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›› Politique intérieure

La puissance militaire chinoise et le réarmement de l’Asie

Un effort insistant au détriment d’autres priorités.

Le destroyer Haikou (à gauche) et la frégate Yueyang ont participé en 2014 à la manœuvre américaine RIMPAC, en même temps que le navire logistique Qiandaohu (Photos Reuters).

Les chiffres chinois traduisent deux tendances. La hausse qui, pour la 4e année consécutive, dépasse nettement celle de la croissance, marque la volonté évidente de renforcer sans faiblir la puissance militaire – nombre d’experts chinois et étrangers qui comparent le budget chinois à l’américain estiment en effet que la hausse répond à peine aux vastes défis de sécurité de la Chine -.

La priorité accordée à la sécurité nationale se traduit aussi par les choix d’allocation de ressources. La somme des budgets défense et sécurité publique réunis : 104.1027 milliards de RMB (170 Mds de $) – de loin le premier poste de dépenses chinois – dépasse de presque 50% celui des affaires sociales ; elle est plus du double du budget de l’éducation nationale et le triple du poste de santé publique.

…qui veille cependant à protéger l’équilibre budgétaire.

En même temps, le freinage de la hausse par rapport à 2014 exprime le souci de protéger les équilibres budgétaires, même si ces derniers sont de plus en plus difficiles à tenir comme l’indique le creusement des déficits publics. Autant qu’on puisse se fier aux chiffres officiels, la part du budget militaire dans le budget général du pays et son rapport au PNB montrent en effet que Pékin veille à ne pas répéter l’erreur de l’URSS qui avait laissé ses dépenses militaires peser de manière insupportable sur l’économie du pays.

Si on examine la part de la défense dans le budget général, on constate d’abord que la hausse des dépenses militaires est légèrement inférieure à celle du budget général (+10,1% contre +10,4%) et que leur part des dépenses publiques est de l’ordre de 5%. Quant au pourcentage par rapport au PNB, depuis la fin des années 80, il stagne très en-dessous des 2% (les chiffres officiels chinois rappelés par Chen Zhou chercheur à l’Académie des Sciences Militaires, situent le pourcentage entre 1,3 et 1,5%, contre 3% aux États-Unis).

Lire nos articles :
- Les dépenses militaires. Entre équilibre budgétaire et volonté de rattrapage

- Livre Blanc sur la Défense entre ambiguïté et transparence

Un choix déterminé appelé à durer.

Les discours du régime engagé dans un mouvement de modernisation dont la puissance militaire a toujours été un des piliers, indiquent que la tendance à la hausse des dépenses de défense est appelée à durer. Autant qu’on puisse le déduire de la documentation ouverte et des déclarations chinoises dont celles de Fu Ying, ancienne ambassadeur à Manille, Canberra et Londres, aujourd’hui porte parole de l’ANP, il est probable que les dépenses militaires seront consacrées à la paye du soldat et à l’amélioration de ses conditions de vie qui, selon l’International Institute for Strategic Studies (IISS), absorbent au moins 30% du budget.

Au passage, reprenant les arguments contre la Maison Blanche que le régime développe depuis 2010, Fu Ying n’a pas manqué de critiquer Washington dont le budget militaire est égal à la somme des 10 autres pays en tête, après les Etats-Unis, de la liste mondiale des dépenses de défense : « nos succès reposent sur la réforme et l’ouverture ; au lieu de la “diplomatie de la canonière “ nous avons mis en œuvre des coopérations à l’avantage de tous qui ont permis d’ouvrir la voie du développement pacifique ».

La marche vers la haute technologie.

Quant aux équipements, leur sophistication technologique croissante et leur nombre dont la Chine estime devoir se doter justifient amplement une hausse du budget très supérieure à la croissance. La priorité navale ne fait pas de doute (sous-marins, unités amphibies, nouveau porte-avions), à quoi il faut ajouter les missiles anti-navires, les hélicoptères, les chasseurs furtifs, les drones et les moteurs d’avions pour lesquels 49 Mds de $ avaient récemment été dégagés sur 20 ans au profit de Xi’an Aero Engine, 西安航空动力股份有限公司, (Xi’an Hang Gong Dong Ji Gufen Youxian Gongsi), un des n°1 des moteurs militaires.

Un effort particulier est en cours pour augmenter la mobilité des unités terrestres et leurs capacités de projection en phase avec les tensions en mer de Chine, ce qui suppose d’équiper l’APL en avions de transport longue distance tels que l’avion cargo Y 20 (premier vol le 20 janvier 2013, 10 000 km de rayon d’action avec une unité aéroportée à bord ou 5000 km avec 60 tonnes de charge). Le tout est appuyé par l’informatisation des unités, le développement des aptitudes à la « cyberguerre » en utilisant le soutien des satellites d’observation et de communication. De plus en plus les équipements de l’APL sont fabriqués en Chine.

La Chine 3e exportateur d’armes…

L’observation des salons d’armement et aéronautiques montre en effet qu’au cours des 10 dernières années la Chine a réduit ses importations d’équipements militaires, tandis qu’elle a entrepris de construire une industrie de défense performante. L’ambition des grands constructeurs navals et aéronautiques chinois tels China State Shipbuilding Corporation (CSSC) 中船集团, Aviation Industry Corporation of China (AVIC) 中航空工业集团公司 et China Aerospace Science and Industry Corporation (CASIC) 中国航天科工集团公司 est de se mettre peu à peu en mesure d’imiter leurs modèles américains comme Lockheed Martin et Northrop Grumman ou britannique tels BAE Systems.

…loin derrière les États-Unis et la Russie.

La stratégie fonctionne puisqu’un rapport du SIRPI de mars 2015 révèle qu’entre 2010 et 2014 les importations d’armement chinoises ont diminué de 42%, réduisant les achats aux grands fournisseurs (Russie, France, Ukraine dont les parts de marché sont respectivement de 60%, 16% et 13%). Dans le même temps, la Chine s’est hissée au troisième rang des exportateurs d’armement avec 5% des parts de marché, à égalité avec la France et l’Allemagne dont les ventes sont en recul, cependant loin derrière les États-Unis et la Russie qui à eux deux cumulent 58% des parts de marché (États-Unis 31% ; Russie 27%).

Selon le rapport, au cours des 5 dernières années les ventes d’armement de la Chine ont augmenté de 143% avec 60% des produits – assez souvent des équipements navals et des avions de combats aux prix défiant toute concurrence comme le chasseur JF-17 - destinés au Pakistan, au Bangladesh, au Myanmar et l’Indonésie, au Venezuela, à l’Algérie et à 18 pays africains.

Il reste que la croissance régulière et soutenue des dépenses militaires depuis un quart de siècle, créent un malaise en Asie qui induit mécaniquement la hausse des dépenses militaires de la zone.

Mais l’inquiétude ne vient pas tant de l’imprécision des données chiffrées sur la R&D, les pensions et salaires, les achats d’armements, la 2e artillerie et les forces nucléaires stratégiques, au point que le SIPRI estime que les dépenses militaires chinoises dépassent de 50% les chiffres officiels et que leur part du PNB est au-dessus de 2%.

Elle s’alimente surtout des revendications exorbitantes de Pékin en mer de Chine du sud et les récentes opérations de remblaiement d’une série d’une série d’îlots de l’archipel des Spratlys. Lire : Nouvelles tensions en mer de Chine du Sud


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