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Secousse politique à Taïwan. Réajustements, manœuvres et arrière-pensées

Tsai Ing-wen et Hsieh Chang-ting, deux têtes politiques du DPP qui doivent résoudre la difficulté de définir une politique chinoise apaisée, condition du retour au pouvoir du Parti, sans pour autant renoncer au projet d’identité politique séparée et souveraine.

Frank Hsieh : alternative crédible ou impasse politique ?

Les coups de sonde du Parti Communiste n’ont pas négligé le poids lourd du DPP, Frank Hsieh (68 ans), en Chinois Xie Changting 謝長廷ancien maire indépendantiste du fief de Kaohsiung (1998 – 2005), ancien n°1 du DPP (2000 – 2002) et ancien Premier Ministre indépendantiste (2005-2006). En octobre 2012, il fut la plus emblématique figure du Parti indépendantiste à visiter la Chine.

Reçu pendant 5 jours, au plus haut niveau possible par Dai Bingguo, Conseiller d’État pour les Affaires stratégiques, Chen Yunlin, président de l’Association pour les relations dans le Détroit (ARATS) et Wang Yi, le futur ministre des Affaires étrangères, à l’époque Directeur du Bureau des Affaires taïwanaises jusqu’en mars 2013 et prédécesseur de Zhang Zhijun, l’ancien premier ministre de Chen Shuibian intéresse Pékin pour sa souplesse et sa capacité à s’éloigner de la rigidité des affirmations indépendantistes.

L’évocation de Frank Hsieh ramène invariablement à la réflexion existentielle conduite par le DPP. A ce jour, il est en effet l’homme politique taïwanais ayant le plus directement pris la mesure de la contradiction d’une relation apaisée du parti indépendantiste avec Pékin qui rejette sans esprit de retour l’esprit de rupture que représentent le refus du « Consensus de 1992 » et le projet d’une identité politique séparée et souveraine de l’Île. A cet effet, Hsieh a, pour l’instant sans succès, propagé l’idée de « deux interprétations différentes de la constitution chinoise », un détour sémantique et logique qui évite d’afficher le refus brutal du « Consensus de 1992 ».

« Une constitution, deux interprétations »

Par cette interprétation institutionnelle dont il espère qu’elle pourrait rallier tous les Taïwanais, Frank Hsieh apporte sa pierre à la solution de l’impasse politique dans lequel se trouve le Parti indépendantiste. Pour l’ancien premier ministre, la loi fondamentale taïwanaise étant, pour l’instant, celle de la République de Chine, c’est sur elle que devrait porter le consensus à l’intérieur de l’Ile et le dialogue entre Pékin et Taipei, au lieu du « Concept d’une seule Chine ».

Il considère aussi que la référence à deux interprétations de la constitution contient en filigrane l’idée que Taïwan et la Chine sont bien deux entités séparées. Elle renvoie bien plus à une exigence de souveraineté que ne le fait la formule d’une seule Chine, contenue dans le consensus de 1992 et, de ce fait, convient mieux à un parti dont la vision politique s’articule autour de l‘idée de séparation.

En janvier 2013, au retour d’un périple aux États-Unis, où il s’était rendu après son voyage en Chine, il ajoutait : « s’il advenait que la Chine communiste nous refuse l’appellation de “République de Chine”, inscrite dans notre constitution et qui nous donne plus de dignité que le “consensus d’une seule Chine”, alors il serait temps de changer la constitution (…) “Une seule Chine avec deux interprétations de part et d’autre du Détroit”, qui est l’interprétation du KMT, implique déjà que les deux rives sont parties d’un même pays. (…) Alors que ma proposition, qui renvoie à deux constitutions indique que nous sommes en présence de deux entités politiques séparées ».

Prendre ses distances avec l’idée rigide d’indépendance.

Dans une de ses dernières interventions publiques, lors d’une interview accordée au journal en langue chinoise China Times, le 15 janvier 2014, Frank Hsieh avait brutalement remis en cause la stratégie de Su Tseng-chang, l’éphémère prédécesseur de Tsai Ing-wen à la tête du Parti : « le Parti ne peut pas se permettre de rester inerte à propos de sa politique chinoise. S’il veut reprendre le pouvoir, il doit en changer rapidement ».

Précisant sa pensée, il ajoutait en substance qu’il fallait écouter la voix des électeurs du KMT et considérer toutes les options y compris celle consistant à mettre sous le boisseau la revendication d’indépendance. « La solution qui consiste à rejeter à la fois tout ce qui a trait à la Chine et toutes les propositions du KMT est un cul de sac ».

Les contours du casse-tête

Ces contradictions sur lesquelles Tsai Ing-wen et son bureau politique doivent maintenant se pencher ont déjà été publiquement résumées en 2013.par deux sommités politiques taïwanaises Ajoutés aux réflexions de Hsieh Chang-ting, leurs jugements bordent les contours du casse-tête indépendantiste qui promet de vifs débats en 2016.

Wu Yu Shan, Directeur de l’Institut des Sciences politiques de la célèbre Academia Sinica estimait que « le principal problème du DPP était de savoir comment il arriverait à se construire une image crédible de négociateur avec le Continent sans reconnaître le Consensus de 1992 - sur l’existence d’une seule Chine -, dont Pékin fait la condition essentielle pour lui parler (…). Tant que les électeurs auront conscience de cet obstacle ils ne voteront pas pour le DPP à la présidentielle, quelle que soit l’impopularité du KMT ». Cette réalité était probablement à la racine de l’échec de Tsai Ing-wen à la présidentielle en 2012.

Mais, la mise au point la plus dérangeante pour le DPP empêtré dans ses contradictions d’opposant indépendantiste voulant reconquérir la confiance d’une population en majorité réticente à créer des tensions avec la Chine, est venue de Shen Fu-hsiung, lui-même membre du DPP, ancien n°2 du Yuan Législatif : « l’intention du Parti de mettre au point une stratégie qui plairait à la fois aux Taïwanais et à la Chine, tout en étant différente de celle du KMT est vouée à l’échec. Le Parti devrait réfléchir à ce qu’il veut. Son objectif ultime est-il de prendre le pouvoir ou de se battre pour l’intérêt des Taïwanais ? ».


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