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Xi Jinping en Europe. Au-delà des bonnes paroles et des apparences

A Berlin et Bruxelles priorité au commerce.

L’Europe neutralisée. Les droits de l’homme en embuscade

Après La Haye et Paris, le président chinois s’est rendu en Allemagne devenue un des points d’entrée privilégiés de l’influence chinoise en Europe (Voir notre article Chine – Allemagne – Europe. Le grand malentendu.), au point que c’est à Duisburg en Rhénanie-Westphalie qu’arrive le plus long chemin du fer du monde (11 179 km), nouvelle « route de la soie » reliant Chongqing à l’Europe de l’ouest en 16 jours par le Xinjiang, le Kazakhstan, la Russie, la Biélorussie et la Pologne.

Mise à jour le 30 septembre : Depuis l’inauguration de la ligne vers Duisburg, la Deutsche Bahn a, en coopération avec les chemins russes et chinois, lancé un service de transport de pièces détachées automobiles de Leipzig à Shenyang. Les liaisons vers Duisburg et Leipzig s’ajoutent à celle entre Hambourg et Zhengzhou au Henan en service depuis juillet 2013 au rythme d’un trajet tous les deux mois.

Ces nouvelles routes terrestres entre la Chine et l’Europe permettent d’accomplir le trajet en 2 fois moins de temps que par la voie maritime. Elles rapprochent du marché chinois les machines outils et les pièces détachées de l’industrie automobile allemande. Sur chacun de ces axes elles acheminent à chaque voyage vers l’Europe, près de 700 tonnes de marchandises fabriquées par l’usine du monde.

Cette fois pourtant, l’adoption formelle d’un partenariat stratégique entre Berlin et Pékin et le volontarisme commercial et industriel ont, en amont de l’exposition Ai Weiwei à Berlin, (3 avril au 7 juillet) été tempérés par un regain des critiques privées et publiques contre le régime chinois. A l’annonce des 18 accords dont un agrément préliminaire sur la création à Francfort d’une chambre de compensation pour la devise chinoise et une extension de la JV entre Daimler-Benz et la BAIC (北京汽车), la presse allemande, a, en phase avec le président Gauck, fait écho en plaidant pour plus de droits en Chine. Un point qu’Angela Merkel a rappelé à Xi Jinping en lui faisant valoir que la liberté d’expression était un élément essentiel de la créativité, qui justifiait qu’on rende son passeport à Ai Weiwei.

Dans un éditorial publié avant la visite de Xi Jinping, la Frankfurter Allgemeine Zeitung, qui se félicitait par ailleurs de la coopération avec Pékin, encourageait les responsables allemands à se montrer plus fermes sur les sujets de la démocratie et à ne pas brader les valeurs du droit pour le simple intérêt du marché chinois. Au passage, le journal soulignait non seulement quelques faiblesses structurelles de la Chine, ses dépendances au marché européen et aux hautes technologies, mais également la tendance de Pékin à manipuler à son avantage la compétition intra-européenne.

La paralysie stratégique de l’Europe marchande

A Bruxelles, Xi Jinping suivait d’à peine 5 jours Barack Obama arrivé dans la capitale belge le 25 mars. Il précédait John Kerry en visite à l’OTAN et Ban Ki-moon le SG des NU, venu assister à une conférence organisée par les Nations Unies, l’Union Africaine et l’Institut Royal de Belgique sur la prévention des génocides. Dans la capitale belge, l’agitation diplomatique confirmait à la Chine, viscéralement attachée à son indépendance, non seulement la persistance des rivalités entre Moscou et Washington, mais aussi l’incapacité de l’Union à prendre seule en mains son destin face aux provocations russes dans l’est de l’Ukraine et au chantage au prix du gaz de Vladimir Poutine.

Les discours du président chinois sur la proximité d’intérêts entre l’UE et la Chine ont semblé vouloir corriger l’impression de désamour de Pékin pour la machine compliquée de l’UE depuis l’échec du traité constitutionnel en 2005 (en 2008 le régime avait même annulé le 11e sommet Chine – Europe en représailles de la rencontre annoncée entre Nicolas Sarkozy et le Dalai Lama).

Mais les bonnes paroles cachaient mal que le cœur des préoccupations chinoises restait l’accord réciproque, toujours en négociation, sur les investissements (dont le volume global reste faible avec seulement 2% des investissements européens dirigés vers la Chine), tandis que les Européens exigent plus de transparence sur les appels d’offre et un meilleur accès à la classe moyenne, notamment dans le secteur des services.

Pour Bruxelles, l’exigence de l’ouverture est d’autant plus pressante que Pékin a annoncé un effort des entreprises chinoises appuyées par la Banque de développement pour investir 200 Mds de $ d’ici 2015 dans les pays de l’Europe orientale et du sud dont les finances sont en déshérence et où la crise a tiré les coûts de la main d’œuvre vers le bas. Si cette prévision très optimiste se réalisait, elle quadruplerait le stock des investissements chinois dans le Vieux Continent et signalerait un effort sans précédent de la Chine vers l’Europe orientale, aggravant du même coup la césure est-ouest confirmée par la crise ukrainienne.

Le rééquilibrage passe par la fin des barrières non tarifaires chinoises dans les domaines des services (banques et assurances), du transport, des télécoms et de la santé. La négociation sera d’autant plus difficile que Pékin considère que nombre de secteurs dits stratégiques doivent être protégés de la concurrence étrangère, sans compter que le climat des affaires, la corruption et les controverses sur les droits de propriété continueront de décourager une partie des investissements européens.

Photo Le 29 mars à Duisburg, accompagné d’une importante délégation chinoise et du ministère allemand de l’économie Sigmar Gabriel (à gauche sur la photo), Xi Jinping a accueilli en grande pompe un convoi de conteneurs chargés d’articles électroniques parti 16 jours plus tôt de Chongqing. A droite, Hannelore Kraft, ministre-présidente de Rhénanie-du-nord-Westphalie.


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