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Réformes économiques : hésitations, doutes et obstacles

Le gonflement des dettes toxiques.

Photo : Le pouvoir chinois se bat pour réduire les dettes publiques et freiner la résurgence des créances toxiques des banques et des gouvernements locaux.

Au mois d’août les grandes banques nationales ont fait état de l’effacement au premier semestre de leurs dettes toxiques dont le montant s’élevait à 423,49 Mds de Yuans (69 Mds de $) à la fin juin, en augmentation de 21% par rapport à 2013, rachetées par des sociétés ou des banques de « défaisance » crées à la fin des années 90. Le chiffre, encore très modeste, pourrait enfler alors que le ralentissement de l’économie handicapera la capacité de remboursement des débiteurs, tandis qu’une grande partie du crédit continue à être dirigé vers les entreprises publiques, dont la rigueur budgétaire est aléatoire.

Bien que portant sur de faibles masses de capitaux, cette nouvelle intervention de la puissance publique dans la gestion des banques utilisant une stratégie d’effacement identique à celle observée il y a 15 ans, n’est pas de nature à rassurer les partenaires de la Chine sur l’ouverture au marché du système financier.

Pour l’heure, le ministre des finances Lou Jiwei s’est d’abord préoccupé de désamorcer la bombe à retardement des créances des administrations locales dont le volume était estimé par un audit public à 3000 Mds de $ à la fin 2013. Le 27 août, Lou a ainsi annoncé la possibilité, jusque là inédite pour les gouvernements locaux, d’échanger, après autorisation gouvernementale, leurs dettes à fort taux d’intérêt contre des obligations à taux plus faible émises par les provinces et les municipalités.

La mesure prise à la fin août lors de la réunion budgétaire de l’ANP a clairement pour but de mettre les administrations locales en mesure de contourner les organismes prêteurs de la finance grise mis en place par les pouvoirs locaux eux-mêmes pour abonder leurs budgets insuffisants, dont la prolifération est à l’origine de la dangereuse explosion des dettes locales au cours des quatre dernières années.

Relances ciblées et doutes sur la capacité réformiste du régime.

Au risque d’écorner l’image de rigueur financière qu’il tente de se donner et de remettre en cause la lutte contre les dérapages cupides du secteur immobilier favorisant les projets luxueux des promoteurs et des gouvernements locaux plus lucratifs que les logements sociaux dont le parc est gravement déficitaire, le gouvernement a, sous la pression des opérateurs qui réclamaient des mesures de relance, en partie relâché les mesures de contrôle du marché.

En juillet, une majorité de centres urbains à l’exception des métropoles de Pékin, Shanghai, Shenzhen et Zuhai où le marché s’est quand même contracté de 30%, ont supprimé les restrictions pour l’achat d’un deuxième appartement. Alors que les transactions ralentissent et que les prix baissent, certains développeurs ont accepté des prêts hypothécaires sans mise de fonds initiale.

Depuis le 1er juillet, un nouveau mode de calcul du taux de réserve obligatoire des banques pourrait permettre de libérer une capacité d’investissement de 2000 Milliards de Yuan (325 Mds de $). Enfin, en septembre, le gouvernement, cédant aux pressions des banquiers et des gouvernements locaux inquiets des conséquences d’une récession, a autorisé la Banque de développement à pratiquer un taux d’emprunt de 4,5%, bien inférieur à ceux en vigueur, pour l’attribution aux gouvernements locaux de 165 Mds de $ destinés à des projets d’urbanisme.

La manoeuvre a initié un débat interne sur les conséquences des mesures de relance pour la crédibilité de l’esprit réformiste du gouvernement dont les arguments contraires ont été publiés les 19 et 20 septembre par Xinhua et le Quotidien du Peuple.

Alors que le Quotidien prenait la défense de Li Keqiang, Xinhua mettait en garde contre les doutes de plus en plus fréquents sur la détermination réformiste du pouvoir. Enfin, tout en critiquant le relâchement du contrôle du crédit, analysé comme une marche arrière néfaste, les sceptiques ciblaient aussi la lenteur des réformes appliquées aux banques et aux grands groupes publics.

Les manœuvres retardatrices des bastions conservateurs.

En dépit des mesures d’ouverture du capital destinées à écarter l’État de la gestion des groupes d’hydrocarbures (Le 27 août, 37 investisseurs chinois ont fait des offres à Sinopec pour entrer au capital de ses filiales de distribution), malgré un début de mise en concurrence des banques publiques par l’autorisation accordée à des opérateurs concurrents de s’attaquer au marché jusque là très fermé des services bancaires (cartes de crédit et paiement en ligne), au troisième trimestre, le scepticisme a en effet persisté sur la capacité du régime à réformer les féodalités publiques, principaux obstacles avec les banques nationales au réajustement des schémas gaspilleurs de l’économie.

Sur la sellette le manque d’allant des cadres locaux qui ignorent les directives du Centre et les insuffisances de l’un des principaux piliers conservateurs du régime : la SASAC (La commission de contrôle des actifs publics) critiqué par l’économiste Nicholas Lardry. Ce dernier, expert de l’économie chinoise à la Brookings, interrogé par Caixin le 7 août dernier, accusait la SASAC d’avoir complètement manqué la restructuration des entreprises publiques placées sous son contrôle dont les profits se sont effondrés. Au point que les entreprises nationales constitueraient aujourd’hui un des principaux handicaps à l’amélioration de la productivité du secteur industriel et manufacturier.

Pire encore, aux plus critiques, les restructurations du capital des groupes publics et la modernisation de leur gouvernance annoncées à grand renfort de publicité, apparaissent plus comme des mesures cosmétiques destinées à détourner le sens même des réajustements que comme de véritables réformes de fond. Lire notre article Chute de la demande de crédits, vulnérabilité de l’immobilier, obstacles aux réformes et risques économiques.

Quant aux cadres locaux, leur conservatisme qui confine parfois à une manque de loyauté, a été dénoncé en août par un rapport de 1000 pages rédigé par une équipe de contrôle dépêchée par le Centre qui soulignait que les bureaucraties des provinces d’abord préoccupées par leurs propres intérêts financiers, ignoraient presque systématiquement les directives du pouvoir. Selon le rapport, peu de projets auraient avancé, notamment dans le secteur des logements sociaux, du démantèlement des monopoles d’État, du soutien aux entreprises privées, de la promotion des véhicules propres ou du financement des PME.


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