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Les promesses du 3e Plenum confrontées à la difficulté des réformes

Éponger les dettes des entreprises.

La croissance de la dette des entreprises ralentit depuis 2009, mais reste supérieure à la croissance du PIB. (source Bloomberg).

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Le deuxième chantier d’urgence auquel s’est attelé le pouvoir est également lié au secteur industriel d’État, ciblant cette fois les dettes accumulées par les groupes publics. La manœuvre est en cours depuis l’été 2015, avec la contribution des banques publiques forcées de mettre la main à la pâte, transférant à la fin 2015 près de 500 Mds de $ de dettes des groupes publics vers les comptes des banques d’État.

Toujours pour éponger les créances des entreprises publiques, le 18 juillet, le gouvernement a autorisé l’échange (swap) entre les dettes toxiques (titrisation) et les prises de participation au capital des sociétés par la banque de Chine et 4 banques d’affaires (Banque Industrielle et Commerciale, Minsheng Bank, EximBank et Merchants Bank) pour un premier montant de 1000 Mds de Yuan (136 Mds d’€).

En même temps, en dépit de la promesse faite au 3e plenum de prendre ses distances avec la gestion financière de l’appareil productif public, le ministère des finances avait favorisé la création de fonds d’investissements publics-privés à vocation de développement, mais où le rôle des pouvoirs publics reste prépondérant, ce qui n’éloigne pas vraiment le nouveau schéma de ses anciens travers que sont les excès d’investissements publics et l’intervention de l’État dans le marché.

Relancer l’investissement et contrôler les dérives.

Croissance de prêts bancaires comparée à l’agrégat monétaires M2 (Liquidités + dépôts à vue + dépôts à terme). Une faible décélération a commencé courant 2015. La valeur des prêts est passé de 3000 Mds de $ en 2007 à près de 15 000 Mds de $ en 2015. Dans le même temps la masse des liquidités et des dépôts bancaires est passée de 5000 Mds de $ à 21,6 Mds de $. Source Banque de Chine.

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Là aussi, mesurant les dérives de ce qui pourrait s’apparenter à une régression ou, au moins, à un piétinement de la réforme risquant de nourrir une nouvelle accumulation des dettes, le pouvoir à rendu publiques deux séries de mesures.

La première, prise le 18 juillet, vise à faciliter les investissements. La deuxième est son complément destiné à contrôler la validité des investissements pour éviter les dérapages des investissements dont Georges Soros avait souligné les risques en janvier 2016 [4].

Le « volet financement » a consisté à élargir la liste des institutions autorisées à investir dans des obligations émises par les groupes publics, en y ajoutant le fond national de sécurité sociale et les assurances. Simultanément, le gouvernement espère, grâce à des facilités administratives et fiscales attirer plus d’investissements privés – dont le volume s’est récemment contracté – dans les secteurs stratégiques du pétrole, du gaz naturel, du rail, de l’énergie et des télécoms.

La deuxième mesure est une série des contraintes rendues publiques le même jour qui définissent les limites et les conditions des financements. Publiées par la Commission de régulation boursière, elles fixent des quotas d’investissements et d’emprunts limitant à la fois les volumes d’emprunts et interdisant la reconduite des dettes au-delà de leur maturité initiale. Avec l’appui de l’association des gestionnaires d’actifs (sigle anglais AMAC, en chinois 中国 证券 投资 基金业 协会),elles obligent les opérateurs à mieux contrôler l’origine des fonds et la qualité des obligations en les reliant à la validité des projets de développement attestée par un dossier plus détaillé que par le passé.

Parallèlement à ces décisions visant à réduire les surplus industriels et à freiner les dérives financières des groupes d’État provoquant une accumulation de dettes, les pouvoirs publics se sont appliqués à freiner la baisse du Yuan et l’évasion des capitaux.

Freiner la baisse du Yuan et l’évasion des capitaux.

Le graphe montre le déclin des réserves de change (en bleu) à partir de mai 2014, directement relié aux estimations de fuite de capitaux variant entre 30 Mds et 120 de $ par mois entre l’automne 2015 et janvier 2016. En juin 2016, les réserves de change ont recommencé à augmenter.

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Alors que le 18 juillet le Yuan avait chuté au-dessous de la barre des 6,7 $ pour la première fois depuis 2010, la banque de Chine intervient activement pour freiner la baisse évaluée à 3% depuis janvier 2016. La stratégie de contrôle serrée du change – selon Reuters, la Banque de Chine n’autorisera pas la monnaie à descendre au-dessous de 6,8 $ - vise à éviter l’effritement de la confiance à l’origine d’une importante fuite de capitaux décelable depuis 2014.

