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Xi Jinping en Europe. Au-delà des bonnes paroles et des apparences

La Haye et la face cachée de la sécurité nucléaire

Le voyage de Xi Jinping en Europe a commencé par sa participation au 3e sommet sur la sécurité nucléaire à La Haye dont le but officiel était : 1) de réduire la quantité de matières fissiles dangereuses, notamment l’uranium hautement enrichi (+ de 90% d’uranium 235) en circulation dans le monde ; 2) de renforcer la sécurité et de mieux contrôler les sources des matières radioactives ; et 3) d’améliorer la coopération internationale sur ces questions. Au-delà des commentaires sur la convivialité des échanges en marge de la conférence entre les présidents américains et chinois où il était question de la tournée de Michèle Obama en Chine, on constate deux choses :

1) Quand Pékin développe son discours à large spectre sur « les nouveaux rapports de confiance et de respect mutuel entre les grandes puissances », les États-Unis qui approuvent en apparence ce nouveau style, rétrécissent systématiquement leurs commentaires aux questions sensibles de la relation que sont la Corée du Nord, le changement climatique et la pollution, les droits de l’homme et la liberté de navigation en Mer de Chine du sud.

Tous ces sujets auxquels il faut ajouter l’absence de transparence militaire, le dumping social, le non respect du marché, l’espionnage, la monnaie chinoise sous évaluée et le vol de technologies que la Chine conteste, se retrouvent toujours en première ligne des dialogues stratégiques entre Washington et Pékin.

2) S’il est vrai que tous les participants au sommet nucléaire ont exprimé leur volonté de réduire le stock des matières fissiles, La Chine faisait partie des 18 pays (dont la Russie, le Pakistan et l’Inde) ayant refusé d’intégrer dans leurs législations nationales les recommandations du sommet pour une coopération internationale renforcée et plus de transparence proposées par les Etats-Unis, les Pays-Bas et la Corée du Sud, puis signées par 32 autres pays, dont la France, la Turquie, l’Ukraine et Israël.

L’examen de la liste des réfractaires comparée à celle des 35 signataires dont la plupart sont membres de l’OTAN, signale un point commun plus ou moins affirmé : la contestation de l’ordre occidental, jusque là conforté par les alliés de Washington ou ceux qui se coulent dans son sillage par intérêt conjoncturel, comme l’Algérie, le Chili, l’Ukraine ou les Emirats.

La fracture entre les signataires et les réticents dévoile quelques solidarités rebelles ou des angoisses encore diffuses : celle des émergents menés par les BRICS (Brésil, Inde, Chine, Afrique du sud) qui tentent difficilement de se faire une place dans le concert stratégique mondial ; celle de quelques pays asiatiques (Inde, Indonésie, Thaïlande, Pakistan, Singapour, Malaisie) - avec les très notables exceptions des Philippines et du Vietnam en froid avec Pékin - ; ou celle de quelques pays du Moyen Orient comme l’Arabie Saoudite et l’Egypte inquiets de l’évolution de Washington sur la question iranienne.

La liste des opposants à l’accord confirme enfin la solidarité entre Pékin et Moscou dont la trajectoire stratégique semble s’articuler autour d’une contestation systématique anti-américaine dont la solidité à terme restera cependant à vérifier.

Alors que les controverses entre Tokyo et Pékin ne faiblissent pas, il faut enfin souligner le geste très médiatique du Japon, mais peut-être sans réelle portée, ayant marqué l’ouverture du sommet par le transfert aux États-Unis de 350 kg de plutonium de qualité militaire et d’une grande quantité d’uranium enrichi estimée à plus de 200 kg, capable d’armer plusieurs douzaines d’armes nucléaires. Les quantités sont faibles, mais le symbole est destiné à la Chine et à sa critique systématique du Japon supposé militariste et accusé depuis février 2014 par Pékin de s’être lancé dans la construction d’un arsenal nucléaire.

Il est cependant improbable que ce renoncement par le Japon à des matières fissiles initialement transférées à Tokyo par Londres et Washington, recèle, comme certains le croient, une portée globale avec des effets possibles sur la situation en Asie du Nord-est et au Moyen Orient où la question de l’uranium iranien continue de nourrir la méfiance belliqueuse de Tel Aviv, pourtant lui-même à la tête d’un arsenal nucléaire proliférant à l’origine des méfiances et des angoisses de la région.

Pour tempérer la portée de l’initiative, à Pékin on fait remarquer que les stocks de plutonium présents dans les déchets des centrales japonaises pourraient être facilement recyclés en matériaux fissiles de qualité militaire, notamment dans l’usine de retraitement que Tokyo envisage d’ouvrir cette année au nord du pays.

Photo Les participants du 3e sommet mondial sur la sécurité nucléaire à La Haye (24 au 25 mars).


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