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›› Chronique

Hong – Kong sous influence

Le 23 décembre dernier C.Y Leung gouverneur de Hong Kong était à Pékin pour rendre compte de la situation dans la R.A.S. La rencontre avec Xi Jinping a eu lieu au milieu de plusieurs controverses accusant Pékin de déroger au principe « Un pays deux systèmes ».

Le 23 décembre dernier, à Leung Chun-ying, Gouverneur de Hong-Kong venu à Pékin rendre compte de la situation de la R.A.S, Xi Jinping avait, en présence de Zhang Dejiang président de l’ANP, réaffirmé la détermination du Bureau Politique à respecter, sans le dénaturer, le principe « d’un pays deux systèmes ».

Pourtant, depuis l’automne 2015, les intellectuels Hong-kongais sont en effervescence à propos de deux controverses liées au statut de la Région garantissant la liberté académique, la liberté d’expression et l’indépendance de la justice :

1) le blocage par la mouvance pro-pékin de la nomination au poste de vice-recteur de l’Université de Hong Kong d’un professeur de droit proche du mouvement Occupy Central ;

2) la disparition de 5 libraires et éditeurs d’une librairie spécialisée dans la publication de livres critiques ou polémiques sur la Chine, suivie, le 17 janvier, de la réapparition contrite de l’un d’entre eux, faisant amende honorable à propos d’un accident de la circulation provoqué par sa conduite en état d’ivresse, survenu en Chine il y a 11 ans, ayant entraîné la mort d’un passant.

Les informations révélées le 17 janvier par Willy Lop-Lam, lui-même renvoyé du South China Morning Post en 2000 (voir la note de contexte), selon lesquelles la bourrasque contre les libraires aurait eu pour but d’empêcher la vente d’un livre polémique sur la vie privée de Xi Jinping, éloigne les projecteurs de la relation Chine – Hong Kong pour les recentrer sur les affres de la politique intérieure chinoise, alors que la bataille pour le 19e Congrès a commencé.

Enfin, depuis la nouvelle rendue publique le 11 décembre 2015 du rachat du South China Morning Post par le groupe Alibaba, les commentaires fleurissent sur la stratégie chinoise de contrôle de l’information par les médias Hong-kongais sous influence.

*

Coup de boutoir contre l’Université.

A la fin septembre 2015, l’Université de Hongkong, connue depuis plus d’un siècle comme une des premières d’Asie, creuset d’un enseignement libéral et ayant formé de nombreux fonctionnaires, hommes politiques et avocats de la colonie puis de la R.A.S, s’est trouvée soudain placée sous la pression des professeurs acquis à la cause de Pékin opposés à la nomination au poste de vice-recteur du professeur de droit Johannes Chan lié au mouvement « Occupy Central ». Lire notre article Hong Kong : un suffrage universel aux « caractéristiques chinoises. »

Avant de calmer le jeu, le 17 décembre dernier, dans son discours de fin d’année (document PDF) où il a préféré mettre l’accent sur la nécessité de dépasser les querelles de personnes, le professeur Peter Mathieson spécialiste des pathologies rénales et Président de l’Université avait confié à Reuters son sentiment que la série de plusieurs centaines d’articles publiés dans la presse de Pékin depuis novembre 2014 dénonçant les liens du professeur Chan avec les « rebelles » d’Occupy Central – ce qui le rendait déontologiquement inapte au poste -, avait été orchestrée par le pouvoir politique à Pékin.

L’affaire se trouve au croisement entre les transes politiques qui secouent la relation de la RAS avec le Politburo, le dogme universitaire de la liberté de pensée des intellectuels attachés à un véritable suffrage universel sans entraves et l’autonomie académique de l’Université. Elle révèle l’attention soutenue avec laquelle Pékin surveille le large éventail des facteurs risquant d’affaiblir son autorité dans la R.A.S.

Vu de Pékin, la présence d’un émule d’une démocratie authentique au sein du collège directorial de l’Université de Hong Kong, en charge, entre autres, de la formation des fonctionnaires de la R.A.S, sent le souffre. A l’inverse, le monde académique considère l’incident, par la suite minimisé par le Président Mathieson lui-même, comme une intrusion insupportable portant atteinte au principe de l’autonomie académique.

Dans un article intitulé « la main invisible de Mao à Hong Kong », paru le 21 octobre dans Foreign Policy, Ho-fung Hung, sociologue à Johns Hopkins, David Schlesinger, ancien patron de Thomson Reuters en Chine et fondateur du site Tripod Advisors d’analyse politique et économique sur la Chine et Denise Y. Ho historienne de la Chine moderne, diplômée de Harvard, dénonçaient le « lent et silencieux effacement de l’indépendance académique à Hong Kong », par des actions quotidienne et invisibles dont les effets seraient bien plus graves que le simple refus de la nomination d’un avocat lié à la dissidence.

…et contre le schéma « Un pays deux systèmes ».

Ainsi sont pointés du doigt la surveillance constante des professeurs par des « espions » s’insinuant dans les cours alors que plane la menace d’un non renouvellement du visa de ceux des enseignants qui traiteraient imprudemment d’une question historique trop sensible comme la révolution culturelle par exemple. Avec en arrière plan, l’accusation politique de « discréditer la Chine ».

A force de vouloir « calibrer » l’enseignement et la réflexion dans les limites d’un cadre politique strict, le risque existe, poursuit l’article, de détruire d’abord la liberté de pensée qui fait la spécificité irremplaçable et l’attractivité de la R.A.S, puis, par contagion, l’indépendance de la justice. Après quoi plus rien ne différenciera Hong Kong de Dalian, ou de Chongqing.

A la différence du Président Mathieson, la conclusion de l’article ne sous estime pas l’incident. Au contraire, le sociologue Ho-fung Hung considère que le rejet du professeur Chan constitue la première vraie victoire de la ligne dure de Pékin contre l’autonomie de Hong Kong et le concept « un pays deux systèmes ».

Prémisses de coup de tabac au Legco.

Plus encore, il anticipe que l’épisode présage des tensions au sein de l’appareil législatif de la R.AS. Les prémisses de ces frictions se lisent d’abord dans la dégradation des relations entre le politburo et Li Ka-shing, violemment critiqué par la presse officielle du régime pour avoir retiré ses investissements de Chine. A quoi Li Ka-shing avait répliqué que les articles contre lui, avaient « l’effrayant parfum de la révolution culturelle. »

Un autre signe avant-coureur de tensions a sein de l’establishment pro-chinois de la R.A.S est la différence de perception des performances du gouverneur. Très apprécié par Pékin qui se félicite de ses résultats et voudrait le reconduire en 2017, C.Y. Leung, impopulaire dans l’opinion, est aussi détesté au sein du Conseil législatif (Legco) par une puissante coterie affiliée au Front Uni et normalement proche de Pékin, mais qui ne souhaite pas sa reconduction. Parmi ses ennemis, Jasper Tsang, proche du Politburo et Président du Legco suffisamment influent pour présenter un autre candidat au cas où Pékin insisterait pour reconduire Leung.


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