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Le « style Tarentino » de Jia Zhangke

Violences sociales et destins tragiques.

Le fil conducteur de ces destins tragiques entrecroisés est le sentiment de révolte face aux tourments et aux difficultés accablant la vie quotidienne d’une population pléthorique qui tente de rester en phase avec le rythme effréné des bouleversements, dont la brutalité déchire en profondeur la trame traditionnelle de la société chinoise.

Le décor est celui de « l’usine du monde », des immenses ateliers, des sites d’extraction miniers, et, par contraste, des brillantes lumières et des gratte-ciels qui poussent comme des champignons dans les villes nouvelles.

Dans ce paysage ébranlé et instable, traversé par de sévères secousses sociales, les héros du film, corrompus, violents, obsédés par l’appât du gain ou angoissés par la peur ancestrale de manquer, humiliés par des conditions de vie misérables, sont tous les jouets d’une fatalité néfaste qui les précipite aux enfers.

Du mineur de fond écœuré et jaloux de la Maserati et de l’avion privé du patron, à l’ouvrier qui découvre la puissance terrifiante et rédemptrice des armes à feu, en passant par le jeune homme à la recherche d’un emploi honnête, ils sont en quête de richesse, de pouvoir et de puissance pour les uns, d’identité, d’amour propre ou de dignité pour les autres.

La fresque, extraordinairement lucide, possède une vertu allégorique qui rend compte des causes de la violence dans un style sans détour et cruel. Elle exprime aussi un humour subtil, avec, par moments, les ressorts techniques des films d’arts martiaux.

Enfin, par sa précision clinique, elle tient du documentaire hyperréaliste, marque de fabrique de Jia Zhang-ke qui s’était fait déjà connaître par « Still Life » description poignante des villages engloutis par le barrage des trois gorges (voir http://www.lebleudumiroir.fr/critique-still-life/)

Plusieurs cinéphiles comparent le style de Jia Zhang-ke dans Tian Zhu Ding à celui du « Django » de Quentin Tarantino récemment autorisé par la censure, puis déprogrammé à la dernière minute. La trame des histoires de cynisme, d’arbitraire, d’injustice et de mépris, à la source des violences qui sont la colonne vertébrale du film, y est tout aussi réelle et tirée de faits divers chinois, dont certains ont fait le tour de la planète, comme l’accident de TGV près de Wenzhou à l’été 2011.

Mais, souvent il s’agit d’histoires sinistres, misérables, presque anodines, passées inaperçues dans un Occident impressionné jusqu’à la fascination par la puissance montante et irrésistible de la Chine moderne.

On y voit une masseuse tuer à coups de couteau un cadre du Parti qui venait de la gifler avec une liasse de billets de banque, parce qu’elle refusait ses avances – dans le film c’est la femme de Jia, l’actrice Zhao Tao, qui, placée dans une situation similaire, joue ce rôle -. Une autre scène du film montre l’épidémie de suicides des ouvriers de Foxcon abrutis et désespérés par leurs conditions de travail (voir notre article Hausse des salaires et des coûts de production).


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