Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Lectures et opinions

ALIBABA et les investissements cachés de l’oligarchie

Boyu Ziben 博裕资本, la société de courtage en bourse des fils de princes

Les revenus boursiers occultes des « 太子 ».

L’offensive contre les fils de la nomenklatura que les Chinois nomment les « 太子 » est prononcée en amont de l’introduction très attendue à la bourse de New York d’ALIBABA, le géant chinois du commerce en ligne et de stockage des données qui tente de concurrencer Google après avoir créé Yu’E Bao (Alipay) le site de paiement et de gestion des actifs financiers, tout en investissant dans l’industrie du cinéma à Hong Kong. Selon la presse spécialisée l’introduction pourrait permettre de lever 15 à 25 Mds de $ et de valoriser l’entreprise à hauteur de 200 Mds de $ dont une partie viendrait enrichir les fils de prince.

Michael Forsythe qui signe un article paru le 20 juillet, indique que l’imbrication de l’oligarchie avec ALIBABA commence une fois encore par la famille de Wen Jiabao qui, par le truchement de son fils Wen Yunsong (Winston Wen) cofondateur de la société de courtage privée New Horizon Capital, avait en 2012 massivement investi dans ALIBABA dont le capital avait été ouvert au moins à raison de 30% à des réseaux de fils de prince dont les détails étaient restés opaques.

Ces derniers étaient aussi abrités derrière les rideaux très officiels du Fonds souverain chinois CIC, de Boyu Capital (la société de courtage des « fils de prince »), de CITIC Capital, excroissance du groupe d’état CITIC pour la gestion des investissements boursiers et de CDB Capital, la branche officiellement « privée » de la Banque Chinoise de Développement, dont la maison mère avait elle-même prêté 1 Mds de $ à ALIBABA quand le groupe avait investi dans Yahoo.

Installés près des postes de commandes de ces institutions se trouvent les fils et petits fils de puissants hommes politiques chinois dont les connexions s’étendent à nombre d’alliés eux-mêmes en poste dans les ministères du Conseil des Affaires d’État. Déjà tous ont largement bénéficié de la croissance d’ALIBABA. A la fin 2013, New Horizon Capital révélait par le truchement de sa filiale Legacy Capital enregistrée aux îles Caïman, que la valeur de ses actions dans le groupe du commerce en ligne étaient cotées à 3,73 fois leur valeur initiale. Dans ce contexte, l’investissement initial de 400 millions de $ effectué par Boyu Capital dont le fils de Jiang Zemin Alvin Jiang est partenaire, valait aujourd’hui plus d’un milliard de $.

Un dispositif compliqué pour prévenir les indiscrétions

La plupart du temps les actifs sont répartis, dissimulés et, par sécurité, sans cesse transférés de l’une à l’autre des sociétés écran enregistrées dans les paradis fiscaux des Caraïbes.

Selon des informations révélées à la SEC par les documents de l’introduction en bourse d’ALIBABA, les actifs de Boyu sont enregistrés aux Îles Vierges dans Athena China Limited, une filiale du groupe, elle-même abritée au sein d’une autre société écran du nom de Prosperous Wintesweet BVI qui figure dans l’organigrame de Boyu Capital Fund, enregistré aux Îles Caïman. Créée en 2011 Legacy Capital, filiale de la société du fils de Wen Jiabao a réparti ses actifs dans un subsidiaire de Boyu, dans Athena China et dans New Horizon Capital IV, une autre de ses filiales qui toutes possèdent des actions d’ALIBABA.

La liste des « fils de prince » impliqués dans ces montages et qui bénéficient de la hausse des cours d’ALIBABA compte le vice-président de CDB Capital en 2012, He Jinlei, fils de He Guoqiang, prédécesseur de Wang Qishan à la Commission de discipline du Parti, Chen Yuan, n°1 de la China Development Bank qu’il a quittée en 2013, fils de Chen Yun, un des plus anciens fidèles de Mao, rétrogradé par lui durant la Révolution culturelle puis réhabilité par Deng ;

Y figurent aussi Liu Lefei, le fils de Liu Yunshan, grand maître de la propagande du Régime, qui à la mi-2012 était le Directeur d’une branche de CITIC, gérant des actifs boursiers privés, dont il est aujourd’hui le n°2, Jeffrey Zeng (Zhijie Zeng), en poste à la direction de CITIC Capital, fils de Zeng Peiyan, ancien président de la Commission de la Réforme et Développement de 1994 à 2003, président du petit groupe dirigeant pour le développement de l’Ouest et Vice-premier ministre jusqu’en 2008 et enfin le directeur d’une filiale de CITIC, Wang Jun fils de Wang Zhen, proche de Mao et ancien vice-président de la République de 1988 à 1993.

Censure, succès et jalousies.

Comme il l’avait fait en 2012, à propos des articles mettant en cause les familles de Xi Jinping et Wen Jiabao, le 26 juillet le Parti a donné aux médias des instructions de ne pas reprendre les informations sur la 2e génération des « fils de princes » appelées les « hong er dai 红二代 – le 2e génération rouge -, publiées par le NYT qui a également mis en ligne une version chinoise de son article. Comme en 2012, il est probable que la mise à jour des détails d’investissements, des prêtes-noms et des sociétés écrans aura été réalisée grâce à des réseaux chinois concurrents dont les motivations ne manquent pas.

Derrière son image d’investisseur privé, Jack Ma l’ancien PDG d’ALIBABA dont l’influence dans le groupe est toujours importante, s’est donc ménagé de solides appuis qui remontent au cœur du pouvoir à Pékin, dont le n°1 fut lui-même de 2002 à 2007, Secrétaire Général du Zhejiang à Hanghzhou, lieu de naissance d’ALIBABA.

L’audience de Jack Ma est d’autant plus solide que le groupe a créé directement 12 millions d’emplois. Mais sa rapide ascension, sa fortune, sa puissance et la qualité de ses réseaux créent des jalousies. Surtout ses investissements dans les services financiers heurtent de plein fouet les intérêts des Banques Publiques.

Déclenchées par ceux qui voient d’un mauvais œil le vent d’ouverture tous azimuts que souffle ALIBABA, des contre-attaques contre lui peuvent donc être lancées pour de multiples raisons qui peuvent aller de l’infraction à la loi sur les monopoles, aux flous juridiques des montages financiers, en passant par la corruption des élites qu’il abrite.


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

Depuis le conflit à Gaza, Pékin confirme son nationalisme antioccidental

Subjuguer Taiwan : les cinq options de coercition du parti communiste

Le Parti met en examen Terry Gou, candidat à la présidentielle taiwanaise

L’impasse énergétique de Tsai Ing-wen

Un expert japonais de la Chine explore les arrière-pensées stratégiques de Xi Jinping