›› Editorial
La réticences de l’establishment américain, en dépit de l’appui officiel de la Maison Blanche, les manquements et les insuffisances du successeur de Kim Dae Jung, attaqué de toutes parts et qui s’est suicidé en 2009, ont ramené au pouvoir la mouvance conservatrice, chère à Washington, en la personne du très peu charismatique Lee Myong Back et replacé Séoul dans l’orbite exclusive de la Maison Blanche.
Non pas que la « Sunshine Policy » ait directement contribué à résoudre le paradoxe de la Corée du Nord. L’état moribond, héritier du « pays ermite », reste en effet claquemuré dans sa paranoïa agressive et nuisible, que la Chine et d’autres comme les Etats-Unis et l’UE tiennent sous assistance, et à qui Washington refuse tout accord de non agression, à moins qu’il ne se soumette d’abord aux conditions d’un désarmement nucléaire complet et vérifiable. On ne connaît d’ailleurs pas très bien les raisons des dérapages réguliers du régime. Sont-ils le résultat de querelles internes, entre les militaires et la famille Kim ? Ou bien une manière de signaler à l’attention du monde de nouvelles pénuries pour obtenir, par le chantage, une aide directe ? Ou encore une manière de signaler à Séoul, que Pyongyang traite de « marionnette », que sa proximité avec Washington est une trahison et un obstacle au rapprochement ?
A la vérité l’opacité est telle que, même à Séoul, on se perd en conjectures, tandis que les risques d’engrenage catastrophique limitent forcément les réponses militaires. C’est pourquoi, la politique d’ouverture de Kim Dae Jung avait au moins l’avantage de conférer à la Corée du Sud une marge de manœuvre dans la gestion de la quadrature du cercle et de son avenir, dans un contexte général très complexe, où la force des enjeux ne plaide d’ailleurs pas pour la perspective d’une solution rapide.
Quant au fond de la question, qui renvoie à la prolifération nucléaire et à la sécurité générale de l’Asie du Nord-est, c’est incontestablement la Chine qui en détient les clefs. Et tout indique en effet qu’elle ne fera rien qui pourrait risquer de précipiter la chute du régime, dont elle craint les conséquences pour elle-même (réfugiés, déstabilisation de la péninsule, présence des forces américaines sur sa frontière Nord-est etc.).
Dans ces conditions il est utile de se demander quelle serait le rôle du dialogue à 6 dont Pékin, qui craint par-dessus tout un dérapage militaire, réclame la reprise urgente, tandis que Washington et ses deux compères de Tokyo et Séoul, échaudés par le parti pris chinois au profit de Pyongyang, font la fine bouche.
Selon Victor Cha, expert américain de la question, d’origine coréenne, le dialogue à 6 « ne mènera jamais à rien. Il n’est qu’un moyen de gérer la menace, circonscrire les risque de prolifération, en attendant que le Régime s’effondre ».
Il prend peut-être ses désirs pour des réalités, car tout comme la chute du mur de Berlin et la réunification de l’Allemagne ont été initiées par l’effondrement de l’URSS, une évolution significative de la situation en Asie du Nord-est passerait par une grave secousse politique intérieure en Chine, que, pour l’heure, personne n’envisage sérieusement.