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›› Editorial

Covid-19 : La démocratie, l’efficacité politique et l’attente des peuples

La face cachée de l‘efficacité chinoise.

Alors que le lundi 9 mars l’ophtalmologue Zhu Heping était le 4e médecin de l’hôpital de Wuhan à perdre la vie, après les docteurs Li Wenliang (nuit du 6 au 7 février), Jiang Xueqing (1er mars) et Mei Zhongming (3 mars), tandis que le n°2 du service de chirurgie thoracique est encore en réanimation, le Dr AI Fen 艾芬, chef des urgences de l’hôpital de Wuhan a, le 11 mars, dénoncé l’ingérence politique néfaste de la bureaucratie du parti dans la gestion initiale de la crise épidémique.

Précisant qu’elle-même avait été sermonnée en décembre pour avoir signalé la propagation inquiétante d’un virus proche de celui du SRAS, le Dr AI, choquée par le décès de ses collègues, accuse sans ambages la hiérarchie de l’hôpital et la bureaucratie de Wuhan d’avoir retardé la mise en œuvre de mesures prophylactiques efficaces, l’atermoiement ayant été, selon elle, à l’origine de la propagation rapide de l’épidémie à Wuhan.

Dans une interview au magazine chinois 人物 aujourd’hui censurée, mais dont la teneur en ligne a, grâce à de rapides captures d’image, été diffusée dans le monde et reprise par Caixin et The Guardian, AI Feng explique que le 30 décembre dernier ayant vu plusieurs patients atteints de symptômes de grippe résistant au traitement habituel, elle observa que l’un des résultats d’analyse qu’elle avait sollicitée, mentionnait explicitement « SRAS Coronavirus ».

Après avoir surligné le terme SRAS, elle prit une photo du résultat d’analyse qu’elle envoya à un de ses collègues, dans un autre hôpital de la ville. Mais le soir même, la photo, premier indice de l’épidémie qui avait été vue par Li Wenliang, circulait déjà hors du cercle confidentiel des médecins.

Plus tard dans la soirée, Ai reçut un message de l’hôpital disant que les informations sur cette mystérieuse maladie ne devaient pas être divulguées arbitrairement afin d’éviter de provoquer une panique. Deux jours plus tard, elle était convoquée par le chef de la Commission de discipline de l’hôpital et réprimandée pour « diffusion de rumeurs pouvant porter atteinte à la stabilité sociale ».

Ingérence politique, retards et décès des médecins.

Dans la foulée, tout le personnel de l’hôpital reçut l’ordre de s’abstenir de transmettre des messages ou des images liés au virus. Mais alors que l’épidémie commençait à se répandre, avec notamment l’apparition de malades sans lien avec le marché aux fruits de mer de Wuhan, AI décida de désobéir à la hiérarchie et ordonna aux personnels de son service de porter des vêtements de protection que l’hôpital avait interdit.

Les patients sans lien avec le marché de Wuhan étaient les premiers indices d’un probable transmission entre humains, mais toujours niée par le discours officiel cherchant à accréditer l’idée d’une pathologie locale facile à contenir.

Le 21 janvier, le lendemain du jour où les autorités sanitaires acceptèrent de reconnaître une transmission humaine directe, 9 personnes étaient déjà décédées, 440 étaient contaminées, l’épidémie s’était répandue dans 13 provinces, tandis qu’à Wuhan, 1523 patients porteurs de symptômes se présentèrent à la consultation.

Dans l’interview donnée au magazine Renwu 人物 Ai Fen choquée par les scènes dramatiques de décès auxquelles elle a assisté, exprime ses regrets avec virulence : « Si j’avais su que le virus allait tuer plus de 3000 personnes - le chiffre est celui du 1er mars, à la date de la rédaction de cette note le nombre de décès était de 4628) - je n’aurais pas prêté attention aux réprimandes, mais répandu l’information du mieux que j’aurais pu le faire ».

Très en colère et consciente qu’elle risque son poste, le Dr AI, ne prend plus de gants. Alors qu’on l’accusait d’avoir mis en danger la stabilité sociale, elle réplique en accusant les censeurs d’avoir mis gravement en danger la vie des malades et des médecins.

« Les fausses informations officielles affirmant que la maladie était contrôlable et ne se propagerait pas directement entre humains - ont laissé des centaines de médecins et d’infirmières dans le noir. Ces derniers firent de leur mieux pour traiter les patients sans connaître l’épidémie » (…) « Et même lorsqu’ils sont eux-mêmes tombés malades, ils ne furent pas autorisés à alerter leurs collègues et le public à temps ».(…) « Leur sacrifice est une perte et une expérience douloureuse ».


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