Mais les dernières statistiques montrent que l’hémorragie a cessé. Après avoir ponctionné en moyenne entre 15 et 30 Mds de $ par mois de ses réserves de change (173,8 Mds de $ depuis janvier 2016), la banque de Chine et l’autorité de régulation des changes ont affirmé le 21 juillet que la fuite des capitaux s’était ralentie.

La bonne nouvelle était accompagnée d’une autre : en juin, les réserves de change qui n’avaient cessé de baisser, tombées de 3650 Mds de $ en juillet 2015 à moins de 3200 Mds de $ en mai 2016, ont augmenté en juin de 13,4 Mds de $, grâce à la valorisation des actifs dans lesquels le fonds souverain a investi les réserves. (Wang Chunying porte parole du bureau de gestion des réserves de change – Sigle anglais SAFE, en Chine 国家 外汇 管理局).

Entre relance et rigueur.

Les projets de TGV chinois visent à terme à équiper le pays de 45 000 voies à grande vitesse. Fin 2015, le pays comptait déjà 19 000 km de voies à grande vitesse.

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Mais la bataille que se livrent les adeptes de la rigueur et ceux de la relance est loin d’être terminée. Le dernier exemple en date d’un projet d’investissements massifs engagé dans le cadre de l’aménagement du territoire dont le Conseil des Affaires d’État espère qu’il maintiendra la croissance a été rendu public le 21 juillet.

Il vise à construire un réseau de 16 axes de TGV essentiellement au centre du pays avec une branche vers le Xinjiang et deux autres vers le nord-est dont le coût initial sur les 5 prochaines années sera de 3800 Mds de Yuan (517 Mds de €). Une fois terminé, le réseau de voies rapides (déjà 19 000 km fin 2015) serait étendu à 45 000 km.

Déjà les critiques attirent l’attention sur la difficulté des retours sur investissement 2 fois plus longs que pour les trains classiques et les risques liées à de nouveaux gaspillages autour d’aussi vastes investissements. Quant aux avocats du projet, leurs arguments évoquent les nécessités de l’aménagement du territoire et les incomparables expériences acquises par le rail chinois à travers la construction d’un aussi vaste ensemble, devenant d’exceptionnels atouts à l’export.

Les deux thèses s’expriment au sommet du pouvoir et jusque dans les organismes créés pour piloter les réformes. A côté du Groupe dirigeant pour les affaires financières et économiques où Liu He [5], le réformateur orthodoxe tient le haut du pavé, Xi Jinping avait créé en 2013 un groupe parallèle dont la mission, plus politique est de veiller à l’équilibre socio-politique des réformes. Il s’agit du « Groupe dirigeant pour l’approfondissement extensif des réformes 中央 全面 深化改革领导小组 » dont le secrétaire exécutif est Wang Hunning un autre conseiller proche de Xi Jinping,lui-même assisté dans ce groupe de Li Keqiang, Liu Yunshan et Zhang Gaoli.

Alors que la restructuration de l’appareil productif s’est assez vite enlisée dans le manque de loyauté d’une partie de l’administration, les freins bureaucratiques et la crainte des effets sociaux des réformes, Li Keqiang et Liu He qui avaient contribué à la rédaction du rapport de la Banque Mondiale « China 2030 » doivent aujourd’hui méditer l’évocation des obstacles aux réformes de la page 65 qui ciblait « des groupes, qui profitent de rentes de situations découlant de leurs relations privilégiées avec les décideurs politiques et protègeront résolument leurs intérêts grâce à leur pouvoir, leurs ressources et leurs connexions. »

Note(s) :

[4Le 7 janvier 2016 « Soros avait expliqué que la Chine a un important problème d’ajustement de ses finances publiques pouvant déboucher sur une crise comparable à celle de 2008 ». Le commentaire sur les risques posés en Chine par un excès d’investissements avait provoqué une réplique acerbe du Quotidien du Peuple qui, le 27 janvier 2016, accusait le milliardaire de « déclarer une guerre financière à la Chine ».

[5Liu He (64 ans), spécialiste de macro économie, des structures industrielles et des techniques de l’information. Formé à l’Université du Peuple, titulaire d’un Master d’administration publique à Harvard, il fut n°2 du Centre de recherche du Conseil des Affaires d’État qui avait contribué au rapport « China 2030 « préparé par la Banque Mondiale. Membre du Comité Central, il est aujourd’hui le Directeur exécutif du Groupe dirigeant pour les finances et l’économie, dont le Président est Xi Jinping et l’adjoint Li Keqiang. Il cumule cette fonction avec celle de n°2 de la Commission de Réforme et développement.


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