›› Editorial
En Chine, de grandes décisions peuvent être officialisées par une simple “règlementation” et annoncées par un fonctionnaire à un quotidien en langue étrangère. C’est ainsi que l’anarchie totale qui règne jusqu’à maintenant dans le domaine des transplantations d’organes humains vient de faire l’objet de déclarations relativement franches et de décisions importantes, expliquées par un porte-parole du ministère de la Santé au China Daily - noter le titre, le message est destiné au moins en partie à l’opinion publique américaine.
La demande d’organes est énorme. Selon Chine Nouvelle, il y a 2 millions de patients chinois en attente et seulement 20.000 transplantations par an (1%). La pression est donc très forte, alors qu’aucune règle n’était imposée jusqu’ici. Des centaines de cliniques ou de petits hôpitaux peu qualifiés se sont lancés dans ce business, considéré comme une “vache à lait” selon le vice-ministre de la Santé HUANG Jiefu. Avec un taux d’échec notable.
De nombreux étrangers (surtout asiatiques), profitant des prix plus bas que chez eux, passent devant les malades chinois en attente. Dans ces conditions seuls les Chinois qui ont de l’argent, ou une connection avec qui de droit peuvent obtenir une transplantation.
A partir du 1er juillet prochain tout devrait changer. La règlementation viserait à corriger ces inégalités choquantes et à exiger une autorisation d’opérer. Celle-ci serait réservée aux établissements et hôpitaux remplissant toutes les conditions requises pour procéder à une transplantation avec une sécurité suffisante.
A partir du 1er juillet, toute transplantation d’organe serait obligatoirement soumise à l’approbation d’un “comité de science médicale et d’éthique”. Un tel Comité national d’experts va être installé au ministère de la Santé et, à tous niveaux, les Instituts médicaux et les Hôpitaux devront faire de même.
Cette mesure ferait partie d’une réglementation sans précédent, qui semble aujourd’hui adoptée, en vue d’interdire “les ventes d’organes et toutes les pratiques qui violent l’éthique et les standards médicaux normaux”. Celle-ci imposerait aussi l’obligation d’un accord écrit du donneur ou de sa famille avant tout prélèvement d’organe, “qu’il s’agisse de citoyens ordinaires ou de criminels exécutés”. Les donneurs seraient autorisés à annuler cet accord jusqu’à la dernière minute.
L’allusion aux “criminels exécutés” est rare dans la presse officielle chinoise. Bien des observateurs pourtant pensent qu’en Chine les “criminels exécutés” sont actuellement la principale source de “dons” d’organes. Mentalité sécuritaire, morale confucéenne, mépris des exclus, ou profits juteux ? Une simple règlementation, un modeste porte-parole du ministère de la Santé pourront-ils abolir un état de fait scandaleux et dangereux pour les malades. La règlementation annoncée pour le 1er juillet va donc dans le bon sens. Si elle est vraiment appliquée...