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Timides réactions populaires à « Big Brother » (suite)

La bourrasque du paiement en ligne par téléphone a saisi la classe moyenne chinoise à la vitesse d’une trainée de poudre. La simplicité immédiate du geste se résumant à présenter l’écran de son portable à un code-barres ou un « code QR » (Quick response) qui stocke encore plus d’informations qu’un code barre, fait fureur. Des centaines de millions d’adeptes ne payent plus leurs achats que de cette manière.

Plus de billets, de cartes de crédit ou de codes secrets. Le téléphone intelligent et magique, outil envahissant, omniprésent et indispensable de la vie courante, devenu une sorte d’extension technologique morphologique portable dont peu de gens savent se passer, à la fois outil de connexion avec les absents et entrave à la communication directe avec les présents, investit et subjugue presque tous les aspects de la vie courante.

Les chiffres de l’engouement sont impressionnants. En mars 2019, alors que 72,5% des Chinois (adultes et adolescents) utilisaient le paiement par portable, soit au bas mot 600 millions, la moyenne des voisins asiatiques était à peine de 30%. Entre 2009 et 2014, la valeur totale annuelle des paiements par portable est passée de 500 Mds de Yuan (65 Mds d’€) à 8100 Mds (1053 Mds d’€).

A ce rythme de croissance, les projections à 2019 donnent 26 900 Mds de Yuan de paiements par portables, soit 3500 Mds d’€. Encore ce chiffre est-il inférieur aux dernières estimations de Forbes qui l’évalue à 4200 Mds d’€. Lui-même ne constitue que 20% des paiements en ligne.

La surenchère des rivalités attise le pillage des données.

A la manœuvre, les grands portails chinois de paiement en ligne engagés dans une compétition féroce, avec en tête Alibaba (Alipay) dont la part de marché, en baisse rapide, est de 53% et Tencent (Ten Pay) qui s’envole avec 40% du marché grâce à WeChat (weixin 微信) – Un milliard de comptes dans le monde en 2018 -.

Même si, sur ce créneau, Alibaba et Tencent perdent de l’agent, leur intérêt est ailleurs. Le service de paiement en ligne permet en effet d’attirer les utilisateurs vers d’autres offres financières (prêts en ligne et assurances) dont les retours sont très lucratifs.

Grâce aux algorithmes capables d’extraire et d’analyser les données et les historiques de crédit des clients, les deux se mettent en mesure d’offrir des produits financiers attractifs adaptés à la situation de chacun. Surtout, en plongeant dans les données privées, ils éliminent les mauvais payeurs.

Ces tendances où se croisent l’appât du gain, l’obsession du contrôle pour limiter les incertitudes du marché et l’appétence du public pour la simplicité offerte par les nouvelles technologies rencontrent l’utopie du contrôle social déjà évoquée par QC. Lire : Le crédit social. De l’utopie vertueuse à « Big Brother ».

Le résultat est en passe de créer une chape de surveillance inquisitrice généralisée. Elle espionne non seulement l’aspect financier des renseignements confidentiels, mais elle est également à l’affut de la vie privée de chacun et disent les plus méfiants, éventuellement de sa pensée politique.

Dernière innovation amplement commentée par la presse française, sous couvert de simplification pratique et de modernité, les opérateurs du paiement en ligne sont en train contourner les codes-barres et les « QR » du paiement par téléphone portable et de les remplacer par la solution du paiement par reconnaissance faciale.

La surenchère qui n’a pas de limite, s’accélère et se traduit, au prétexte commercial d’une plus grande efficacité, par une course poursuite de Tencent et Alibaba pour faire installer chez les distributeurs leurs écrans de reconnaissance faciale ouvrant la voie aux pires intrusions dans la vie privée de chacun.

La monnaie ou les cartes de crédit font figure de pratiques antédiluviennes. Même le « smartphone » est démodé. Pour payer, inutile de sortir votre portable. Il vous suffit de scruter l’écran pendant un bref instant et le tour est joué. La vogue qui plaît beaucoup à la jeunesse entrée avec enthousiasme de plain-pied dans ce qui ressemble à un film de science-fiction, se répand à la vitesse de la poudre.


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