiale d’AVIC, constituent la flotte d’avions commerciaux en cours de mise au point par l’industrie aéronautique chinoise. Si le MA 60 et le MA 600, ses deux prédécesseurs dans la série MA, sont des versions améliorées du bimoteur russe AN-24, le MA 700 (70 à 80 sièges) est en revanche une copie presque conforme de l’avion franco-italien ATR 72. AVIC avait déjà plusieurs fois annoncé le lancement du développement de l’appareil. La dernière annonce en date remonte en décembre 2013.

Mais cette fois la procédure paraît enclenchée puisqu’au salon de Farnborough en juillet dernier, Pratt & Witney Canada a signé avec AVIC une lettre d’intention pour la motorisation de l’appareil, prenant le pas sur Rolls Royce également en lice. Le MA 700 prévu pour 80 sièges – extensibles à 90 - soit plus que le Franco-italien ATR 72 et le Q 400 du Canadien Bombardier, ses concurrents, a maintenant une bonne chance de se placer favorablement sur le marché puisque les modèles plus modernes des concurrents (Airbus, Alenia, Korea Aerospace et Bombardier) n’ont pas dépassé le stade du projet.

L’ARJ 21 arrive au bout de ses problèmes.

L’AR J21 est l’appareil qui, ayant essuyé les plâtres de l’industrie aéronautique chinoise, a pris un important retard. Lancé en 2002, il a accumulé de nombreux problèmes durant son développement (entre autres : intégration, avionique, systèmes de dégivrage et train d’atterrissage).

Sa longue mise au point presque achevée, il se trouve face à des concurrents plus modernes dont le développement a été plus rapide, tels que le MRJ de Mistubichi (1er vol en 2015) et la série E2 du Brésilien Embraer (livraisons prévues en 2018). Aujourd’hui ce premier moyen courrier construit par des ingénieurs chinois qui doit encore subir dix séries de tests en vol, est sur le point d’obtenir la certification de l’Aviation Civile chinoise.

Mais la COMAC, mesurant les handicaps commerciaux de l’appareil, envisage déjà une version améliorée plus légère, ainsi qu’une avionique et une motorisation améliorées. Pour l’heure il n’y a cependant aucun plan connu pour remotoriser l’ARJ 21 du fait de l’exclusivité obtenue par contrat par GE et ses moteurs CF 34-10A.

Les succès du C 919 appuyés par l’État chinois.

Le C 919, moyen courrier de 158 – 174 sièges à fuselage étroit lancé en 2006 a eu moins de problèmes, même si son développement a également enregistré du retard. Son vol inaugural initialement prévu en 2014 a été retardé en 2015, mais les premières livraisons sont toujours planifiées pour 2018. Il s’agit du plus gros appareil commercial produit par la Chine et le premier d’une série qui devrait être complétée par les C 929 et C 939 à 300 et 400 places. Le créneau commercial est celui des A 320 et B 737. Mais EADS estime que la compétition contre AIRBUS ne se fera pas sentir avant 2020.

Le C 919 intègre nombre d’équipements importés.

L’appareil est doté d’un nombre important d’équipements étrangers qui vont entre autres de la motorisation (le LEAP-1C à consommation réduite de CFM) aux pneumatiques (Michelin) en passant par l’avionique (GE en JV 50/50 avec AVIC), le câblage (Safran) et les équipements électroniques de sécurité du cockpit (Rockwell Collins) qui construit surtout des systèmes d’acquisition de cibles et d’aide au tir pour avions militaires.

Enfin, s’il est vrai que l’abondance d’équipements fournis par des opérateurs extérieurs constitue une fragilité, elle est aussi une source inestimable de transferts de technologies de pointe pour l’industrie aéronautique chinoise par le truchement de JV imposées aux fournisseurs, conditions d’entrée sur le marché chinois fixées par AVIC et auxquelles presque tous les équipementiers étrangers se sont pliés.

Regard sur le marché aéronautique chinois

Cette occurrence indique que les autorités chinoises ont bien l’intention de ne pas laisser aux seuls constructeurs étrangers le bénéfice du marché chinois qui, selon une étude récente de Boeing, serait de plus de 5000 nouveaux appareils, dont 75% seront nécessités par l’augmentation du trafic. Du fait de l’urbanisation rapide et de la croissance de la classe moyenne, la croissance annuelle du trafic aérien chinois sera près de 75% plus forte (8% contre 4,7%) qu’ailleurs dans le monde.

Sur ce marché, la COMAC créée il y a 5 ans, puissamment aidée par l’État, bénéficie des transferts de technologies de ses concurrents étrangers et pourra en partie compter sur le marché captif que constituent les compagnies aériennes chinoises. Enfin, même si l’échéance paraît aujourd’hui encore éloignée, le risque existe à terme que le pouvoir politique, jugeant que l’industrie aéronautique chinoise est capable d’autonomie technologique, notamment en matière de motorisation, adopte une série de règlements restrictifs pénalisant les opérateurs étrangers.

Enfin, Thierry Chopard, consultant chez Impulse Partner, signale la prise de contrôle récente par un groupe d’investisseurs chinois du loueur majeur ILFC qui détient 22% du carnet de commande d’Airbus et Boeing et 30% du marché chinois. Il pourrait, ajoute Chopard, « être contraint par le gouvernement chinois de favoriser encore plus le C 919 dans ses commandes à venir, à condition bien sûr que celui-ci tienne ses promesses de performance ».

Selon le WSJ du 11 novembre, le nombre total de commandes du C 919 par des sociétés de leasing ou des compagnies aériennes chinoises s’élève à 430. Signe que la bataille financière est déjà engagée, à ce jour, le seul acheteur étranger ayant pris une option pour 20 appareils serait GE Capital Aviation Services, filiale de GE Commercial Finance appartenant à General Electric. Avec ILFC cité plus haut, GE Capital est une des plus importantes sociétés mondiales de loueurs d’avions.


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